Si des études scientifiques doivent être menées concernant la plus-value d’une troisième dose pour l’ensemble de la population, «la priorité reste de vacciner l’ensemble des personnes vulnérables ou à haut risque, but qui n’est pas encore atteint ni au Luxembourg ni dans le reste du monde», rappelle le CSMI. (Photo: SIP/Jean-Christophe Verhaegen)

Si des études scientifiques doivent être menées concernant la plus-value d’une troisième dose pour l’ensemble de la population, «la priorité reste de vacciner l’ensemble des personnes vulnérables ou à haut risque, but qui n’est pas encore atteint ni au Luxembourg ni dans le reste du monde», rappelle le CSMI. (Photo: SIP/Jean-Christophe Verhaegen)

Si la généralisation d’une troisième dose de vaccin nourrit le débat, elle n’apparaît pas comme une priorité. La couverture vaccinale des plus vulnérables n’est pas encore pleinement satisfaisante. Et les études scientifiques prouvant les avantages d’une troisième dose manquent encore.

La présidente du Conseil supérieur des maladies infectieuses (CSMI), Thérèse Staub, a laissé entendre qu’une généralisation d’une troisième dose à toute la population pourrait être envisageable, en partie d’ici la fin de l’année. Une déclaration qui intervient moins d’une semaine après – en plus des personnes immunodéprimées.

Mais celle-ci reste à relativiser: un avis publié le 7 septembre dernier par ce même CSMI que Mme Staub préside constatait qu’«il n’y a pas d’argument scientifique probant pour recommander l’administration d’une troisième dose chez des personnes non immunodéprimées dont le système immunitaire permet de bien répondre à la vaccination».

Manque de preuves scientifiques

De fait, la protection conférée par la vaccination reste efficace sur le long terme, explique le CSMI dans son avis. Différentes raisons l’expliquent: si la présence des anticorps diminue dans le sang, même un taux faible permet de protéger contre les formes graves de la maladie. Et de celle conférée par les anticorps. «Les tests sérologiques de dosage des anticorps ne reflètent pas la richesse et la durabilité de la mémoire immunitaire et donc de la protection contre les infections cliniquement significatives», note ainsi le CSMI.

Chez les personnes âgées ou immunodéprimées, le système immunitaire fonctionnant moins bien, la troisième dose a démontré une réelle efficacité. Mais, pour la population en général, des études supplémentaires sont nécessaires. «L’administration d’une troisième dose de vaccin a encore été peu étudiée», reconnaît le CSMI.

D’où la reculade, aux États-Unis, ces derniers jours. L’administration du président américain Joe Biden avait annoncé en août le lancement dès le 20 septembre d’une campagne de troisième dose pour tous les adultes américains. Ce qui n’a pas eu l’agrément de l’Agence américaine des médicaments (FDA): elle s’est récemment prononcée contre, estimant qu’un tel rappel ne s’avère nécessaire que pour les plus de 65 ans.

Inégalités vaccinales

À noter que l’Agence européenne des médicaments (EMA) n’a pas non plus autorisé la généralisation d’une telle troisième dose. À l’instar de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui s’est même clairement prononcée contre de telles campagnes de rappel. «Le fossé entre les nantis et les démunis ne fera que s’élargir si les fabricants et les dirigeants donnent la priorité aux rappels plutôt qu’à l’approvisionnement des pays à revenu faible ou intermédiaire», avait ainsi déclaré en août le directeur de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus.

Une stratégie de rappel généralisée qui, en plus de laisser le nombre de victimes s’accroître dans les pays pauvres, risquerait de se retourner, à terme, contre les pays riches. «L’inégalité stupéfiante et le retard important dans les expéditions de vaccins menacent de transformer les zones d’Afrique à faible taux de vaccination en terrains de reproduction pour les variants résistants aux vaccins», a averti le 16 septembre la directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique, Matshidiso Moeti. «Cela pourrait finir par renvoyer le monde entier à la case départ.»

Priorité aux vulnérables

Avis derrière lequel se range d’ailleurs le CSMI: «La priorité reste de vacciner l’ensemble des personnes vulnérables ou à haut risque, but qui n’est pas encore atteint ni au Luxembourg ni dans le reste du monde.» Au Luxembourg, 72,9% des plus de 18 ans sont pleinement vaccinés (62% de la population totale), selon le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC). Pour les plus de 80 ans, ce taux monte à 85,4%. Or, pour ces derniers, ce taux devrait être de 100%, selon le CSMI, «puisque ces personnes sont toutes vulnérables par leur âge et que la vaccination est la meilleure protection individuelle».

Contacté par Paperjam, le ministère de la Santé déclare que la généralisation d’une troisième dose n’est en tout cas «pas une priorité» à l’heure actuelle.