La question de la réforme du stage dans la fonction publique va bien plus loin que la question de la durée de la période de stage. Photo: Licence C.C.)

La question de la réforme du stage dans la fonction publique va bien plus loin que la question de la durée de la période de stage. Photo: Licence C.C.)

«Braderie», «surenchère», «campagne électorale»… La députée du CSV, Octavie Modert, ne mâche pas ses mots pour décrire la sortie médiatique opérée mardi par la ministre et présidente du DP, Corinne Cahen.

L’idée de réduire la période de stage de trois à une année, à condition que la formation soit intensifiée en première année et que les fonctionnaires puissent suivre une formation continue tout au long de leurs carrières, est perçue du côté du CSV comme un cadeau électoral pour un des lobbies les plus puissants dans le corps électoral: la CGFP.

Octavie Modert, qui avait participé à l’élaboration de la réforme de la fonction publique initiée en 2010, signée en 2011 et votée en 2015, n’en revient pas que si peu de temps après sa mise en œuvre, le gouvernement souhaite déjà faire marche arrière.

Si elle reconnaît qu’une évaluation sera bel et bien nécessaire à un point donné, un an et demi après l’entrée en vigueur serait trop tôt. Et de considérer que l’on pourrait adapter certaines modalités ponctuelles avant de songer à changer les «grands agrégats».

Avant de modifier fondamentalement la réforme, le gouvernement devrait déjà la transposer comme il faut, estime Octavie Modert. «C’est une question de sérieux et non de campagne électorale».

Incohérence

La députée du CSV entrevoit en outre des incohérences entre la sortie de Corinne Cahen et l’accord signé le même jour par son collègue de parti, le ministre de l’Éducation nationale, Claude Meisch (DP), pour réduire, sous conditions, le stage pour les enseignants de trois à deux années.

Dan Kersch (LSAP), le ministre en charge de la Fonction publique, commentait ce mercredi sur RTL qu’en effet, Corinne Cahen et Claude Meisch auraient mieux fait de se coordonner sur la question de la réduction du temps de stage.

En revanche il se réjouissait que désormais des collègues au gouvernement partagent sa position en faveur d’un «bilan offensif de la réforme de la fonction publique». Selon lui, il faudrait «avoir le courage, ensemble avec les partenaires sociaux, de préserver ce qui est bon et de supprimer ce qui est plutôt contre-productif».

DP soudé ou divisé?

Côté DP, l’enthousiasme par rapport à la déclaration de Corinne Cahen est difficile à jauger. Certains membres du DP contactés par Paperjam, comme le député Gilles Baum, soutiennent «à 100%» la démarche de la présidente du parti.

D’autres en revanche s’interrogent sur l’intérêt de la proposition ou encore sur les raisons qui auraient mené le DP à changer de position, étant donné qu’en fin d’année encore, confronté à un ultimatum de la CGFP, il était resté ferme dans un premier temps.

Par ailleurs, des membres du parti se demanderaient comment les dirigeants du parti peuvent décider et communiquer une telle proposition sans que le comité national n’ait été consulté.

‘Life-long earning’

Le député libéral, Gusty Graas, vice-président de la commission parlementaire en charge de la Fonction publique, souligne d’une part que la question du stage avait été discutée au sein de la fraction du DP.

Il explique que l’idée ferait partie de réflexions qui couleraient dans le programme électoral des libéraux et qu’une telle réforme de la réforme ne serait certainement pas envisageable avant les élections du 14 octobre.

L’ancien secrétaire général du parti, Marc Ruppert, publiait le jeu de mots suivant sur twitter: «Une année de stage pour accéder au life long earning… ehm learning».

<blockquote class="twitter-tweet" data-partner="tweetdeck"><p lang="en" dir="ltr">Mat engem Joer Stage zum lifelong-earning...ehm learning</p>&mdash; Marc Ruppert (@RuppertMarc) <a href="https://twitter.com/RuppertMarc/status/955906518888669184?ref_src=twsrc%5Etfw">January 23, 2018</a></blockquote>

Un débat complexe et nécessaire

Cela dit, face à la vélocité des développements technologiques et si le constat de Corinne Cahen, à savoir que le stage sous sa forme actuelle ne fonctionne pas comme il faut, est vérifié, la nécessité de réformer le stage ne fait aucun doute.

En revanche, le ministre Dan Kersch l’évoquait brièvement, la réduction de la période de stage de manière généralisée ne serait pas réaliste, en raison des grandes différences entre les différents corps de métiers au sein de la fonction publique.

Compte tenu aussi d’autres complexités qui entourent les questions sur le contenu d’une formation continue tout au long de la carrière revendiquée par le DP, le parti devra fournir davantage d’informations sur ce qu’il s’imagine exactement.

Autrement, à moins de 9 mois des législatives, on aurait du mal à ne pas interpréter la sortie des libéraux comme une tentative de gagner des voix.