Avec le big data et l’intelligence artificielle, les tablettes utilisées par les lycéens pourraient permettre de fournir une évaluation en temps réel et ainsi adapter le rythme et la forme de l’enseignement à chaque élève. (Photo: Nader Ghavami)

Avec le big data et l’intelligence artificielle, les tablettes utilisées par les lycéens pourraient permettre de fournir une évaluation en temps réel et ainsi adapter le rythme et la forme de l’enseignement à chaque élève. (Photo: Nader Ghavami)

Comment imaginer les défis de l’éducation de demain sachant que plus de 60% des élèves qui étudient aujourd’hui exerceront des emplois qui n’existent pas encore? Cette question complexe, mais ô combien actuelle, a été débattue mercredi au lycée de l’Athénée, à Luxembourg-ville, dans le cadre d’une conférence sur l’impact de la numérisation sur le marché de l’emploi et la formation, organisée par la Grande Région.

«Il s’agit de réfléchir aux conséquences de la numérisation sur le contenu des programmes d’éducation, mais aussi sur la forme de l’apprentissage», a débuté le vice-recteur de l’Université du Luxembourg, Romain Martin. Les «soft skills» ou compétences relationnelles, qui sont aujourd’hui très recherchées dans le secteur privé, pourront-elles être développées au cours du cursus scolaire et universitaire? Sans aucun doute, estime l’académicien. «Mais pour enseigner ces compétences transversales, celles qui permettent de s’adapter aux changements, les formes d’apprentissage devront évoluer.»

La culture du numérique doit débuter très tôt.

Eric Krier, conseiller de direction au Service national de la jeunesse

«Flipped classroom», «peer learning»… l’éducation non conventionnelle propose déjà des modèles qui renversent les méthodes classiques d’enseignement pour permettre une interaction plus naturelle entre enseignants et étudiants. Au Luxembourg, l’initiative BeeCreative vise à multiplier les initiatives qui facilitent l’apprentissage par la pratique.

Ainsi, une vingtaine de makerspaces ont été créés dans les lycées du pays. Ces ateliers de création, ouverts aux élèves en dehors des heures de cours et dans lesquels ils ont carte blanche pour construire des appareils électroniques, connaissent un franc succès. «Nous nous sommes rendu compte que cette culture du numérique devait arriver encore plus tôt», a précisé Eric Krier, en charge de ce projet pour le compte du Service national de la jeunesse. «Du coup, nous avons lancé en septembre trois makerspaces pilotes dans des maisons relais pour les enfants de 6 à 12 ans.»

Des enseignants qui devront s’adapter

L’apparition des tablettes, comme celles qui sont aujourd’hui distribuées aux lycéens luxembourgeois, peut constituer d’autres opportunités, a encore rappelé Romain Martin. «En observant le comportement d’un apprenant grâce aux données générées par son appareil, et avec l’aide de l’intelligence artificielle, il sera possible d’obtenir une évaluation personnalisée et en temps réel et ainsi adapter le rythme et la forme de l’enseignement en fonction du niveau de chacun.»

Dans ce contexte, quel rôle devra prendre l’enseignant? «La formation pédagogique et technique des professeurs aux outils numériques est un grand défi», a fait remarquer le ministre de l’Éducation et de la Culture de la Sarre, Ulrich Commerçon. «Tous ne sont pas intéressés par les nouvelles technologies et il faudra trouver les moyens de les motiver.»

Des environnements de travail plus adaptés à l’utilisation du numérique.

Romain Martin, vice-recteur de l’Université du Luxembourg

Un constat partagé par Claude Meisch, le ministre de l’Éducation luxembourgeois: «Le Grand-Duché ne fait pas exception dans la Grande Région. Nous devons trouver assez d’enseignants spécialisés et dynamiques pour nous faire avancer dans la numérisation de notre système d’éducation.»

Et ces problématiques se posent de la même manière à l’université, rappelle Romain Martin. «Nous travaillons sur plusieurs projets pour adapter nos méthodes d’enseignement, notamment sur des environnements de travail plus adaptés à l’utilisation du numérique.» Et de conclure: «Le développement des synergies au niveau national, mais aussi, pourquoi pas, au niveau régional ou international, sera crucial.»