Anna-Lena Högenauer: «La promesse des pro-Brexit – ‘tous les avantages de l’Union européenne sans les inconvénients’ – était bien peu réaliste.» (Photo: Uni.lu)

Anna-Lena Högenauer: «La promesse des pro-Brexit – ‘tous les avantages de l’Union européenne sans les inconvénients’ – était bien peu réaliste.» (Photo: Uni.lu)

Si un important Sommet européen consacré au Brexit aura lieu ces mardi et mercredi à Bruxelles, il est cependant peu probable que le Premier ministre britannique y annonce officiellement la demande du Royaume-Uni de sortir de l’Union européenne.

David Cameron ayant indiqué qu’il ne démissionnerait qu’en octobre et que ce serait à son successeur de débuter la procédure de sortie de l’Union européenne, Anna-Lena Högenauer – chercheuse en sciences politiques à l’Université du Luxembourg – estime, dès lors, que l’article 50 du traité de Lisbonne qui prévoit les modalités de sortie d’un État membre ne sera pas déclenché avant cette échéance.

«Si l’Union européenne a déjà désigné Didier Seeuws – ancien chef de cabinet d’Herman Van Rompuy – pour négocier, et si elle souhaite clarifier plutôt tôt que tard le statut du Royaume-Uni, elle ne peut le forcer à activer cette procédure», souligne-t-elle.

Deux ans de négociations, voire plus

Ce ne serait donc au mieux qu’à l’automne que débuteront ces négociations pour la sortie des Britanniques de l’UE, avec un calendrier prévoyant – toujours sur base de cet article 50 – deux années de négociations, éventuellement prolongées, pour déterminer quelles seront les nouvelles relations qui uniront, ou pas, le Royaume-Uni et l’Union européenne.

«L’objectif des négociations sera de parvenir à un accord qui devra être ensuite ratifié, à la majorité qualifiée, par le Conseil, sur avis du Parlement européen», poursuit Anna-Lena Högenauer, notant que faute d’accord ou si celui-ci n’était pas accepté, le Royaume-Uni devrait quitter l’Europe sans délai, sans statut spécial comme en disposent par exemple des pays tiers comme la Norvège ou la Suisse, sans plus aucun droit et sans plus aucun devoir non plus.

Un simple membre de l’OMC

«Le seul statut qui lui resterait serait – en matière de commerce – celui défini par les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC)», ajoute-t-elle encore.

C’est dans ce secteur du commerce que, à en croire Anna-Lena Högenauer, le Royaume-Uni, sans accès privilégié au marché intérieur, aurait le plus à perdre de son divorce avec l’Union européenne. Et plus particulièrement dans le commerce des services, dont font partie les banques.

«Elles peuvent vendre des produits en euros. C’est un droit important pour Londres qui est une porte d’entrée vers l’Union européenne et son secteur financier», précise-t-elle encore. «Ce pourrait ne plus être le cas à l’avenir, avec tout ce que cela suppose, dont d’importantes conséquences pour l’emploi.»

La recherche menacée

Pour l’emploi, et pour différents secteurs d’activité subventionnés par Bruxelles, comme celui de la recherche. «D’où, depuis le Brexit, une certaine nervosité qui est apparue au niveau des universités qui craignent de voir disparaître les subsides européens dont elles bénéficiaient jusqu’ici», ajoute Anna-Lena Högenauer.

À moins que le Royaume-Uni ne devienne un partenaire de l’Union européenne comme l’est la Norvège, qui participe à certains programmes de l’UE, à leur budget, en échange de subventions.

«Mais s’il ne participe à rien, il ne recevra rien», affirme encore la chercheuse de l’Uni, pour qui la promesse des pro-Brexit – «tous les avantages de l’Union européenne sans les inconvénients» – était «bien peu réaliste».