Mauro Colagreco, chef du Mirazur triplement étoilé au guide Michelin 2019. (Photo: Sushi Shop)

Mauro Colagreco, chef du Mirazur triplement étoilé au guide Michelin 2019. (Photo: Sushi Shop)

L’enseigne Sushi Shop persiste et signe en matière de collaborations prestigieuses avec Mauro Colagreco, chef du très en vue Mirazur à Menton et tout juste triplement étoilé au Michelin. Paperjam l’a interrogé sur ce projet audacieux.

Chef Colagreco, comment est née l’opportunité de ce projet commun avec Sushi Shop? Mauro Colagreco. – «Ce sont eux qui m’ont approché en premier lieu. Je connaissais la marque de nom, mais je ne savais pas vraiment ce qu’ils faisaient, ni comment. Je me suis renseigné et j’ai vu la liste de collaborations très intéressantes qu’ils avaient réalisées ces dernières années et j’ai donc décidé d’y réfléchir, d’autant plus que je suis très friand de culture japonaise. Cela a pris du temps, des mois de préparation même, nous sommes allés voir leurs lieux de production, leurs approvisionnements en poisson, les pratiques de pêche et d’élevage employées...

Quel a été l’argument déclencheur pour que vous acceptiez d’associer votre image à une marque parfois considérée péjorativement comme une simple chaîne? «Nous avons pu constater le sérieux des équipes et du processus tout simplement. Il s’est également trouvé que leurs ateliers en Sologne se trouvent dans les mêmes infrastructures que celles qui servent à élaborer ma gamme de plats diététiques Kitchendiet, dont la qualité de production est, pour moi, primordiale. À partir de ces longues observations et de la volonté de parler à un public plus large, j’ai décidé d’accepter la collaboration.

Sushi Shop s’est adjoint les services de grands noms, tantôt «rock’n’roll» comme Lenny Kravitz, tantôt synonymes d’excellence artisanale française avec la chef Anne-Sophie Pic. Où vous situez-vous sur ce spectre? «C’est difficile à dire, car je me vois des points communs avec les deux! L’excellence de notre art qu’est la gastronomie est évidemment une exigence de tous les jours, pour moi, et je pense que cela a été prouvé avec notre troisième étoile. Mais j’aime aussi parler avec mon cœur et mes tripes, avec mes émotions, même si ma cuisine reste attachée à un terroir. Je suis également très attaché à la liberté universelle, sans frontières. La situation géographique du Mirazur me stimule d’ailleurs dans cette approche.

Quels produits et quelle part de votre héritage vont pouvoir retrouver les clients dans ce menu en édition limitée? «Pour élaborer ce menu, je me suis avant tout demandé: ‘qu’est-ce que tu veux raconter?’ Au Mirazur, je n’ai jamais vraiment pris le temps de me replonger dans mes origines argentines, préférant me concentrer sur les produits de la région. J’en ai donc profité pour faire appel à ce sentiment d’enfance pour finalement mélanger le tout.

D’un côté, on va retrouver des poissons peu utilisés pour des sushis «grand public», comme le ‘yellowtail’ ou la dorade, utilisée notamment pour le ceviche à la mangue, qui me rappelle évidement l’Amérique du Sud, tout comme le chia et l’amarante utilisés pour les California rolls. De l’autre, on va pouvoir sentir la Méditerranée avec le safran, les fleurs et les zestes d’orange...

Le ceviche de dorade et leche de tigre à la mangue. Sushi Shop

Le ceviche de dorade et leche de tigre à la mangue. Sushi Shop

Vous êtes actuellement à la troisième place du classement The World’s 50 Best Restaurants, qui fait figure de référence dans le monde de la haute gastronomie mondiale. Comment cela pèse-t-il dans vos décisions pour ce genre de projets? «Il est évident qu’entre cette place sur le podium mondial des meilleurs chefs et notre nouvelle étoile au Michelin, nous sommes très observés par la scène internationale. On ne peut pas faire n’importe quoi et mettre en péril les 13 années de travail acharné qui nous ont amenés à cette situation, ce qui fait que nous refusons énormément de sollicitations de ce type. Mais si l’argument en face est fort et prouve sa qualité comme cela a été le cas avec Sushi Shop, je pense qu’il faut savoir passer le cap.

Il est idyllique de penser que nous allons changer la manière de consommer du grand public seulement avec de la haute gastronomie et des petits artisans locaux. L’industrie est là, c’est un fait, et c’est à nous de travailler avec elle pour l’éduquer et ainsi, en cascade, éduquer le consommateur à adopter de meilleures pratiques et à faire attention au goût. Je pense que c’est aussi ce que nous avons réalisé avec Sushi Shop lors de cette collaboration.»