Denise Voss est spécialiste des fonds et de la régulation des marchés, elle s’intéresse de plus en plus à la place des femmes et à la diversité des conseils d’administration. (Photo: Marion Dessard / archives)

Denise Voss est spécialiste des fonds et de la régulation des marchés, elle s’intéresse de plus en plus à la place des femmes et à la diversité des conseils d’administration. (Photo: Marion Dessard / archives)

En plus de sa position à l’Alfi, Denise Voss est conducting officer et siège au conseil d’administration de Franklin Templeton International Services sàrl, une société de gestion qui gère aussi bien des OPCVM que des FIA au sein de l’UE et en dehors.

Madame Voss, y a-t-il un management ou un leadership féminin?

«Il y a un excellent TED Talk de Reshma Saujani, qui a fondé l’organisation ‘Girls who code’, où elle dit qu’on éduque les filles à être parfaites et les garçons à être courageux. Elle dit que nous devrions nous concentrer sur le fait de prendre des risques plutôt que d’être parfaites. Il faut lever la main, prendre la parole, prendre des risques et être prêt à échouer. Ce n’est pas quelque chose que l’on apprend aux femmes à intégrer.

Une étude de Hewlett-Packard a montré que pour une annonce d’emploi, les hommes vont envoyer une candidature même s’ils ne répondent qu’à 50 ou 60% du profil recherché, alors que les femmes répondront à 100% des critères, autrement elles ne postuleront pas. Cela crée une grosse différence puisque cela empêche les femmes de saisir des opportunités. Nous sommes dures envers nous-mêmes.

Qu’est-ce qui a fait dans votre parcours que vous êtes arrivée à des postes à responsabilité?

«Je pense que j’ai eu beaucoup de chance. En grandissant, j’ai eu des modèles féminins très forts. Ma mère était récemment divorcée, elle a dû rebondir et redevenir employable sur le marché du travail. Au fil des années, elle a fini par monter sa propre agence de publicité, ce qui est admirable. J’ai aussi eu le modèle de mon beau-père, qui était d’un grand soutien pendant les années de l’adolescence. Il m’a soutenu en me disant que je pourrai accomplir tout ce que je voulais.

Cette combinaison de modèles de femme forte et du soutien de mon beau-père a été déterminante. Ce n’est pas un problème typiquement féminin, c’est un problème de société, et il est important de le souligner. Nous avons besoin des femmes, mais aussi des hommes pour faire avancer la société.

Je n’étais pas consciente de barrages éventuels dans une carrière, mais j’ai appris à prendre des risques, à échouer, ce qui n’est pas un trait particulièrement féminin. J’ai vu ma mère échouer et se relever.

Nous avons encouragé les membres à penser à une femme pour le comité de l’Alfi lors des dernières élections.

Denise Voss, présidente de l’Alfi

Dans votre secteur, la parité aux postes de direction est-elle plus avancée au Luxembourg qu’ailleurs? Pourquoi à votre avis?

«Au cours de ma carrière, je suis devenue manager chez Coopers & Lybrand (ancêtre de PwC, ndlr) dans les cinq ans, ce qui est parfaitement normal. Il y avait pas mal de femmes managers et partners, enfin relativement beaucoup pour l’époque. Une fois au Luxembourg, j’étais sur la voie pour devenir partner, mais j’ai décidé de changer de style de vie, notamment car je voulais un enfant. Même si j’ai beaucoup apprécié le soutien de ma mentore sur place, Marie-Jeanne Chèvremont.

Aujourd’hui PwC est une bien plus grosse compagnie, à mon époque c’était plus petit et il n’y avait qu’une femme partner. Si j’étais honnête avec moi-même, je dirais que s’il y a eu quelque chose qui a changé le cours de ma carrière, ce serait la maternité. Mais je suis une optimiste et j’ai saisi une très belle opportunité.

Pour ce qui est du comité directeur de l’Alfi: il y a actuellement 5 femmes sur 24, pendant longtemps c’était juste deux... Les choses évoluent. Nous avons encouragé les membres à penser à une femme pour le comité lors des dernières élections. Quelques-uns l’ont fait, ce qui a donné comme résultat 5 femmes, ce qui est pas mal. Nous allons continuer sur cette voie, même si cela veut dire beaucoup de travail pour y parvenir.

Les femmes apprécient quand je leur explique qu’il faut se lancer et prendre des risques. Même si ce n’est pas facile. Nous allons signer la charte de la diversité en mai prochain, des collègues ont poussé pour cette signature, c’est une bonne chose.

C’est très important d’avoir un partenaire sur qui on peut compter.

Denise Voss, présidente de l’Alfi

La COO de Facebook, Sheryl Sandberg, a affirmé que le choix de son partenaire était déterminant pour sa carrière. Votre mari vous a-t-il soutenu?

«Oui, clairement, il sait se rendre accessible, être là pour notre fille, notamment quand je suis en déplacement. C’est très important d’avoir un partenaire sur qui on peut compter. Je sais qu’au Luxembourg les choses ont évolué pour permettre aux deux parents de travailler, comme les maisons relais, etc.

Je parlais récemment à une partner dans une firme d’audit, elle me disait qu’on lui posait souvent la question de la présence de nombreuses femmes à des postes importants dans son entreprise. Pour elle, c’est le fait que Luxembourg soit si accessible: les femmes – car c’est malheureusement toujours elles qu’on appelle – peuvent aller rapidement chercher leur enfant malade et retourner travailler, Luxembourg est petit et cela a ses avantages.

J’ai aussi ce luxe de pouvoir voir ma famille après mon travail et avant de sortir le soir. Mais je fais consciemment le choix d’éviter de sortir le soir, pour garantir un équilibre entre travail et vie privée, ce qui n’est pas toujours possible.»

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