Arnaud Eubelen est l’artiste invité cette année par le Casino Luxembourg à l’occasion de Luxembourg Art Week. (Photo: Maison Moderne)

Arnaud Eubelen est l’artiste invité cette année par le Casino Luxembourg à l’occasion de Luxembourg Art Week. (Photo: Maison Moderne)

Le Casino Luxembourg invite l’artiste belge Arnaud Eubelen à réaliser une installation qui interroge la monstration de l’art et le regard du visiteur. Prévue initialement dans le cadre de Luxembourg Art Week, elle trouve une nouvelle destination dans un commerce inoccupé du centre-ville.

Depuis sa création, Luxembourg Art Week propose au Casino Luxembourg d’investir l’espace à l’entrée de la foire pour y présenter un projet artistique. Pour cette édition 2020, le Casino Luxembourg avait choisi de faire découvrir le travail d’Arnaud Eubelen, designer industriel de formation qui réalise un travail entre design et arts plastiques, floutant volontairement les frontières. Mais, contraintes sanitaires obligent, la foire ne peut se tenir comme initialement prévue dans la halle Victor Hugo, remettant en question la présentation de l’installation d’Eubelen. Qu’à cela ne tienne, le Casino Luxembourg ne baisse pas les bras et trouve un nouvel espace largement visible de tous, un commerce inoccupé du centre-ville situé à l’angle de la rue Notre-Dame et de la rue Philippe II, pour y présenter l’installation du 18 au 22 novembre, avant le second opus prévu du 19 décembre au 21 février dans les salles du centre d’art.

«Je suis parti d’une contrainte inhérente au lieu d’exposition initial», explique Arnaud Eubelen au sujet de son installation «No Man’s Land». «L’espace qui nous était attribué dans la halle ne dispose que de peu de lumière naturelle. Or, il se trouve que je suis également dans cette situation dans mon atelier.

Je me suis donc intéressé à cette situation depuis quelque temps et ai commencé à élaborer des installations faites à partir de miroirs qui reflètent intensément la lumière naturelle. Puis, je me suis penché sur l’observation de sources hyper lumineuses, d’objets tels que des phares ou des lampadaires d’aires d’autoroute», précise l’artiste. «Par ailleurs, je travaille volontiers des matériaux de construction récupérés dans mon environnement ou des objets préfabriqués qu’on peut acheter dans des magasins de bricolage.»

L’artiste a observé les lampadaires d’aires d’autoroute comme source d’inspiration pour sa nouvelle installation. (Photo: Maison Moderne)

L’artiste a observé les lampadaires d’aires d’autoroute comme source d’inspiration pour sa nouvelle installation. (Photo: Maison Moderne)

Aussi, Arnaud Eubelen met en place un poteau sur lequel sont branchés des spots d’une très haute intensité lumineuse.

Une fois allumée, impossible pour les visiteurs de regarder directement l’œuvre sans plisser les yeux ou se protéger le regard. «On trouve ce type d’éclairage très fort et intense sur les aires d’autoroute ou dans les prisons. Ce sont des lumières qui sont faites pour que toutes les personnes présentes sur le site soient vues. C’est un éclairage généralement utilisé pour opérer une surveillance ou assurer la sécurité. Il y a indéniablement un caractère autoritaire dans cet objet.»

Avec cette œuvre, l’artiste, dans une démarche provocatrice, donne à voir une installation difficile à regarder. Il questionne la perception de l’art, sa visibilité, la violence qui peut en découler, mais aussi sa réception.

Afin de permettre au public de découvrir son travail sans être ébloui, Arnaud Eubelen met en place un système de paravent faisant office de filtre, derrière lequel les visiteurs peuvent se placer pour regarder l’œuvre. «Pour voir l’œuvre dans toute sa puissance, il faut se placer derrière cette protection, sinon, vous êtes aveuglé», explique l’artiste. Une œuvre qui ne peut donc pas être réellement vue sans filtre.

Des installations qui interrogent

À travers ces installations proposées à l’occasion de Luxembourg Art Week, le Casino Luxembourg fait découvrir aux visiteurs de la foire le travail d’artistes dont les interventions questionnent la monstration de l’art dans un contexte commercial. «Les enjeux du Casino Luxembourg, qui est un centre d’art à but non lucratif, sont très éloignés de ceux d’une foire d’art contemporain», explique Kevin Muhlen, directeur du Casino Luxembourg. «Nous ne sommes pas du tout dans les mêmes considérations. Notre mission est d’accompagner les artistes dans leurs expérimentations, dans leur expérience de l’exposition. C’est pourquoi nous avons choisi de faire des propositions artistiques qui prennent le contrepoint de ce qui pourrait attirer le collectionneur ou soutenir le prestige d’une galerie. En 2019, par exemple, Daniel Wagener interrogeait le dispositif de présentation et d’exposition qui est mis en place dans une foire.  Cette année, c’est la visibilité même de l’œuvre qui est interrogée.»

Le choix d’exposer cette œuvre dans une vitrine d’un commerce s’inscrit également dans la continuité du travail que mène le Casino dans l’espace public. Régulièrement, le centre d’art y organise des interventions d’artistes qui interpellent les passants, questionnent la place de l’art dans nos rues et notre quotidien.

Afin de poursuivre la réflexion avec ce jeune artiste, un second volet est programmé après la foire dans les salles du rez-de-chaussée du centre d’art.

«No Man’s Land», du 18 au 22 novembre, pop-up exposition au coin de la rue Notre-Dame et de la rue Philippe II à Luxembourg.

«Unified Glare Rating», du 12 décembre au 21 janvier, au Casino Luxembourg.

Cet article a été rédigé pour le supplément «Luxembourg Art Week» de l’édition magazine de  qui est parue le 28 octobre 2020 et mis à jour suite aux mesures sanitaires prises dans le cadre de la pandémie de Covid-19.

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