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C'est sur le zoning industriel Am Bann, à Leudelange, que le groupe d'assurances Le Foyer s'apprête à établir son siège social. La fête du bouquet, marquant la fin du gros oeuvre du nouveau bâtiment, a été célébrée fin janvier. Dans un peu plus d'un an, l'ensemble des sociétés du groupe, actuellement éparpillées sur 5 sites différents, sera regroupé dans un impressionnant complexe de 27.000 m2 de surfaces brutes, dont 12.000 m2 de surfaces de bureau, conçu par le bureau d'architectes Worré & Schiltz.

Pour Le Foyer, il s'agit d'un investissement de quelque 40 millions d'euros, qui va permettre au groupe d'entrer dans une nouvelle ère: "Nous allons profiter de ce nouvel immeuble pour moderniser notre façon de travailler, explique François Tesch, le président du groupe Le Foyer. Jusqu'ici, les bureaux étaient très cloisonnés. Nous allons nous diriger vers un aménagement paysager qui offrira plus de flexibilité sans nuire à la qualité du travail'.

Autant pour le groupe que pour le paysage économique luxembourgeois, il s'agit d'un petit événement. Depuis plus de 20 ans, l'image du Foyer est fortement liée à celle du Plateau du Kirchberg, où la société s'était installée au début des années 80, dans un bâtiment dont l'architecture "pyramidale" n'était pas passée inaperçue et constituait même un point de repère historique dans le quartier.

L'occasion était en tous les cas idéale pour faire le point avec François Tesch sur le développement du groupe, dans un contexte législatif et opérationnel toujours aussi agité...

Monsieur Tesch, ce nouveau siège social qui se profile suppose-t-il qu'une nouvelle vie va commencer, en quelque sorte, pour Le Foyer?

Nous n'en sommes qu'à fêter le bouquet et il faudra attendre encore le premier semestre 2006 pour que nous nous y installions. Mais il s'agit évidemment d'une étape très importante dans la vie de notre groupe. Elle va, déjà, nous permettre de regrouper sur un seul site toutes nos activités.

Nous nous sommes fortement développés ces dernières années et il nous paraissait opportun de rassembler nos quelque 430 employés à un endroit qui réponde à des conditions optimales. C'est le cas de ce parc d'activités de Leudelange, qui est très facile d'accès aussi bien en venant de Luxembourg-ville que de Esch-sur-Alzette. Nous y proposerons de très nombreuses possibilités de stationnement, aussi bien à disposition de notre clientèle que de nos employés. Avec 12.000 m2 de bureaux, nous avons déjà le double de la surface qui était disponible au Kirchberg.

A quand remontent les premières réflexions quant à ce déménagement?

Nous avons commencé à y réfléchir il y a quatre ans environ. Et les travaux, eux-mêmes, ont démarré en janvier 2004. En un an, nous avons terminé le gros-oeuvre, en travaillant simultanément sur trois chantiers à la fois. Tout sera terminé dans le premier trimestre 2006 et nous devrions emménager au cours du premier semestre.

Ce nouvel immeuble va nous permettre de disposer de bureaux très avant-garde au niveau de la technologie, avec tous les derniers moyens de communication. Nous allons également assurer un environnement très agréable pour nos employés, avec des lieux de détente, un peu comme sur un campus. Nous allons également conserver notre cantine.

La convivialité sera un élément clé, tout comme la flexibilité, sachant que l'environnement est en perpétuel changement. Du reste, il nous sera possible, à l'avenir, d'agrandir nos locaux, puisque nous avons un second terrain contigu à ce futur bâtiment qui permettra de doubler nos surfaces disponibles.

Avez-vous rencontré des difficultés particulières?

Non, pas spécialement. La collaboration avec la commune de Leudelange a été très efficace. Elle a bien compris nos contraintes. On compte évidemment beaucoup sur elle pour rendre les alentours du site également accueillants.

Vous quittez la ville de Luxembourg dans laquelle vous étiez implanté depuis toujours (la société a vu le jour en octobre 1922, NDLR). C'est vraiment une page qui se tourne...

Il s'agira pour Le Foyer du cinquième siège social de son histoire. Je me souviens qu'en 1981, nous avions déjà été précurseurs, en quelque sorte, lorsque nous avions quitté le centre-ville (Le Foyer était installé, depuis trente ans, au coin de la route d'Esch et de la rue Guillaume, NDLR) pour nous établir au Kirchberg.

Puis, le Kirchberg est devenu, à son tour, un quartier plus urbain et il nous est apparu indispensable de déménager dans de nouveaux locaux qui offrent de meilleures possibilités d'accès, aussi bien pour nos employés que pour nos clients.

Justement, l'identité visuelle du Foyer est fortement liée à ce bâtiment du Kirchberg. Cela veut-il dire que vous allez devoir la changer aussi?

C'est une bonne question! Mais il ne faut pas oublier que notre logo représente aussi le F du Foyer. Or, nous ne changeons pas de nom! Il est vrai que le nouvel immeuble n'aura évidemment pas la même forme que celui du Kirchberg et nous réfléchissons en effet à un rajeunissement de notre logo. Il ne s'agira pas d'un changement de fond en comble, mais il faut aussi considérer que ce logo a déjà une vingtaine d'années et qu'il est de toute façon temps de penser à le rafraîchir.

Vous êtes une des compagnies "historiques" du Luxembourg, avec La Luxembourgeoise. Mais cela a-t-il encore une signification à l'heure où l'on parle autant de l'Europe?

L'histoire d'un pays donne des bases très solides et une clientèle qui vous est proche. Cet aspect n'est pas à négliger. Si l'on n'a pas cela, il manque un élément essentiel à la stabilité et au développement de ses marchés.

Nous avons développé depuis une dizaine d'années une activité internationale en assurance vie. Nous avons également une importante activité de gestion d'actifs, elle aussi internationale. Cela commence à représenter une part importante dans notre chiffre d'affaires et aussi, graduellement, dans notre bénéfice.

Je persiste de toute façon à dire que les Luxembourgeois doivent être des européens avant les autres...

Est-ce aussi le cas pour Le Foyer?

Nous étions, dans le temps, présents en direct en Belgique (entre 1925 et 1990, date de la cession des activités belges à la Royale Belge, NDLR) et en France (entre 1924 et 1982, avant que le portefeuille ne soit cédé à la société Le Secours IARD, NDLR). Mais dans le cadre du développement de l'Europe, nous avons décidé de nous recentrer sur le Luxembourg et de développer ces activités internationales à partir d'ici et non pas dans chaque pays au travers de filiales.

L'Europe, parlons-en. L'Association des compagnies d'assurances (ACA) évoquait, récemment, le danger que représente l'accumulation de nouvelles dispositions législatives. Souffrez-vous réellement de cette sur-réglementation'

Il est vrai qu'il s'agit là d'une tendance générale, qui n'est, du reste, pas propre au secteur de l'assurance. Le monde bancaire aussi, par exemple, est concerné.

Il faut nous adapter, mais surtout que nous restions compétitifs par rapport aux autres pays, en ce qui concerne les coûts. Il est évident que la mise en place d'une nouvelle réglementation induit des coûts et il ne faudrait pas que ces coûts pèsent trop. Je pense néanmoins que dans le secteur des assurances, nous avons encore une certaine marge en la matière.

Un projet de loi a été déposé fin novembre devant transposer la directive européenne sur l'intermédiation en assurance (la directive était censée entrer en vigueur le 15 janvier dernier, NDLR). Cette loi va-t-elle profondément changer votre façon de travailler?

Cette loi va certainement apporter une certaine diversification et donner de nouvelles possibilités au niveau de la distribution. Mais nous ne pensons pas que cela va profondément bouleverser les choses.

Je pense qu'aujourd'hui, le service assuré aux clients est de bonne qualité grâce aux agents, qui représentent la part dominante de la distribution. Ce bon service est reconnu par la clientèle et il ne faut donc pas s'attendre à de changements importants.

Le texte prévoit la création d'une nouvelle catégorie d'intermédiaires: les sous-courtiers d'assurances (voir paperJam janvier 2005, page 65). Qu'en pensez-vous?

Nous travaillons déjà avec un grand nombre de courtiers. Ils étaient essentiellement concentrés sur les risques industriels les plus importants. Sans doute y aura-t-il à l'avenir un nombre plus important de courtiers, avec un mouvement vers la couverture des risques particuliers. Mais là aussi, je crois que nos agents, qui sont très fortement informatisés et professionnalisés, offrent déjà un haut niveau de service aux consommateurs.

Ce sera donc au client de choisir. L'agent présente des avantages et le courtier d'autres. Dans tous les pays européens, il y a des courtiers. Il est donc normal qu'ici aussi!

Nous vivons dans un marché en plein développement. Le pouvoir d'achat des consommateurs luxembourgeois augmente et l'économie locale s'est finalement bien comportée par rapport à d'autres pays. Dans ce contexte, je pense qu'il y a effectivement un besoin croissant en services d'intermédiation, dans lequel le courtage peut trouver sa place.

Parmi les sujets sensibles actuellement en discussion, il y a la réflexion sur l'instauration d'un fonds de garantie en cas de faillite d'une société d'assurances. Quelle est votre position à ce sujet?

Il faut évidemment considérer la spécificité du Luxembourg. Ce que nous craignons, c'est que si un assureur s'installe ici, pour y développer une activité transfrontalière, en souscrivant à des risques importants, et que cet assureur rencontre des difficultés financières, ces difficultés peuvent être telles que les sociétés locales qui auraient souscrit à ce fonds de garantie n'auraient pas les moyens de les couvrir!

Il y a donc, actuellement, des démarches entreprises par l'ACA afin d'adapter cette réglementation européenne à la spécificité luxembourgeoise. Les assureurs locaux ne peuvent pas tout supporter et il est impératif que d'autres garanties extérieures interviennent.

Et qu'en est-il de la directive dite "Genre", qui préconise la mise en pratique de l'égalité des sexes tant au niveau de l'accès qu'au niveau de la fourniture de biens et de services, et qui n'est pas sans poser un problème en matière d'assurance-vie, sachant qu'il est établi que l'espérance de vie d'une femme est supérieure à celle d'un homme?

La réalité veut qu'il y ait effectivement une différence! Pour pouvoir établir une tarification juste, il faut donc pouvoir tenir compte de cette différence, vu qu'il est difficile de faire jouer la solidarité sur des éléments qui se justifient moins bien.

C'est un problème qui est en effet important. On va globalement vers une plus grande segmentation et une tarification établie davantage en fonction du profil du risque. Or, le principe d'égalité entre l'homme et la femme va clairement à l'encontre de cette segmentation. Il faudra donc voir si les principes sont plus importants que les tendances du marché et la réalité du terrain...

Comment jugez-vous l'année 2004 qui vient de s'achever?

Nous n'avons évidemment pas encore les chiffres définitifs, mais les tendances affichées au terme du troisième trimestre devraient être confirmées.

Nous avons notamment enregistré une très forte activité dans le secteur de l'assurance vie en libre prestation de services à partir du Luxembourg. Je pense d'ailleurs que cette branche va bien se développer. On ne voit pas actuellement de raisons pour lesquelles cela irait moins fort.

Les performances de l'action Le Foyer en Bourse de Luxembourg ont également dû vous satisfaire...

Il est vrai que le titre a réalisé une très belle performance en gagnant près de 40%. Mais cela s'inscrit dans le contexte général des autres compagnies d'assurances qui sont également cotées. Simplement, nous nous sommes démarqués un peu plus favorablement que les autres. Cela signifie que les actionnaires reconnaissent le bien-fondé de la stratégie de prudence qui a été la nôtre dans les moments plus difficiles".