Adriano Picinati di Torcello est un des hommes clés du positionnement de la Place sur le marché de l’art et de la finance. (Photo : Etienne Delorme / archives)

Adriano Picinati di Torcello est un des hommes clés du positionnement de la Place sur le marché de l’art et de la finance. (Photo : Etienne Delorme / archives)

Le cabinet d’audit, Deloitte, et la société d’analyse de marché londonienne, ArtTactic, ont remis ça. Ensemble, ils publient la deuxième version du Art et Finance report, une étude analysant l’état du marché et son appréhension par les gestionnaires de fortune. Globalement, l’art devient une classe d’actifs à part entière pour la clientèle fortunée internationale – un segment sur lequel se positionne la banque privée luxembourgeoise – et devient, à ce titre, de plus en plus liquide.

La nouvelle étude fait valoir que l’objectif n’est plus tant de regarder les retours sur investissement concevables avec l’art, mais le rôle de l’art comme «outil de diversification et de protection du capital». Le vecteur le plus déterminant pour les acheteurs reste cependant le «retour émotionnel» lié à l’acquisition d’une œuvre. «Il faut donc intégrer cette passion dans l’approche du wealth management», conseille le cabinet travaillant sur cette stratégie de diversification depuis le Grand-Duché.

Sonder les attentes

Il entend ainsi proposer toute une panoplie de produits et services autour de l’art. Et pour mieux cibler les attentes, l’étude a sondé une trentaine de banques privées, principalement au Luxembourg, 112 professionnels de l’art (galeries, maisons de vente et conseillers) et 81 collectionneurs majeurs pour connaître les principales préoccupations du marché.

Il en ressort que 53% des gestionnaires de fortune affirment que l’environnement économique pousse leurs clients à de plus en plus intégrer l’art dans leur portefeuille. Ils étaient 28% à témoigner de cette tendance en 2011. 43% d’entre eux jugent également que l’industrie bancaire doit se doter d’outils pour mieux protéger, faire valoir et monétiser la valeur de l’art. 40% des banques ayant répondu sensibilisent déjà leur clientèle au moyen de formations «art et finance» et 23% envisagent de le faire.

Développement de l’art lending ?

Parmi les collectionneurs, 41% voient une opportunité dans l’utilisation de leur collection comme collatéral pour des emprunts. 36% envisagent ainsi de passer le pas pour investir dans d’autres secteurs, 39% pour acheter d’autres œuvres et 18% pour refinancer d’autres emprunts. Devant une extension du marché de l’art lending, certains spécialistes américains (comme Emigrant Bank Fine Art) s’implantent en Europe.

Un indice de confiance en l’art, comme investissement ou comme garantie, est par ailleurs inauguré dans l’étude. Prenant également en compte la conjoncture économique des 12 prochains mois, cet indice démontre cette année que les acteurs du marché pensent que l’art comme classe d’actifs s’en tirera mieux que l’économie en général. En tout cas pour ce qui concerne l’investissement dans l’art, puisque les personnes sondées sont moins optimistes pour le développement de l’art lending dans les deux-trois prochaines années.

Baisse des prix et hausse du volume

L’indice de référence pour l’art, le Mei Moses Fine Art Index, fait lui valoir une baisse des prix aux enchères de 3,28% en 2012 et une performance en deçà du S&P index. Selon, l’étude Deloitte-ArtTactics l’art n’en reste pas moins un outil de diversification doté d’une faible corrélation avec les marchés d’actions.

Fort de cet atout, l’investissement dans l’art a globalement augmenté de 69% en 2012, poussé notamment par la demande du marché chinois. Les estimations font état de 1,62 milliard de dollars de volume de ventes contre 960 millions en 2011. De fait, les fonds, dont certains sont domiciliés au Grand-Duché (comme Art Collection Fund ou Anthea), continuent de lever plus de capitaux.

Une réussite, un échec

Le Freeport de Luxembourg, en cours de construction, constituera – à n’en pas douter – un outil déterminant, puisqu’il permettra de stocker les œuvres en limitant les frottements fiscaux en cas d’échange.

Parallèlement, la plateforme luxembourgeoise de «titrisation» d’œuvres, Splitart, marque un temps d’arrêt. Le rapport analyse: «Des irrégularités et des manipulations ont été constatées sur des plateformes d’échange en Chine et ont poussé le gouvernement chinois à intervenir. Les initiatives européennes, à Luxembourg et à Paris, ne se sont pas matérialisées, quoique celle de la capitale française soit en train de se relancer.»