«Les compagnies doivent prendre des risques en innovant, sinon elles perdront», estime Pierre Gramegna. (Photo: Maison Moderne)

«Les compagnies doivent prendre des risques en innovant, sinon elles perdront», estime Pierre Gramegna. (Photo: Maison Moderne)

Le quatrième Aca Insurance Day avait une saveur particulière jeudi soir puisqu’il marquait aussi les 60 ans de l’Association des compagnies d’assurances luxembourgeoises (Aca). C’est donc l’assistance des grands soirs qui s’est pressée au Centre de conférence du Kirchberg. Plus de 800 personnes selon les organisateurs.

Outre l’homme d’affaires et multi-entrepreneur Norbert Becker qui a évoqué sans détour les atouts du Luxembourg et les points sur lesquels le pays, via ses gouvernants, pouvait s’améliorer pour répéter des succès entrepreneuriaux, l’assistance attendait aussi le discours de Pierre Gramegna, traditionnel invité de l’événement où, il y a trois ans, il avait effectué sa première sortie gouvernementale.

Reprenant volontiers l’image du train utilisée par Norbert Becker pour évoquer la transformation digitale que les acteurs luxembourgeois de l’assurance ne devront pas manquer, le ministre des Finances a reconnu «qu’un train peut en cacher un autre.» «Nous savons que le monde de l’assurance traverse une période difficile», avec la succession des wagons réglementaires qui n’en finissent pas de défiler depuis 2008.

Le deuxième train, celui de la digitalisation, est plutôt un TGV, indique le ministre. «Mieux vaut ne pas rater la marche et se préparer à courir en parallèle du quai.» Quant au troisième train identifié jeudi soir, celui des taux extrêmement bas, le ministre le compare à un omnibus car cette tendance perdurera et qu’il faudra s’y adapter.

S’adapter à tous les niveaux

La capacité des assureurs à s’adapter à ce contexte triplement changeant est ressortie des différentes interventions de la soirée, également de la part de la présidente de l’Aca, Marie-Hélène Massard.

«Les compagnies doivent prendre des risques en innovant, sinon elles perdront», estime Pierre Gramegna qui avait par ailleurs bien reçu le message de Norbert Becker quant au besoin du Luxembourg de rester compétitif sur le plan fiscal et donc de continuer à baisser le taux d’imposition des sociétés.

«J’ai bien reçu le message que cela n’était pas assez. J’ai promis moins (par rapport à d’autres pays, ndlr), mais j’ai promis que j’allais implémenter cela dans les prochaines semaines», ajoutant que la fiscalité serait plus que jamais monitorée dans le contexte de Beps, envoyant ainsi un signal au marché.

Londres restera le plus grand centre financier mondial.

Pierre Gramegna, ministre des Finances

Les incertitudes sur le plan géopolitique se sont aussi invitées à la séance académique de l’Aca. Pierre Gramegna a plaidé d’une part pour que l’Union européenne puisse aussi parler des éléments de réussite et faire en sorte de rester compétitive, et d’autre part pour «faire en sorte que les fruits de la croissance soient mieux distribués».

«On oublie trop souvent combien le marché unique est précieux.» Et d’ajouter en référence à l’élection de Donald Trump et au référendum britannique «qu’un certain scepticisme s’installe face à la globalisation et à l’ouverture des machés».

En première ligne pour rencontrer les acteurs britanniques qui s’intéressent de plus en plus au Luxembourg pour y implanter une tête de pont européenne afin de garder un pied au sein du marché unique lorsque le Brexit sera effectif, Pierre Gramegna a rappelé le positionnement du gouvernement: «Londres restera le plus important centre financier mondial. Nous avons besoin de construire des ponts avec cette ville. Luxembourg est une partie de la solution.»

Nouveaux risques, nouvelles opportunités

Les 70 entreprises d’assurance-vie et non-vie qui opèrent sur le marché local ou à l’étranger via la LPS et les 12 entreprises de réassurances membres de l’Aca sont bien entendu en première ligne de ces tendances globales.

Le secteur ne peut pas encore estimer l’impact réel du Brexit, a déclaré la présidente de l’Aca, Marie-Hélène Massard, «mais de nouvelles compagnies d’assurances pourraient choisir le Luxembourg pour sécuriser leur point d’entrée en Europe».

Représentant 7000 employés, le secteur doit donc faire en sorte que les nouveaux risques liés à des évolutions technologiques (les voitures et les maisons connectées par exemple) ou à des catastrophes naturelles puissent aussi être source d’opportunités.

Un arbitrage risque/rendement de plus en plus difficile s’installe, ce qui impliquera pour les assureurs de rechercher de nouvelles sources de profits.