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Le parlement a voté, avant les élections, une loi accordant davantage d'aides aux entreprises et une autre renforçant les conditions d'accès à la profession.

En 2001, le gouvernement avait lancé le Plan d'action en faveur des PME, qui comprenait plus de 100 mesures, dont presque la totalité a été réalisée, estime Emmanuel Baumann, conseiller de gouvernement 1re classe au ministère des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement. Parmi ces mesures, deux lois importantes pour les entrepreneurs ont récemment été votées par le Parlement. Il s'agit de la loi-cadre d'aides au secteur des classes moyennes et la loi concernant le droit d'établissement.

La première de ces deux lois, votée le 11 mai dernier, réorganise en profondeur le régime des aides d'Etat en faveur des entreprises du secteur des classes moyennes et a remplacé, par un texte totalement nouveau, la loi du 29 juillet 1968. Objectif: adapter la législation luxembourgeoise aux réalités économiques et renforcer la compétitivité des PME.

Alors que le régime de 1968 avait été prévu pour moderniser les entreprises, ou en créer de nouvelles, ce régime unique sera remplacé, grâce à la nouvelle loi, par six régimes. "C'est la plus grande nouveauté de la loi", assure M. Baumann. Le cadre général des aides en faveur des PME, l'ancien régime unique, accordait une aide de l'Etat d'un maximum de 15% des investissements engagés, alors que les régimes spéciaux vont désormais plus loin, précise M. Baumann.

Le régime "investissement initial' prévoit ainsi une aide particulière, visant à inciter la création ou la reprise d'entreprises. "Cette aide consistera en une majoration de 10 points du taux applicable au titre du régime PME plafonné à 7,5% pour les moyennes entreprises et à 15% pour les petites entreprises. Cette aide existait déjà mais était modeste et forfaitaire", précise le fonctionnaire.

Le régime environnement a été créé pour encourager les entreprises qui prennent des mesures de protection de l'environnement et d'utilisation rationnelle des ressources naturelles. Le régime normal prévoit des aides de 30% de l'investissement.

La "recherche-développement" sera également éligible au titre des aides accordées par l'Etat, à hauteur de 25 à 50% de l'investissement, ainsi que la sécurité alimentaire - soutenant les entreprises obligées d'investir dans la traçabilité des produits ou dans l'amélioration des conditions d'hygiène - qui pourra obtenir un taux pouvant aller jusqu'à 40%.

Enfin, le régime dit "minimis" accordera une subvention de 100.000 euros maximum sur trois ans aux entreprises qui ne remplissent pas les conditions pour prétendre aux autres aides évoquées ci-dessus.

Régime étendu aux professions libérales

Cette loi innove encore par rapport à la loi de 1968 en ce sens qu'elle vise, au titre des dépenses éligibles, non plus les seules immobilisations corporelles mais aussi les investissements incorporels - tels que les droits de brevet, licences, ou tout autre savoir-faire ou connaissances techniques non brevetées - très importants, "voire indispensables pour les PME", tient à souligner Emmanuel Baumann. L'aide accordée s'élève à 7,5% pour les entreprises de taille moyenne (50 à 250 salariés) et à 15% pour les petites entreprises (moins de 50 salariés).

En outre, certains régimes d'aides seront étendus aux professions libérales, dont les besoins en infrastructures et équipements se rapprochent, aujourd'hui, de ceux du commerce et de l'artisanat.

Le secteur tertiaire représente à lui seul 70% du PIB. "L'investissement déclaré chez nous a atteint, l'an dernier, 185 millions d'euros d'investissements, indique M. Baumann. Avant, le régime offrait au maximum 15% d'aides. Il y a une autre approche car maintenant, on parle de taille de l'entreprise alors qu'auparavant, c'était plutôt les activités qui étaient visées. Les taux les plus importants étaient accordés aux activités nécessitant des investissements élevés et connaissant des problèmes de pérennité", note le fonctionnaire.

En revanche, les aides, pouvant atteindre 45% de l'investissement, accordées aux sociétés coopératives, associations et organismes servant les intérêts de l'ensemble des artisans et commerçants ou de certains secteurs de ces professions ont été supprimées. Tout comme la garantie d'Etat et les dotations au capital en faveur des mutualités de cautionnement du commerce et de l'artisanat. "C'était une évidence car il faut justifier ces régimes à la Commission européenne", insiste M. Baumann.

Autre (semi-)nouveauté, la Commission qui avise les dossiers peut demander un plan d'affaires, (c'est désormais écrit dans la loi). Selon les échos reçus par M. Baumann, "les entreprises attendent beaucoup de cette loi et sont d'avis que des régimes spéciaux permettent des accompagnements plus ciblés, favorables aux entreprises".

L'autre loi importante, celle sur le droit d'établissement, votée le 21 mai, modifie la loi du 28 décembre 1988, pour tenir compte des nouvelles exigences dans certains domaines et pour inclure des améliorations fonctionnelles.

Réduire le nombre de faillites

Les dispositions concernant l'accès à la profession ont été remaniées et l'accent a été mis sur des connaissances plus poussées de la gestion d'entreprise, qui seront désormais identiques selon la branche commerciale envisagée. Bien évidemment, cette loi vise aussi à limiter le nombre de faillites, ayant atteint un niveau élevé. Le projet de loi sur les faillites, qui a déchaîné les passions, n'a finalement pas été voté et "il sera très probablement modifié", suppose M. Baumann.

Cette loi comporte plusieurs volets, dont notamment une importante simplification administrative. "Pour les commerçants, les critères de qualification ont fort changé. Auparavant, ces derniers devaient connaître les produits qu'ils vendaient et on avait un peu négligé la comptabilité. Dans la nouvelle loi, les critères de qualification concernent davantage la gestion que la connaissance des produits", précise M. Baumann.Une place spécifique a été réservée aux activités d'agent immobilier, d'administrateur de biens-syndic de copropriété et au promoteur immobilier, qui doivent passer des tests d'aptitude et présenter une garantie bancaire.

La profession de comptable - qui n'avait pas besoin d'autorisation pour exercer - est désormais réglementée et celle d'expert-comptable est précisée.

Les modifications envisagées ont été inspirées par la pratique, en vue de préciser ou clarifier certaines dispositions ne permettant pas d'apporter une réponse satisfaisante à certains cas de figure - les boîtes aux lettres -, ou qui pouvaient prêter à des interprétations divergentes.

Dans l'industrie, la loi se base surtout sur l'honorabilité. Toutefois, les artisans exerçant un métier principal (menuisiers, entrepreneurs de construction, électriciens, ...) et les entrepreneurs industriels de construction doivent, soit être en possession du brevet de maîtrise, soit d'un diplôme universitaire ou d'enseignement supérieur ou une équivalence. Les artisans exerçant un métier secondaire (métiers d'arts, retoucheuses, ...) sont dispensés d'un brevet de maîtrise mais doivent prouver leur capacités par un stage ou une formation. "Par les équivalences, il y a moyen de passer outre la formation initiale. Le nombre de droits d'établissement reçu par ce biais est très élevé".

Toutefois, assure M. Baumann, tous les professionnels déjà établis qui ne remplissent pas forcément les exigences de la nouvelle loi pourront continuer à exercer sans avoir besoin de suivre une formation et passer des examens. Ils bénéficient d'un droit acquis. Quant aux comptables qui ont exercé cette profession durant au moins un an avant l'entrée en vigueur de la loi, ils recevront d'office l'autorisation d'exercer.

Par ailleurs, le code des assurances a également été modifié. Les personnes chargées de la gestion de l'entreprise, c'est-à-dire les personnes sur lesquelles repose l'autorisation, seront dorénavant affiliées comme "Indépendants", quelle que soit la forme juridique de l'entreprise, et ce afin d'éviter aux maximum les boîtes aux lettres. Ces deux lois devraient être très prochainement publiées au Mémorial.