Yves Nosbusch: «En zone euro, le taux de chômage est tombé en dessous de 8% au mois de novembre, ce qui représente le taux le plus bas en dix ans.» (Photo: Anthony Dehez)

Yves Nosbusch: «En zone euro, le taux de chômage est tombé en dessous de 8% au mois de novembre, ce qui représente le taux le plus bas en dix ans.» (Photo: Anthony Dehez)

On se rappelle de la fameuse boutade de Paul Samuelson, un des économistes les plus importants du 20e siècle, qui disait, il y a plus de cinquante ans, que la bourse avait prédit neuf des cinq dernières récessions.

Samuelson faisait référence au fait que les corrections du marché boursier sont plus nombreuses que les récessions et que même de fortes baisses du marché boursier ne sont pas forcément un bon indicateur d’une récession à venir. 

Dans quelle mesure faut-il, dès lors, s’inquiéter de la correction boursière récente? Même si personne ne peut répondre avec certitude à cette question, il semble utile d’examiner une série d’indicateurs avancés dont voici quelques exemples.

Un premier indicateur-clé est l’évolution du chômage. En particulier, une augmentation du taux de chômage serait inquiétante puisque, historiquement, les débuts de récessions sont typiquement associées à de telles hausses. Ce n’est pas ce que nous observons aujourd’hui dans les principales économies.

Les données historiques montrent que la courbe de taux américaine s’inverse souvent avant une récession aux États-Unis.

Yves Nosbusch, chief economist, BGL BNP Paribas

En zone euro, le taux de chômage est tombé en dessous de 8% au mois de novembre, ce qui représente le taux le plus bas en dix ans. Aux États-Unis, il faut même remonter à la fin des années soixante pour retrouver des taux de chômage aussi bas que ceux enregistrés actuellement par l’économie américaine, et les statistiques récentes continuent à témoigner de la bonne tenue du marché du travail avec des créations d’emplois qui restent très soutenues. 

Un deuxième indicateur avancé est la pente de la courbe de taux. Les données historiques montrent que la courbe de taux américaine s’inverse souvent avant une récession aux États-Unis. Une inversion de la courbe de taux aux États-Unis, c’est-à-dire une situation dans laquelle les taux d’intérêt à long terme seraient moins élevés que les taux d’intérêt à court terme, serait donc inquiétante.

Pour le moment, ce n’est pas ce que l’on observe. En effet, la courbe de taux américaine s’est fortement aplatie sur les deux dernières années, mais elle n’est toujours pas inversée.

Nous venons de traverser une période de plusieurs années de croissance soutenue au niveau mondial.

Yves Nosbusch, chief economist, BGL BNP Paribas

Le marché du crédit mérite également une attention particulière. On observe aujourd’hui que l’endettement des entreprises américaines, contrairement aux entreprises européennes, a atteint des niveaux historiquement élevés. Or, les trois dernières récessions américaines étaient précédées d’un pic d’endettement des entreprises.

Dans ce contexte, une hausse significative des spreads (écarts de rendements) sur les obligations d’entreprises pourrait signaler une future augmentation des défauts de paiement de ces dernières. Pour le moment, ces spreads restent à des niveaux modérés en comparaison historique, même s’ils se sont écartés depuis un an.

Nous venons de traverser une période de plusieurs années de croissance soutenue au niveau mondial et nous nous approchons progressivement d’une fin du cycle économique. Néanmoins, les indicateurs avancés ne laissent pas supposer une récession en 2019.

Un ralentissement certes, mais pas une phase de contraction économique. Il s’agira néanmoins de rester vigilant et de continuer à surveiller de près les indicateurs qui pourraient signaler l’arrivée de la prochaine récession.