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Bertrand Schmeler, senior portfolio manager chez CBP Quilvest 

Janet Yellen, qui a repris en janvier dernier la présidence du Conseil de la Réserve fédérale américaine (Fed), est habituellement perçue par les milieux financiers comme favorable à la poursuite d’une politique monétaire ultra-accommodante. Pour son premier rendez-vous face à la presse, à l’issue d’un comité de la Fed la semaine dernière, elle a quelque peu surpris les marchés en annonçant que la Banque Centrale pourrait relever ses taux directeurs plus tôt que les marchés ne l’avaient anticipé.

Le processus de «normalisation» des taux d’intérêt semble être enclenché de l’autre côté de l’Atlantique. S’étant employée depuis fin 2008 à faire baisser les taux d’intérêt réels à long terme en territoire négatif (inférieurs à l’inflation), la Fed confirme que la reprise américaine semble à présent bien ancrée; aussi, l’abandon progressif des politiques d’intervention et les perspectives de hausses des taux directeurs devrait voir les taux obligataires à 10 ans poursuivre leur remontée vers 3,5%, contre 2,75% aujourd’hui. Le ralentissement passager de l’activité du début d’année, dû en grande partie à des conditions météorologiques très défavorables, devrait laisser place à un rebond dès le deuxième trimestre, incitant la Fed à agir.

Éviter les obligations investment grade

Dans un tel cas de figure, quels investissements faut-il privilégier? Après leur bonne performance depuis le début de l’année, les obligations investment grade (rating supérieur à BBB) des pays «core» (Allemagne, USA, UK…) sont à éviter: une remontée de taux d’à peine 0,3% sur une obligation d’une durée moyenne de six ans viendrait annuler leur rendement attendu sur les 12 prochains mois.

Les obligations high yield (rating BB ou B) de courte durée (trois à cinq ans) demeurent une alternative crédible aux taux actuellement offerts sur les placements monétaires; elles continuent d’offrir des rendements moyens de l’ordre de 4% par an, alors que les taux de défauts constatés sur ce type d’émetteurs restent très bas et que les durées courtes sont moins sensibles à la hausse des taux. Dans cette même catégorie de débiteurs, les «senior loans» - ou crédit garantis par des actifs - (immobiliers, industriels…) offrent des rendements similaires au marché du high yield, alors qu’ils sont prioritaires par rapport aux obligations, en cas de faillite de l’émetteur. Disponibles au travers de fonds d’investissement de plus en plus nombreux et liquides, ces crédits sont structurés sur base de taux variables, qui verraient leurs rendements s’apprécier en cas de hausse des taux courts.

Quant aux marchés actions, dans un environnement où les résultats des sociétés peinent à être au rendez-vous des attentes des analystes depuis le début de l’année, les perspectives de hausse des taux semblent limiter leur potentiel de performance. En conséquence, certains produits structurés sur des actions et les principaux indices boursiers, notamment européens, permettant d’obtenir un coupon relativement élevé (de 7 à 12%) aussi longtemps que les sous-jacents ne baissent pas plus de 30 à 40% par rapport à leur niveau actuel, semblent être une alternative très crédible aux investissements obligataires.