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Le Conseil Interrégional des Chambres des Métiers Saar-Lor-Lux (CICM) représentant les intérêts socio-économiques de dix Chambres des Métiers de la Grande Région , interpelle les représentants politiques de prendre en considération les trois priorités suivantes, lors du prochain Sommet de la Grande Région, qui se tiendra en Lorraine en janvier 2005.

1. Préparer la Grande Région aux objectifs de l'agenda de Lisbonne

Selon la formulation de l'agenda de Lisbonne, l'Union Européenne devra, à l'horizon 2010, "devenir l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale, dans le respect de l'environnement".

La stratégie de Lisbonne affiche clairement les objectifs prioritaires: la croissance et le plein emploi qui permettra de maintenir voire de déve-lopper la cohésion sociale.

Le levier pour y arriver sera un renforcement de l'attractivité socio-économique et partant de la compétitivité des zones économiques constitutives de la GR, à laquelle il doit être recouru à l'aide de toute une panoplie d'instruments, dont par exemple un cadre légal et réglementaire favorisant l'esprit d'initiative ou des infrastructures performantes au service de l'économie et des citoyens.

Toutefois, la croissance et le plein emploi ne sauraient réellement être at-teints que si la cohésion sociale est maintenue et surtout développée.

Cette approche présuppose un consensus large autour d'objectifs politiques clairs et surtout une volonté de la part de tous les acteurs, y compris les partenaires sociaux et en premier lieu les autorités régionales, à contribuer activement à la réalisation de ces objectifs.

En contrepartie le CICM recommande aux chefs des exécutifs régionaux d'opter à l'avenir pour une plus grande transparence en matière de po-litique interrégionale et surtout une meilleure visibilité des priorités de l'agenda politique du Sommet de la GR.

2. Critiques à l'encontre de la proposition de directive communautaire " services " dans le marché intérieur

La proposition de directive relative aux services dans le marché intérieur du Parlement Européen et du Conseil s'inscrit dans la logique du proces-sus de Lisbonne. A cet effet, elle a pour objectif déclaré de rendre plus performant le marché intérieur des services en éliminant les restrictions respectivement barrières existantes pour l'exercice d'activités transfron-talières de services.

Cette proposition de directive, nommée "directive Bolkestein", entend réaliser cet objectif en instituant un cadre juridique qui se veut dynamique et moderne tant au niveau de la liberté d'établissement des entre-prises, qu'au niveau de la libre prestation de services à proprement par-ler. Le cadre juridique est à double détente en introduisant d'une part le principe du pays d'origine et d'autre part en prévoyant des mesures d'harmonisation dans certains domaines. En complément, la proposition de directive préconise le recours à des codes de conduites européens.

Le CICM, tout en souscrivant à l'objectif poursuivi par la proposition de directive, se doit d'exprimer ses réserves par rapport à certains moyens mis en œuvre pour l'atteindre.

Ainsi, le CICM considère notamment :
· que le principe du pays d'origine est loin d'être l'outil adapté pour simplifier les prestations de services et parfaire le marché intérieur, en raison des nombreux conséquents susceptibles d'en découler,
· que le mécanisme de contrôle basé sur l'assistance et la coopération mutuelle entre autorités d'Etats membres est intéressant en théorie, mais risque sérieusement d'être inefficace en pratique,
· que les dérogations au principe du pays d'origine en matière de qua-lification professionnelle et de détachement des travailleurs doivent être totales, et non pas, comme cela semble être le cas, uniquement partielles.

La question sous-jacente que pose cette proposition de directive est de taille : voulons-nous une Europe ayant des standards techniques commerciaux et sociaux élevés ou au contraire une Europe à bas standard ? Le CICM se prononce clairement pour la première Europe, qui, à ses yeux, est sérieusement mise en danger avec l'application du principe du pays d'origine.

L'application générale de ce principe ne va en effet pas manquer de renforcer la discrimination des entreprises d'une région vis-à-vis des entreprises prestataires de service, surtout en provenance de pays qui se caractérisent par des législations " plus souples " en matière d'établissement et du droit du travail. Comme cette situation ne peut à la longue logiquement pas être maintenue, le résultat en sera plus que probablement un nivellement vers le bas des différents standards.

Le CICM invite les autorités nationales et régionales d'insister auprès de la Commission européenne de réaliser une "étude d'impact" ("business impact assessment") de la proposition de directive, d'après les règles communément établies au niveau communautaire, afin d'évaluer plus particulièrement l'impact de la "directive Bolkestein" sur les PME.

Finalement, le CICM se rallie aux critiques énoncées par certaines institutions européennes, dont l'UEAPME (Union Européenne de l'Artisanat et des PME) et le Comité économique et social de l'UE ainsi que des organisations nationales, notamment le ZDH (Zentralverband des Deutschen Handwerks), ainsi que la Chambre des Métiers du Grand-Duché de Luxembourg.

En l'absence de modifications substantielles, le CICM ne peut pas se déclarer d'accord avec la proposition de directive.

3. Prendre en considération les intérêts des PME, et notamment celles de l'Artisanat, lors de la définition des futures politiques économiques au niveau de la Grande Région

Le CICM regrette vivement que, malgré les déclarations des chefs des exécutifs régionaux de transposer les décisions prises par le 6ème Sommet de la Grande Région à Mondorf en 2001, les mesures relatives à "la promotion d'une culture d'entreprise et d'une politique concertée pour les PME" ne figurent plus à l'ordre du jour politique.

Le CICM revendique dès lors à ce que la prochaine présidence de la GR, sous la responsabilité de la "Rhénanie-Palatinat", va en 2005-2006 à nouveau mettre à l'ordre du jour le thème d'une "politique PME concertée", en tant que partie intégrante d'une politique plus globale de promotion économique.

Par ailleurs, le CICM suit avec beaucoup d'intérêt les discussions actuelles portant sur une nouvelle architecture de la Grande Région. Une institutionnalisation du Sommet de la Grande Région est indispensable, étant donné son rôle en tant qu'organe politique central de la coopération transfrontalière et interrégionale. Ainsi le Sommet devra plus que jamais donner les impulsions nécessaires au développement de la Grande Région.

Finalement, le CICM approuve l'orientation décidée au sein du CES GR de proposer la mise en place d'un dispositif pérenne d'indicateurs socio-économiques permettant de conduire un examen de la situation économique et sociale de la Grande Région. La prise en compte d'indicateurs spécifiques relatifs à l'Artisanat s'impose dans ce contexte.