Adriano Picinati di Torcello a présenté l’étude Deloitte ce lundi à Monaco . (Photo: Deloitte Luxembourg)

Adriano Picinati di Torcello a présenté l’étude Deloitte ce lundi à Monaco . (Photo: Deloitte Luxembourg)

La sixième étude de Deloitte Luxembourg sur les liens entre art et finance avance différentes pistes pour renforcer la confiance des investisseurs dans le marché de l’art. Les pistes passent par la formation du personnel des banques privées et les nouvelles technologies.

Quelle est la place des œuvres d’art dans le portefeuille d’investissement des très grandes fortunes? Deloitte Luxembourg a présenté lors de la conférence annuelle Deloitte Art & Finance ce lundi 14 octobre à Monaco.

En chiffres, le marché a performé à un rythme annuel moyen de 8% depuis 10 ans. Mais avec de fortes différences selon les catégories (voir le graphique ci-dessous).

En 2018, l’allocation globale de patrimoines par les très grandes fortunes dans les œuvres d’art et collections diverses atteignait un montant global de 1.742 milliards de dollars. «Il s’agit d’un chiffre important. Pourtant, il faut bien voir que la croissance du marché de l’art est nettement moins importante que celle de la richesse globale mondiale», observe Adriano Picinati di Torcello, responsable du rapport chez Deloitte Luxembourg.

La croissance du marché de l’art est nettement moins importante que celle de la richesse globale mondiale.
Adriano Picinati di Torcello

Adriano Picinati di Torcellodirecteur, responsable du rapport «Art & Finance»Deloitte Luxembourg

Selon une enquête menée pour ce rapport auprès de «wealth managers», collectionneurs et professionnels de l’art, une des causes de cette distorsion provient du manque de transparence du marché de l’art.

«Les collectionneurs avertis attendent de leurs conseillers qu’ils les accompagnent dans la gestion de leur patrimoine alors que les nouveaux investisseurs voudraient qu’ils les aident à mieux comprendre le marché», constate le spécialiste de Deloitte Luxembourg. Les banques privées ont en tout cas une carte à jouer en développant de tels services afin de créer un lien plus personnel avec leurs clients, pointe l’étude.

Une autre cause vient du manque de transparence et de confiance dans ce marché. Parmi les menaces liées au marché de l’art, les acteurs du secteur citent en premier lieu l’authenticité, la provenance et la falsification. Pour les gestionnaires de fortune, les autres sources de soucis sont le manque de transparence, la manipulation des prix et le blanchiment.

«La cinquième directive anti-blanchiment qui entrera en vigueur en 2020 devrait contribuer à ramener de la confiance dans le marché de l’art», analyse Adriano Picinati di Torcello.

La cinquième directive anti-blanchiment qui entrera en vigueur en 2020 devrait contribuer à ramener de la confiance dans le marché de l’art.
Adriano Picinati di Torcello

Adriano Picinati di Torcellodirecteur, responsable du rapport «Art & Finance»Deloitte Luxembourg

Pour accroître la confiance des investisseurs dans les œuvres d’art, le rapport met aussi en exergue l’apport de la technologie. Un nouveau créneau «arttech» est en effet en train de sortir de terre et permettra d’assurer la traçabilité, l’identification ou de vérifier les différentes informations sur une œuvre.

«C’est clairement un créneau d’avenir», poursuit l’expert de Deloitte Luxembourg. «Mais dans ce secteur aussi, il y a un besoin d’investissements pour assurer les développements.»

Pour Adriano Picinati di Torcello, le Luxembourg pourrait réfléchir à la carte du marché de l’art pour élargir sa palette de services financiers. Il pourrait notamment se spécialiser dans les prêts garantis à partir d’œuvres d’art en banque privée. Le marché représente actuellement entre 21 et 24 milliards de dollars, mais la grande majorité de ce business se fait aux États-Unis. En Europe, tout reste à faire, en commençant par la formation de spécialistes dans les banques et la mise en place d’un cadre juridique plus propice pour le développement de l’activité.

Lancer l’idée d’obligations culturelles

Enfin, le rapport «Art & Finance» s’interroge sur la percée de l’investissement d’impact dans le domaine de la culture. De même qu’il existe des obligations vertes climatiques, pourquoi ne pas créer des obligations culturelles?

«Face à la concurrence du privé, les institutions culturelles publiques ont besoin de moyens financiers pour pouvoir présenter des œuvres intéressantes. Est-ce qu’une approche de type partenariat public-privé pourrait être envisagée?», lance Monsieur Picinati di Torcello. À Monaco, l’idée a en tout cas été lancée.