Sophie Glesener: «Si les filles ne sont pas éduquées, cela veut dire mariage précoce, et donc beaucoup d’enfants qui ne seront pas éduqués à leur tour». (Photo: Jan Hanrion / Maison Moderne)

Sophie Glesener: «Si les filles ne sont pas éduquées, cela veut dire mariage précoce, et donc beaucoup d’enfants qui ne seront pas éduqués à leur tour». (Photo: Jan Hanrion / Maison Moderne)

Cette passionnée d’enfants s’est d’abord engagée bénévolement avant de progressivement se dédier professionnellement à SOS Villages d’Enfants Monde.

Madame Glesener, comment êtes-vous entrée dans le monde des ONG, et en particulier de SOS Villages d’Enfants Monde?

«J’étais toujours intéressée d’aider les enfants. Plus jeune, je m’étais engagée chez les scouts. Mais j’ai eu un véritable déclic à la naissance de mes deux enfants, il fallait que j’aide les moins chanceux.

Je me suis donc engagée dans l’association – qui était toute petite à l’époque –, tout d’abord comme bénévole. Je suis entrée au conseil d’administration et j’ai finalement été embauchée pour développer l’ONG au Luxembourg. D’abord à mi-temps, mais dans les faits, c’est vite devenu un temps complet.

Devenir directrice de l’ONG était dans vos plans de carrière?

«Pas du tout! J’avais deux enfants en bas âge à cette époque, 3 et 6 ans, et je m’étais mis d’accord avec mon mari pour que je fasse une pause de deux ans pour m’en occuper. L’opportunité de développer l’ONG était trop importante, je m’y suis évidemment investie. Mais le conseil d’administration m’a permis une grande flexibilité.

Quand j’étais à temps partiel, je n’allais que le matin au bureau, j’avais mes après-midi pour les enfants, et je participais à quelques événements les soirs. Au fur et à mesure qu’ils ont grandi, SOS Villages d’Enfants s’est également développé, et mes obligations avec.

J’ai dû développer mon management, grâce à des cours, mais je crois aussi beaucoup au ‘learning by doing’.

Sophie Glesener, directrice de l’ONG SOS Villages d’Enfants Monde Luxembourg

Vous avez suivi des formations pour endosser ce poste à responsabilité?

«Oui, évidemment, car j’étais très jeune. Au fil des années, j’ai énormément lu sur le sujet, et j’ai suivi plusieurs formations. Nous sommes passés d’une équipe de deux personnes à 14 aujourd’hui, sans compter cinq collaborateurs qui sont présents dans les pays partenaires.

Pour moi, tout était nouveau, j’ai dû développer mon management, grâce à des cours, mais je crois aussi beaucoup au ‘learning by doing’.

Est-ce que vous avez à cœur d’avoir une ONG paritaire au sein de la direction et de l’équipe?

«Nous avions 30% de femmes au conseil d’administration, c’était déjà une bonne base. Puis, nous avons fixé la limite d’âge à 72 ans, ce qui a naturellement poussé au renouvellement du board. Aujourd’hui, nous sommes à 50% de femmes. Le comité de direction est également paritaire.

Cette parité est très fructueuse, que ce soit par genre ou tranche d’âge. Nous sommes complémentaires, et cela vaut pour tous les secteurs. Les hommes sont de plus en plus nombreux à prendre le congé parental, c’est une bonne chose, car c’est une égalité des chances pour eux aussi.

Je n’ai jamais compté mes heures et j’adore le travail en équipe

Sophie Glesener, directrice de l’ONG SOS Villages d’Enfants Monde Luxembourg

SOS Villages d’Enfants Monde est une ONG qui milite pour protéger les enfants. Est-ce que les droits des femmes sont importants dans l’action de l’association également?

«Bien sûr, SOS est engagée pour les femmes avec une politique active d’autonomisation. Dans nos 450 écoles ou crèches SOS, nous essayons d’avoir une certaine parité, avec un focus sur l’éducation des filles. Nous intervenons au sein des communautés pour sensibiliser sur cette question.

Car c’est un cercle vicieux. Si les filles ne sont pas éduquées, cela veut dire mariage précoce, et donc beaucoup d’enfants qui ne seront pas éduqués à leur tour. Dans nos pays partenaires, qui sont je dirais ouverts (Guinée, Mali, Sénégal, Niger), nous aurons une nouvelle génération d’enfants qui auront de meilleures chances dans la vie.

Comment ont réagi vos enfants avec une maman qui se dévoue aux autres?

«Ma priorité est restée sur mes propres enfants, mais ils m’ont beaucoup soutenu. Je pense d’ailleurs que je leur ai transmis le virus! Je leur ai toujours donné un récit positif de mes voyages sur les projets. Ce n’était pas toujours facile, je leur expliquais que les enfants que nous aidons sont très pauvres, mais vu du Luxembourg, c’est impossible à décrire pour eux. D’ailleurs, quand j’ai visité un camp de réfugiés syriens au Liban en 2017, j’en ai pleuré.

Concrètement, comment avez-vous allié votre engagement humanitaire et votre vie privée?

«Au début, je ne travaillais que le matin, donc j’ai pu m’arranger plus facilement. Finalement, la transition s’est faite très progressivement. Je n’ai jamais compté mes heures et j’adore le travail en équipe.

J’ai eu néanmoins une aide ponctuelle à la maison, et j’ai pu compter beaucoup sur mes parents.

Dans un couple, il faut le soutien de son partenaire, son aide est primordiale et j’ai été soutenue dans ce sens. Au fil des années, alors que l’ONG s’est développée, j’ai eu de plus en plus d’événements en soirée à assurer. Il faut pouvoir jongler avec la vie de famille, mais mes enfants étaient déjà plus grands à cette époque.

Quels conseils donneriez-vous aux femmes qui voudraient se lancer?

«Il n’y a pas beaucoup de femmes dans le monde des ONG, mais je remarque une évolution positive. Ça s’améliore, et en particulier à des postes-clés. Il y a une importance de la parité.»

Le CV de Sophie Glesener en trois dates-clés:

2000 – Membre du conseil d’administration et du comité exécutif de SOS Villages d’Enfants Monde Luxembourg

2002 – Directrice de SOS Villages d’Enfants Monde Luxembourg

2012 – Prix Inspiring Woman of the Year dans la catégorie Engagement social et humanitaire

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