Pour Ainhoa Achutegui, la place des mères qui travaillent est plus facile à vivre au Luxembourg qu’ailleurs. (Photo: neimënster)

Pour Ainhoa Achutegui, la place des mères qui travaillent est plus facile à vivre au Luxembourg qu’ailleurs. (Photo: neimënster)

Comme dans d’autres secteurs d’activité, le domaine de la culture se féminise, y compris dans la direction de plusieurs établissements publics, dans les conseils d’administration de certaines asbl ou à la tête d’institutions culturelles. Directrice de Neimënster après être passée notamment par le Cape, Ainhoa Achutegui a toujours revendiqué un féminisme militant et mis en avant les femmes dans ses choix de programmation.

Madame Achutegui, être une femme a-t-il été un obstacle à votre ascension professionnelle?

«Il a bien sûr fallu que j’ose contre vents et marées, que je prenne ma place, la revendique, l’exige, l’impose. Mais j’ai toujours été soutenue par des personnes qui ont cru en moi. Et je suppose que la chance a aussi été de mon côté: j’ai été probablement à la bonne place au bon moment!

Être une mère a-t-il été un obstacle à votre ascension professionnelle?

«Au Luxembourg, les mères sont beaucoup plus soutenues que dans d’autres pays européens. Ma même carrière professionnelle en Autriche, où j’ai grandi, aurait été beaucoup plus difficile à construire, par exemple. À cela s’ajoute que j’ai l’immense privilège de pouvoir payer une nounou qui nous accompagne depuis plusieurs années, elle est un immense appui. Et de par mon travail, je suis assez flexible dans mes horaires. Mais la flexibilité que j’ai et le fait de pouvoir employer une personne pour mon fils ne sont pas possibles pour la grande majorité des femmes au pays. Je suis consciente que je suis très privilégiée.

Avez-vous bénéficié du soutien et des conseils d’un mentor?

«Oui, parfois sans qu’ils ou elles le sachent. Ils et elles ont marqué différentes étapes de mon chemin, d’autres continueront à le marquer. Et je suis actuellement dans un âge où j’agis comme mentor pour de jeunes personnes que je connais, surtout des jeunes femmes que j’apprécie et je soutiens. La sororité est une valeur importante pour moi.

J’espère profondément pouvoir inspirer des jeunes femmes à oser, tenter et se surpasser.

Ainhoa Achutegui, directrice de Neimënster

Y a-t-il un management féminin?

«Oui, probablement. Dans le sens où nous sommes très marquées et conditionnées par notre éducation, notre société et que nous sommes enfermées dans nos structures, nos stéréotypes, nos normes. Les femmes, en général, de par leur éducation, ont souvent tendance à ne pas déléguer ou à trop accepter le travail des autres ou à travailler beaucoup plus que leurs collègues. Il faut en être conscient et trouver le juste milieu entre un management que les gens aiment bien appeler ‘masculin’ (autoritaire, dur) et celui appelé ‘féminin’ (doux, collaboratif).

Y a-t-il un leadership féminin?

«Oui, bien sûr. Une femme peut autant motiver et inspirer qu’un homme et s’affirmer ainsi comme leader. J’espère profondément pouvoir inspirer des jeunes femmes à oser, tenter et se surpasser elles-mêmes.

Dans votre secteur, la parité aux postes de direction est-elle plus avancée au Luxembourg qu’ailleurs?

«La parité dans la culture n’est pas donnée, mais nous pouvons voir toujours plus de femmes à des postes-clés. Je suis vraiment très heureuse de la nomination de Carole Lorang au Théâtre d’Esch, par exemple, la commune d’Esch a montré de l’intelligence et de la détermination.

Quelle mesure concrète faudrait-il mettre en place pour favoriser l’accès des femmes aux fonctions dirigeantes en entreprise?

«Nous avons besoin de quotas et une ouverture d’esprit des décideurs. S’il n’y a pas de conscientisation que la non-diversité au niveau managérial est un vrai fléau, les personnes qui continueront à accéder aux postes-clés seront toujours des hommes, grâce à leurs réseaux, leurs clubs, etc. Un système de quotas signifie qu’à même niveau de compétences entre une femme et un homme, la femme sera prise, et par la force des choses, ceci mènera à plus de diversité au niveau managérial. Être contre les quotas veut dire que nous acceptons l’idée qu’à même niveau de compétences entre deux personnes de sexes opposés, l’homme sera toujours pris. Comme ça a d’ailleurs toujours été le cas.

Jugez-vous nécessaire que l’on consacre une journée aux droits des femmes?

«Oui, cette journée est encore nécessaire. La plateforme JIF (Journée internationale des droits des femmes) a présenté ses revendications le 27 février et je peux vous dire qu’il y a encore beaucoup à faire. Ici, au Luxembourg, il est facile de tomber dans la précarité en tant que femme, par exemple, surtout en situation de monoparentalité.»

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