Énergie éolienne: ce n'est pas le vent qui manque, mais la carte des emplacements possibles. (Photo: George Noesen)

Énergie éolienne: ce n'est pas le vent qui manque, mais la carte des emplacements possibles. (Photo: George Noesen)

Le Luxembourg est-il en délicatesse avec les énergies vertes? Selon les chiffres diffusés annuellement par Eurostat, l’office européen des statistiques, il pointe en tout cas à la dernière place du peloton européen depuis l’année 2013. Comme tous les pays de l’Union européenne, le Grand-Duché s’est fixé un objectif à atteindre pour 2020 concernant la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique finale (électricité, chaleur, transport).

Il a été fixé à 11%. En 2014, dernier chiffre officiel disponible, la part est de 4,5%. Elle se remet peu à peu à augmenter, après avoir quasiment fait du surplace entre 2007 et 2011. «Le problème, c’est qu’une grande part de ce chiffre est réalisée grâce aux agrocarburants», observe Martina Holbach, chargée de mission chez Greenpeace Luxembourg. «Or, on sait que cette production entraîne des problèmes environnementaux et un souci de concurrence avec la production alimentaire.»

Dans un rapport daté de 2014, l’Agence internationale de l’énergie estime que le Luxembourg est en ligne avec ses objectifs. Mais l’AIE fait remarquer aussi que les énergies renouvelables se développent à un rythme assez lent. À la décharge du Luxembourg, l’étude pointe des contraintes qui ralentissent cette évolution: la densité de population, la taille du pays, la protection de la nature et la topographie. Dans le secteur éolien, par exemple, la présence de l’aéroport au centre du pays bloque une large zone pour l’établissement de parcs. «La situation est longtemps restée bloquée dans le Nord à cause d’un projet d’installation d’un radar également pour l’aéroport», expliquent Laurent Winkin et Paul Zeimet, respectivement responsable des énergies renouvelables et secrétaire général de la Société électrique de l’Our (SEO).

Au niveau de l’éolien, nous sommes en ligne avec l’objectif programmé pour 2020.

Laurent Winkin et Paul Zeimet, Société électrique de l’Our

Impliquée dans l’installation et la gestion de parcs éoliens et de centrales hydro-électriques, SEO a créé la société Soler, en partenariat (50/50) avec Enovos, pour la mise en commun de leur production verte. «Au niveau de l’éolien, nous sommes en ligne avec l’objectif programmé pour 2020, nous devrions l’atteindre sans trop de problèmes», estiment les deux responsables de SEO, également impliqués dans Soler.

Les développements actuels du renouvelable sont inférieurs au potentiel du territoire.

Martina Holbach, Greenpeace Luxembourg

Selon l’Institut luxembourgeois de régulation (ILR), la production d’électricité fournie par le vent a été de 80  millions de kWh, alors que le plan gouvernemental – le National renewable action plan – prévoit d’atteindre 240 millions de kWh en 2020.

«Les développements actuels du renouvelable sont inférieurs au potentiel du territoire», insiste Martina Holbach. «Dans l’éolien, la première étape devrait être l’établissement d’un cadastre des sites disponibles.» Pour le développement du solaire photovoltaïque à plus large échelle, elle plaide pour l’élargissement du tarif d’injection – l’outil de soutien financier – aux installations supérieures à 30 kWp. «Des propositions du gouvernement parlent d’aller jusqu’à 200 kWp, mais le dossier traîne dans les administrations et on ne sait toujours pas quand il sera opérationnel.»

Soleil et biomasse

Le producteur d’électricité Enovos affirme en tout cas vouloir pousser de nouveaux pions dans le photovoltaïque. En 2012, il a lancé le projet Encasol en collaboration (50/50) avec le distributeur Cactus pour placer des panneaux sur les toits de magasins. Trois supermarchés en sont déjà équipés (Bascharage, Ingeldorf et Redange). «Ça fonctionne bien, nous regardons donc si d’autres opportunités sont possibles», explique Daniel Christnach, responsable des énergies renouvelables chez Enovos.

Il explique aussi que l’entreprise veut développer de nouveaux produits pour impliquer les consommateurs privés dans la production d’énergie à partir du photovoltaïque. En attendant, des initiatives citoyennes ont également vu le jour pour placer des panneaux sur des toitures adaptées. TM EnerCoop en a ainsi installé 200  m2, début 2015, sur le hall omnisports de Lallange (30  kWp) et EquiEnerCoop a «réquisitionné» les toits du dépôt communal de Junglinster et de l’école fondamentale de Gonderange pour le projet EquiSolar 2012 (140 kWp).

Enfin, Enovos entend aussi développer des projets dans la biomasse, notamment via sa filiale Luxenergie qui transforme actuellement sa centrale de cogénération au gaz naturel du Kirchberg en centrale biomasse. Elle sera opérationnelle en 2017. En collaboration avec la société belge Groupe François, elle a aussi développé la société Kiowatt à Roost, qui a joint une centrale de cogénération biomasse à une unité de production de pellets. «Il y a aussi un important potentiel de biomasse dans les forêts luxembourgeoises», observe Daniel Christnach. «Mais le problème est de pouvoir l’extraire. Nos forêts sont divisées en petites parcelles individuelles et manquent d’accès.»

La matière première ne manque donc pas trop pour pouvoir atteindre les objectifs. Reste à mettre les bouchées doubles.