En 2018, la progression du nombre de colis a été de 30%. (Photo: Phaedra Brody / Archives)

En 2018, la progression du nombre de colis a été de 30%. (Photo: Phaedra Brody / Archives)

Malgré la chute du courrier, l’avenir des facteurs n’est pas condamné au Luxembourg. Leurs missions sont en pleine évolution, notamment grâce à l’explosion des colis.

Post Luxembourg compte dans ses rangs 465 facteurs. Une mini-armée qui permet d’assurer les 357 tournées quotidiennes programmées dans tout le pays. Mais cette troupe bien rodée craint aussi de voir fondre ses effectifs depuis que les e-mails et SMS réduisent les lettres à peau de chagrin.

Mais la volonté du groupe est bien de maintenir le niveau d’emploi parmi les facteurs. «Ce sont des gens qui nous représentent tous les jours et qui préservent le lien social, déclarent , directrice générale adjointe de Post Luxem­bourg, et Angelo Piras, chef du département Opérations distribution & Tri colis. Nous voulons les garder et, pour y parvenir, nous devons trouver ensemble la voie la plus judicieuse.»

Car les chiffres sont clairs: depuis 2013, le courrier est en régression constante, même si au cours de l’exercice 2018-2019, la perte n’a été que de 2% (131 millions d’envois). Un chiffre que Mme Stahl explique par différents événements qui ont gonflé de manière exceptionnelle le volume de lettres envoyées: les élections législatives d’octobre, l’entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données (RGPD) – qui a contraint banques et compagnies d’assurances à faire passer le message auprès de leurs clients – et la directive Mifid II – qui a aussi obligé les acteurs financiers à communiquer. Par contre, au cours de l’exercice précédent, la glissade avait été de 5% et, au cours des prochaines années, Post envisage une érosion moyenne de 5% à 10%.

Réagir rapidement

«Les stratégies de digitalisation des entreprises peuvent avoir des impacts rapides sur notre activité», analysent les deux responsables de Post Group. Ils citent en exemple la proposition faite par le gouvernement, en janvier 2018, à tous les fonctionnaires du pays de leur envoyer les fiches de paie mensuelles par courrier électronique, ce qui représente un enjeu de 500.000 unités sur l’année.

«Face à ces différents constats, notre choix a été de trouver des solutions rapidement plutôt que d’attendre que le marché s’effondre, comme cela s’est passé dans d’autres pays», explique Hjoerdis Stahl. Dès 2016, la poste luxembourgeoise a donc renforcé la mission de ses ambassadeurs de proximité en leur confiant des tâches qui font d’eux de véritables bureaux de poste ambulants. En plus de l’acheminement du courrier cinq jours par semaine – service universel oblige! –, ils ont reçu la responsabilité de vendre des timbres, de réceptionner des recommandés et de régler des demandes de transfert de courrier.

«À l’étranger, certains services postaux ont voulu faire du facteur un acteur social de proximité qui vérifie, par exemple, si les personnes âgées n’ont besoin de rien. D’autres ont eu l’idée de lui confier des tâches administratives telles que le relevé de compteurs électriques ou d’eau. Ce n’est pas le choix que nous avons fait», commentent Hjoerdis Stahl et Angelo Piras. Pour contrer la chute inéluctable du courrier, Post Luxembourg mise en priorité sur l’acheminement des colis. En 2016, lors de l’extension de leurs fonctions, on a confié aux facteurs la distribution des paquets de moins de 3 cm d’épaisseur. L’an dernier, avec l’essor des envois de colis, la taille a été augmentée au format boîte à chaussures.

La révolution de l’e-commerce

«Les facteurs sont demandeurs, ils ont compris que leur avenir passait par le colis», pointe Angelo Piras. Les chiffres sont en tout cas éloquents. En 2018, la progression du créneau a été de 30%, et les projections établies envisagent le même niveau de croissance au cours des prochaines années. D’ici 2023, la poste devra donc être capable d’absorber un flux annuel de 9 millions de paquets.

«L’e-commerce a fortement progressé au cours des trois dernières années au Luxembourg, mais le potentiel est encore énorme», confirme Madame Stahl, qui a déjà mené la transformation de la branche courrier, notamment au niveau du centre de tri, pour se préparer à l’explosion du nombre de colis. Mais au niveau de la distribution, il ne s’agit pas vraiment d’un nouveau métier, et les 465 facteurs du pays peuvent facilement assurer cette nouvelle fonction.

Tout n’est que question de taille et de volume pour définir jusqu’où ils pourront aller dans les livraisons. En 2018, un test grandeur nature a été mené dans le secteur de Fischbach, prévoyant la prise en charge de tous les colis par les facteurs. Depuis, Post envisage d’élargir les responsabilités du réseau tout en distinguant ceux qui travaillent en ville, dans des zones très denses en colis, ou dans des zones rurales. Certaines tournées seront réservées aux envois volumineux, d’autres seront mixtes.

«Le métier de facteur n’est donc pas en danger chez Post Lux­em­bourg, rassure Hjoerdis Stahl. À l’avenir, le colis deviendra notre produit phare. Main­tenir notre réseau tel qu’il est aujourd’hui nous permettra donc d’assurer toutes les tournées de livraison de paquets, avec un personnel déjà correctement formé.»