Lou Kiesch, partner chez Deloitte Luxembourg. (Photo: Deloitte Luxembourg)

Lou Kiesch, partner chez Deloitte Luxembourg. (Photo: Deloitte Luxembourg)

L’année 2018 s’est terminée sur une baisse des actifs sous gestion dans les fonds d’investissement basés au Luxembourg. Faut-il s’en inquiéter? L’année 2019 s’annonce-t-elle meilleure?

Lou Kiesch. – «La baisse que le secteur a connue au quatrième trimestre 2018 est surtout liée à l’évolution des marchés boursiers. Cependant, les débats entre la Chine et les États-Unis sur les questions commerciales et la situation au Venezuela continuent de créer des tensions sur les marchés financiers, et donc de la volatilité. Cette situation a pu effectivement avoir un effet au niveau de certains rachats de portefeuilles dans les dernières semaines et les derniers mois.

Quant à l’année en cours, l’industrie des fonds l’envisage avec sérénité. Avant la chute du dernier trimestre 2018, on avait surtout assisté à un mouvement de transfert de fonds et d’actifs vers le marché luxembourgeois dans le cadre du Brexit. La volatilité des marchés boursiers ainsi que la baisse des actifs des fonds d’investissement ne sont en rien liées à la Place luxembourgeoise.

Le Brexit a effectivement eu un effet favorable, une grande part de l’argent frais récolté en 2018 étant liée au transfert de fonds de la part d’opérateurs britanniques. À moyen terme, comment évaluez-vous les effets de la sortie du Royaume-Uni de l’UE?

«À court terme, effectivement, le Luxembourg a bénéficié de cette relocalisation des avoirs. Mais, à moyen et long termes, les conséquences ne seront pas positives. En effet, avec le Brexit, le Luxembourg perd un allié très important. Bon nombre de gestionnaires de fonds basés à Luxembourg opèrent à partir de Londres.

Le secteur des fonds est très globalisé. La disparition d’un acteur majeur qu’est le Royaume-Uni du marché unique met un peu de sable dans les engrenages. Ce n’est donc pas une bonne nouvelle; il est dès lors important que le Luxembourg reconnaisse le Royaume-Uni comme une juridiction équivalente au même titre que les États-Unis.

Les acteurs luxembourgeois se montrent réticents à voir l’Esma (Autorité européenne des marchés financiers), un des organes de contrôle européens, s’octroyer de nouveaux pouvoirs au niveau du contrôle des activités de délégation. Vous les comprenez?

«Le fait que l’autorité européenne souhaite s’octroyer un rôle en matière de délégation pourrait provoquer un effet de duplication de certains coûts. Et ce sont les investisseurs qui le paieront. Les réglementations sont évidemment très importantes, mais la surrégulation peut être néfaste. Dans l’industrie des fonds, les marges sont de plus en plus étroites, le rajout de réglementation atteint donc l’efficience. L’Esma est un organisme très puissant, mais on peut quand même se demander si les décisions ne sont parfois pas tout simplement politiques.»