Pour son premier discours sur l'état de l'Union, Jean-Claude Juncker n'a «pas fait un poème à la gloire de l'UE», mais a évoqué «les réalités auxquelles nous sommes confrontés». (Photo: Parlement européen)

Pour son premier discours sur l'état de l'Union, Jean-Claude Juncker n'a «pas fait un poème à la gloire de l'UE», mais a évoqué «les réalités auxquelles nous sommes confrontés». (Photo: Parlement européen)

Réaliste. La teneur du premier discours sur l’état de l’Union de Jean-Claude Juncker en tant que président de la Commission européenne n’a pas versé dans l’angélisme ou le satisfecit. Dans un monologue de près de 1h20 – interrompu à plusieurs reprises par plusieurs eurosceptiques –, le Luxembourgeois a donc fait état d’une situation générale «grave». Et qui nécessite «une action immédiate».

Parmi les sujets hautement sensibles, la crise «sans précédent» des migrants a occupé une place prépondérante dans le discours. «En quelques mois, 500.000 personnes venues de Syrie, de Libye ou d’Érythrée sont arrivées au sein de l’UE», assure le président de la Commission. Un chiffre «éloquent, voire effrayant pour certains» qui «ne doit pas faire peur mais mener à une action concertée, courageuse et forte». Concrètement, le chef de l’exécutif européen en a appelé à la solidarité entre États membres et a annoncé la mise en place d’«un deuxième mécanisme d’urgence obligatoire». Objectif: répartir «160.000 réfugiés dès la semaine prochaine» au sein des différents États de l’UE. Ce nouveau plan prévoit l'accueil au Luxembourg de 440 réfugiés, 4.564 en Belgique, 24.031 en France et 31.443 en Allemagne. Ces derniers viennent de Hongrie, Grèce et Italie. 

Estimant qu’il n’y avait «pas d’alternative», Jean-Claude Juncker a rappelé que «l’Europe avait les moyens d’aider ceux qui fuient», cet afflux ne représente «que 0,11%» de la population de l’UE. Pour l’ancien Premier ministre luxembourgeois, l’accueil de ces réfugiés «est une obligation, car nous parlons ici d’êtres humains». Il a fustigé au passage l’attitude de certains États face à cette crise humanitaire. Il a également fait part de sa volonté de réformer les législations liées à l’asile, afin que les migrants puissent travailler dans leur pays d’accueil. «Car le fait de gagner sa vie est une question de dignité.» Sans oublier de plaider pour une consolidation des frontières extérieures de l’UE.

Outre la nécessité de réformer Frontex – l’agence européenne en charge de la surveillance des frontières extérieures de l’Union –, Jean-Claude Juncker a plaidé également pour un renforcement de la lutte contre les passeurs. Mais aussi et surtout pour un changement de mentalité. «La question de la migration doit cesser d’être perçue comme un problème, mais plutôt comme une solution», a-t-il insisté, rappelant pour l’UE «le besoin de nouveaux talents venus de tous les horizons».

Le changement climatique pourrait être à l'origine d'une nouvelle vague d'immigrés

Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne

Concernant le dossier grec, le président de la Commission s’est défendu face aux critiques émises à son encontre quant à ses déclarations sur la possibilité d’un Grexit. Et a mis en garde les dirigeants grecs. «Si cette fois-ci les règles ne sont pas respectées, la réaction de l’UE et des dirigeants de la zone euro sera différente.» Une allusion à la possibilité de ne pas verser la totalité du troisième plan d’aide, d’un montant global de 35 milliards d’euros. Une aide financière «qui n’est pas un don généreux aux Grecs».

Enfin, à la veille de la conférence de Paris sur le changement climatique, l’UE se doit «de déployer des efforts très importants» pour apporter des solutions à une situation qui pourrait «être à l’origine d’une nouvelle vague d’immigrés». Désireux de trouver «un accord ambitieux» qui permettra à l’UE «de servir d’exemple», Jean-Claude Juncker ne se dit cependant pas prêt «à signer à n’importe quel prix». Sous-entendu, les autres grandes puissances comme les États-Unis et la Chine doivent aussi s’engager à respecter des normes environnementales pour leurs industries.

«Tout n’est pas bon au sein de l’UE, nous ne vivons pas dans le meilleur des mondes», a conclu le Luxembourgeois, rappelant que «le monde serait meilleur si nous étions meilleurs». Mais bien que «connaissant les faiblesses» des structures européennes, il souhaite que «l’UE ne baisse pas les bras» et «continue son chemin».