Yves Francis (à gauche) conseille à son successeur de «rester lui-même» dans l’exercice d’une fonction délicate. (Photo: Eric Chenal / archives)

Yves Francis (à gauche) conseille à son successeur de «rester lui-même» dans l’exercice d’une fonction délicate. (Photo: Eric Chenal / archives)

Comme le veulent les règles internes aux cabinets d’audit et de conseil fonctionnant sous un partnership local, le managing partner est élu entre ses pairs. Généralement pour un mandat de quatre ans qui peut être renouvelable une fois.

Yves Francis vient de terminer son deuxième mandat ce 31 mai. Celui qui est entré chez Deloitte en 1990 (avec une parenthèse chez JP Morgan de 1997 à 2001) vient de sortir de l’actionnariat de la firme, mais ne la quitte pas tout à fait pour autant. Son agenda allégé lui permettra de donner des cours, de s’investir pour des causes charitables et d’aider Deloitte sur la thématique des personnes à haut potentiel.

«C’est la conclusion d’une aventure collective et le début d’une autre pour la firme qui continuera très bien sans moi. J’avais huit ans pour me préparer», déclare Yves Francis, lucide sur la durée forcément limitée de ce type de fonction prenante. «Sur le plan personnel, j’éprouve tout de même un peu de fierté de voir ce qui a été accompli, que nous sommes bien positionnés, que nous comptons 2.320 employés avec beaucoup de grands potentiels.»

En tout temps, il est important de donner un cap aux équipes.

Yves Francis, Deloitte

Yves Francis se souvient aussi de 2009, lorsque la gestion des conséquences de la crise sur le marché occupait l’agenda. «Nous avons choisi à ce moment d’investir plutôt que de réduire les coûts. J’ai aussi souhaité obtenir une firme bien équilibrée entre les trois métiers, l’audit, le conseil et la fiscalité. En tout temps, il est important de donner un cap aux équipes.»

Voir au-delà des frontières 

Le contexte est différent pour son successeur, John Psaila (40 ans), mais ô combien compétitif. Dans le même temps, des raisons exogènes comme l’AIFM ou le Brexit ouvrent de nouvelles perspectives.

«Je suis serein, car je trouve une firme qui va très bien, déclare le nouveau managing partner. J’ambitionne de poursuivre la courbe ascendante tout en gardant cet esprit de corps au sein de nos équipes.»

John Psaila veut aussi continuer la prospection de nouvelles missions au Luxembourg, mais aussi en dehors des frontières du pays, et ce dans les trois métiers. «Nous pouvons jouer le rôle de chef d’orchestre pour aider nos clients, qu’il s’agisse de conseil fiscal ou des aspects réglementaires.»

La technologie occupe désormais une place stratégique.

John Psaila, Deloitte 

Le mouvement d’outsourcing de processus chez certains acteurs entraîne aussi de nouvelles opportunités, en prolongeant le conseil dans l’implémentation de solutions. Un mouvement où la technologie jouera un rôle prépondérant, tant en interne que pour les services prodigués.

«La technologie était vue historiquement comme un service de support, mais elle occupe désormais une place stratégique, c’est la raison pour laquelle j’ai souhaité que notre CTO fasse partie de notre comité de direction», note John Psaila. «Notre maison doit être à la pointe, nos clients sont en train de faire ce même chemin.»

Un conseil?

Yves Francis aurait-il un conseil à prodiguer pour coordonner plus de 2.000 personnes, dont les associés et actionnaires?

«Je lui dirais de rester lui-même, car c’est une fonction qui n’est pas neutre», note Yves Francis. «Le regard des gens sur vous-même change, et le poids de vos décisions est important. Je pense du reste qu’il faut continuer à entretenir une vraie force d’équipe. Les grands joueurs peuvent gagner des matches, mais les grandes équipes gagnent des championnats.»