L’Europort Lorraine, plate-forme logistique et industrielle multimodale, possède plus de 200 hectares de foncier disponibles. (Photo : Europort)

L’Europort Lorraine, plate-forme logistique et industrielle multimodale, possède plus de 200 hectares de foncier disponibles. (Photo : Europort)

«C’est un train test qui a révélé des bugs au-delà de ce que l’on pouvait imaginer.» Le constat est signé Jean-Charles Louis, président d’Europort, lors d’une conférence de presse organisée ce lundi matin à l’Hôtel de Communauté de Yutz. 

Et le train en question provenait de Chengdu, au centre de la Chine. Parti le 13 juillet dernier en transportant 40 containers remplis de chaussures à destination de l’entreprise Chaussea, dont le siège est à Valleroy (Meurthe-et-Moselle) et le centre logistique à Ennery (Moselle), il devait arriver sur la ZAC (zone d’aménagement concerté) Europort, plate-forme multimodale de Thionville-Illange, le lundi 30 juillet dernier.

Un trajet semé d’embûches

«Il devait parcourir 12.000 kilomètres au total, en passant par la Russie, le Kazakhstan, la Pologne, ou encore l’Allemagne», ajoute Jean-Charles Louis. La fameuse «nouvelle route de la soie», également convoitée par le Luxembourg via son hub multimodal de Bettembourg.

Mais le train de marchandises a finalement été confronté à plusieurs péripéties. «Il a d’abord pris un peu de retard en Russie, et est arrivé à Duisbourg (à l’Ouest de l’Allemagne) le 29 juillet, au lieu des 26 ou 27 juillet prévus au départ.»

Pour pouvoir acheminer des wagons en traversant des frontières, les tractionnaires – propriétaires des locomotives - doivent être titulaires d’une licence et d’un certificat de sécurité pour chaque pays. Or, le biélorusse RTSB, qui réalise de nombreuses liaisons entre la Chine et l’Europe, n’en possédait pas pour poursuivre la route après Duisbourg, mais avait accepté de continuer l’acheminement de ses 20 wagons de 27 mètres de long, via un autre tractionnaire, en l’occurrence Forwardis, filiale allemande de la SNCF, jusqu’à l’Europort.

Le convoi coincé à 300 kilomètres de l’arrivée

Et c’est là que les ennuis ont réellement commencé pour le convoi lorrain. RTSB a dans le même temps «fait savoir à notre partenaire EEB (qui intervient comme organisateur de tout le trajet aller-retour, ndlr) qu’il ne pouvait pas laisser ses wagons continuer le trajet jusqu’à Thionville parce qu’ils devaient repartir pour les besoins d’un autre client», raconte Jean-Charles Louis.

La mission était alors de trouver de nouveaux wagons pour acheminer les 40 containers pour les (seulement) 300 kilomètres restants sur les 12.000 que comptait le trajet. «Les problèmes de manque de wagons sont récurrents dans le secteur de la logistique, notamment en raison du pas de révision qui leur incombe», a ajouté Jean-Charles Louis, qui a notamment été directeur transport et logistique pour ArcelorMittal.

C'est un échec, mais pas un échec rédhibitoire.

Jean-Charles Louis, président d'Europort

«La décision a été prise d’acheminer dans un premier temps 20 containers, soit l’équivalent de 10 wagons, par camions pour que le client Chaussea puisse recevoir une première moitié de sa marchandise et qu’il ne soit pas mis en danger au niveau commercial.» En parallèle, EEB avait réussi à trouver 10 wagons à Hagondange, qui devaient être révisés chez Sogeefer, et «nous nous étions résolus à choisir cette solution, bien que cela entraînait un nouveau retard et une arrivée ce lundi 13 août.» Une date qui avait été annoncée à la presse.

Tous les contacts activés, sans succès

«Sauf qu’entre-temps, Forwardis, qui possède pourtant une liaison journalière Woippy-Duisbourg, a déclaré mercredi 8 août que ‘c’était trop compliqué’ et qu’ils ne tireraient pas le train jusque Thionville, ils ont donc refusé cette option», a dévoilé Jean-Charles Louis, qui est actuellement dans l’attente d’une explication écrite de ce refus.

Tous les contacts ont alors été activés pour trouver une solution en 48 heures. «Une solution a failli être trouvée à Forbach, mais finalement, cela n’a pas marché, et nous avons décidé de rapatrier les 20 containers restants par camion, ils sont partis de Duisbourg ce lundi matin.»

Une collaboration «envisageable» avec CFL Cargo 

Pour les élus de l’Europort présents ce lundi lors de la conférence de presse, «c’est un échec, mais pas un échec rédhibitoire, c’est un projet qui se crée et, forcément, on ne peut pas réussir du premier coup. Nous allons analyser ce qui s’est passé, trouver de nouvelles solutions et bien border nos organisations», ont-ils appuyé.

Et parmi les solutions évoquées, celle de mettre en place une collaboration avec CFL Cargo a été mise sur la table. «Nous avions entamé des discussions il y a quelques mois, et nous allons les recontacter. Notre objectif est qu’un train réalise cette liaison avant la fin de l’année», poursuit Jean-Charles Louis.

«Le hub multimodal de Bettembourg n’est pas un concurrent, nous sommes un parc d’activité industriel et logistique. Sur une ligne Chine-Europe, j’espère que nous pourrons travailler ensemble, et je ne serais pas choqué si nous avions un CFL multimodal Thionville, car à Bettembourg – qui a ciblé Zhengzhou comme terminus -, ils n’ont pas de containers maritimes.»

Pour rappel, lors de l’inauguration de la plate-forme de Bettembourg-Dudelange en juillet 2017, le groupe CFL avait annoncé «l’ambition de devenir un hub logistique européen, permettant de connecter l’industrie luxembourgeoise aux principaux ports et centres économiques». Un vœu qui se réalisera peut-être dans le cadre d’une collaboration au sein de la Grande Région.

Contactés par nos soins, les CFL n'étaient pas joignables ce lundi.