En faisant état d’une «forte augmentation» de la pratique du télétravail au Luxembourg, Nicolas Schmit (LSAP), ministre du Travail, a suscité une vague d’intérêt sur la problématique ces derniers jours. Présenté comme l’une des pistes à encourager dans la fameuse étude Rifkin, le télétravail semble tout indiqué pour répondre à une partie des actuels problèmes luxembourgeois, comme la question de la mobilité. Ainsi, selon le ministre, 6,1% des actifs résidents ont pratiqué le télétravail en 2015, contre 3% cinq ans plus tôt.

Basés sur l’«Enquête sur les forces de travail» du Statec concernant la population résidente, ces chiffres ne représentent cependant qu’une partie de la réalité observée, puisqu'en plus de ne prendre en compte que les résidents et non l'ensemble de la population salariée, ils retracent le nombre de personnes ayant effectué au moins 8h de télétravail par semaine. En cela, la définition adoptée par le ministère du Travail diffère de celle du Statec, qui comptabilise également les résidents qui travaillent depuis chez eux - les données sur les frontaliers n'étant pas disponibles - mais à partir d’une heure de télétravail hebdomadaire. D’après ce calcul, le taux a atteint, en 2015, 19,3% des résidents actifs. Contre 7,1% en 2010.

Bien que plus impressionnant, puisque synonyme de près d’un résident sur cinq, ce chiffre doit prendre toutefois avec des pincettes, puisque considéré par l’office statistique luxembourgeois comme «des estimations et non comme des données administratives», le recueil d’informations sur cette question ne faisant pas partie des données officielles demandées à chaque pays par Eurostat. Mais cette définition se trouve tout de même plus en phase avec la réalité, puisqu’à l’heure actuelle, la majorité des salariés ayant recours au télétravail y ont recours moins de l’équivalent d’une journée de travail, le Statec citant en exemple «les enseignants qui indiquent faire du télétravail car ils préparent leurs cours chez eux». Ce que confirment les données européennes, qui indiquent que le recours à cette forme de travail à distance n’a lieu que dans un nombre réduit de secteurs d’activité.

Bien qu’interprétées différemment, les données convergent cependant sur le type de salariés concernés. Au Grand-Duché, comme dans le reste de l’Europe, outre le fait que les hommes soient plus nombreux que les femmes à pratiquer le télétravail, certains postes sont plus à même d’autoriser le recours à cette forme de travail à distance.

Une réalité qui pourrait être amenée à changer dans les années à venir avec la volonté annoncée de Nicolas Schmit d’appeler «les partenaires sociaux à coopérer» dans le sens du développement du télétravail. Un appel entendu par l’UEL qui, par la voix de Jean-Jacques Rommes, présentait le télétravail, fin de semaine dernière au micro de la radio 100,7, comme «l’une des solutions possibles à développer». L’évolution étant possible en raison notamment du poids du secteur financier dans l’économie nationale.

En attendant, certaines entreprises installées dans la capitale ont d’ores et déjà mis en place une flexibilisation de leurs conditions de travail. C’est notamment le cas de celles implantées le long du tracé du tram, qui ont associé cette question à celle de la mobilité, question centrale de la compétitivité au Grand-Duché. Mais dans une limite d’une journée par semaine, dans la plupart des cas.

Une limitation qui pourrait être réévaluée, car bon nombre de ces entreprises emploient des salariés frontaliers, potentiellement fortement intéressés par cette possibilité de travail depuis la maison, même si des freins légaux subsistent. C’est dans ce sens que le ministre du Travail a annoncé, dans sa réponse parlementaire, la mise en place d’«un groupe de travail en vue d’identifier les problèmes qui se posent au niveau du télétravail transfrontalier.» Sans toutefois annoncer de date précise.