L’affaire Pescanova est de plus en plus nébuleuse. Les investisseurs devront passer entre les mailles du filet. (Photo: Licence CC)

L’affaire Pescanova est de plus en plus nébuleuse. Les investisseurs devront passer entre les mailles du filet. (Photo: Licence CC)

De la Galice à Luxembourg, l’affaire Pescanova continue de faire des vagues. Pour rappel, le géant ibérique, présent sur toute la filière «mer» de la pêche au conditionnement de produits frais et surgelés, fait partie du portefeuille de la société luxembourgeoise Luxempart, qui se trouve donc exposée dans l’aventure. Et essaie de limiter la casse.

Le conseil d'administration de Pescanova s'est officiellement déclaré en cessation de paiement, depuis vendredi dernier. Il ne lui semble «pas possible de parvenir, à court terme, à un accord avec les créanciers de la société», alors que «sa situation financière présente un risque de détérioration». La procédure de préfaillite est enclenchée. Et il faut à présent déterminer le poids réel d’une dette abyssale, qui a manifestement été masquée durant une longue période. 

Changement de réviseur

Le conseil d’administration de la société galicienne a révoqué le vérificateur des comptes, BDO Auditores S.L. Luxempart, lors de la publication de ses résultats 2012, indiquait: «BDO, le réviseur de la société depuis plus de 10 ans, a été mandaté par la CNMV (ndlr: la Commission nationale du marché de valeurs, l'autorité espagnole des marchés financiers) pour analyser en détail les comptes de la société et de remettre un rapport sur la situation de Pescanova d’ici le début du mois d’avril», écrivait Luxempart le 28 mars dernier. Il était prévu qu’un CA extraordinaire prenne connaissance du rapport de BDO, «pour examiner et valider la nouvelle version des comptes 2012». Mais, selon la presse espagnole, l’auditeur des comptes a refusé de les signer, car plusieurs centaines de millions d'euros de dettes pourraient avoir été cachées par le biais d'opérations entre les filiales de Pescanova.

La dette «officielle» de Pescanova s'élevait, au 3e trimestre 2012 à 1,5 milliard d'euros. Mais, selon la presse économique ibérique, elle pourrait en réalité être de 2,7 milliards d'euros... En tout cas, Pescanova, en accord avec la CNMV, demande un commissaire aux comptes judiciaire, nommé parmi les principaux cabinets d’audit, pour réexaminer les états financiers de l’année dernière.

Dégringolade boursière

L’autorité des marchés espagnols a donné, vendredi, un nouveau délai de cinq jours. En attendant, la valeur du groupe en Bourse, dont la cotation à Madrid a été suspendue, a chuté de plus de 60% en un mois.

Luxempart, qui n’a pas encore réagi aux derniers éléments du dossier (personne n'a pu y être joint ce lundi matin), est évidemment plongée dans le doute. La société de participations luxembourgeoise a été exposée jusqu’à quelque 56 millions d’euros, avant de réduire la voilure. En juillet 2011, Luxempart avait acquis une participation de 5,1% dans Pescanova, pour 29,76 millions d’euros. La participation avait été portée à 5,83% suite à une augmentation de capital souscrite l’été dernier, pour 9 millions d’euros. Luxempart avait aussi souscrit à une émission d’obligations convertibles de la société pour un montant de 17 millions d’euros (les obligations assurant un rendement de 8,75% sur sept ans).

Mise à zéro

Luxempart, fin février dernier, avait contribué au «halte-là», en refusant, conjointement aux représentants du groupe Damm (société espagnole qui détient 6,2% dans Pescanova), d’arrêter les comptes 2012. La procédure, qui a conduit notamment à la suspension du titre, a mené Luxempart «à passer une dévaluation (impairment) correspondant à une mise à zéro de la participation et une forte réduction de valeur sur les obligations convertibles avec un impact sur le résultat consolidé de 48,22 millions», expliquait Luxempart fin mars dernier. «L’impact sur les obligations convertibles a pu être réduit de 4 millions d’euros, suite à une cession le 7 mars 2013, pour 5 millions d’euros en valeur faciale.»

Il reste à attendre les derniers décomptes en provenance d’Espagne, pour savoir si le dépôt de bilan de Pescanova aura lieu ou si un improbable sauvetage peut être entrepris. Alors seulement, l’investisseur luxembourgeois pourra mesurer l’impact de l’affaire. 

Sans pouvoir formellement établir un lien de cause à effet, on peut toutefois observer que, ce lundi, l'action Luxempart à la Bourse de Luxembourg accusait une baisse de -3,21%. Quant au titre Foyer, gros actionnaire de Luxempart (dont l'administrateur délégué, François Tesch, est aussi CEO de Foyer), il perdait 1,95%.