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Alors que le départ du Tour de France avait constitué  une opération de promotion d'envergure pour l'image du Luxembourg, le départ des déboutés du droit d'asile risque  de se transformer en camouflet des droits de l'homme dont serait responsable le gouvernement grand-ducal.

L'envoi de centaines de lettres à tort et à travers, faussement datées, s'apparentant davantage à un ukase qu'à une information destinée à des familles en état d'insécurité quant à leur avenir, semble avoir été fait avec une telle conviction que les ministres -auteurs n'ont même pas osé signer!

Or nous voilà sur le point de voir le gouvernement luxembourgeois risquer de violer la Convention Européenne des Droits de l'Homme selon laquelle "les expulsions collectives d'étrangers sont interdites". Une centaine de concernés vont déposer un recours contre cette décision d' exode forcé et de masse.

De très nombreuses personnes nous ont contactés ces derniers jours et semaines, tant de simples citoyens que des chefs d'entreprise pour rendre attentif sur le non - sens du rapatriement massif de forces de travail dont par ailleurs ils ont un besoin bien cruel. Le comité de conjoncture réuni le 31 juillet  a identifié 1.107 offres d'emploi non satisfaites. Des négociations sont en cours pour recruter de la main d'oeuvre en Pologne, Hongrie et Tchéquie pour les secteurs de l'artisanat et de l'hôtellerie notamment. Nombreux sont les demandeurs d'asile qui d'ores et déjà ont des perspectives très concrètes d'un emploi.

Alors que les délais pour la régularisation des sans papiers avaient été choisis pour exclure la quasi totalité des ressortissants (musulmans) du Sandjak, le gouvernement luxembourgeois s'est rendu compte de la situation économique extrêmement précaire du Monténégro. Il y a lieu de relever les efforts de notre coopération tant gouvernementale que privée pour créer des perspectives au Monténégro. Il est utile de citer ici le rapport que le gouvernement luxembourgeois a fait faire par l'Organisation Internationale des Migrations en 2000.

C'est ainsi que les experts de l'OIM étaient on ne peut plus clair: si l'on veut inciter des personnes à retourner il n'y a pas que l'absence de perspectives économiques qui les feront hésiter, mais encore et surtout un niveau d'infrastructures scolaires et hospitalières auxquels ils ont pu s'habituer au Luxembourg et qui n'est guère à la hauteur là - bas. OIM incitait le gouvernement luxembourgeois à investir dans de pareilles structures là - bas et, en attendant, à autoriser par exemple un aller /retour vers Luxembourg pour se faire soigner en cas de besoin à ceux qui voulaient retourner volontairement! Ces constats faits en 2000 ont encore gagné en importance, puisque  les concernés ont pu apprécier ces mêmes structures scolaires et hospitalières au Grand Duché  pendant 2 années supplémentaires encore.

Nous constatons que les hésitations de nombreuses personnes ne peuvent être surmontées par le seul pécule d'argent qui leur est proposé.

Alors que des voix s'articulent dans la société sur le non ? sens économique de cette opération coûteuse de retours forcés, une proposition structurée d'une douzaine d'associations humanitaires au sujet des retours n'a même pas méritée un accusé de réception de la part du gouvernement. Par ailleurs l'accord de réadmission avec la Yougoslavie prendra ses effets, avant même d'être ratifié par le parlement!

La raison d'Etat écrasera-t-elle toute raison économique et humanitaire?