Félix Braz a reçu les excuses formelles de l’ALJP, même si celle-ci maintient son opposition à la stricte limitation de l’accès au registre des bénéficiaires. (Photo: Sven Becker / Archives)

Félix Braz a reçu les excuses formelles de l’ALJP, même si celle-ci maintient son opposition à la stricte limitation de l’accès au registre des bénéficiaires. (Photo: Sven Becker / Archives)

«Traduttore, traditore» dit un proverbe italien – autrement dit, traduire c’est trahir. C’est ce qui s’est passé la semaine dernière lorsque la presse a couvert l’annonce par les ministres de la Justice et des Finances de la création des registres des bénéficiaires économiques et des fiducies en application de la directive AML4.

Lors de la conférence de presse d’annonce du futur dispositif, le ministre de la Justice a bien fait comprendre qu’il ne s’agissait pas d’ouvrir le registre au plus grand nombre – et a précisé que l’accès, d’après un intérêt légitime, n’était réservé qu’aux entités ou individus «nationaux». Exit l’ICIJ, artisan des révélations LuxLeaks et Panama Papers, à moins qu’il ne trouve un relais médiatique au Luxembourg.

L’Association luxembourgeoise des journalistes professionnels (ALJP) s’est émue d’une expression retranscrite dans la presse, à savoir la «curiosité maladive» attribuée par le ministre Braz au public comme aux journalistes. Une expression que le ministre dément, occasionnant un communiqué rectificatif de l’ALJP.

«L’ALJP s’excuse formellement de cette erreur regrettable», assure le syndicat, qui défend néanmoins son point de vue sur le fond. «Notre association maintient sa critique de la décision du gouvernement à ne pas rendre publiques ces informations, à l’instar de neuf autres pays membres de l’Union européenne.»

rectificatif de l'ALJP

Très attendu par la Place, surtout avec un retard dans la transposition de la directive AML4, le registre des bénéficiaires a été précautionneusement préparé par les ministères de la Justice et des Finances.

Fidèle à la règle de «transposer la directive, ni plus ni moins», le Luxembourg n’a pas été le plus téméraire en termes d’accès à ce registre de la part d’entités ou d’individus hors autorités fiscales et prudentielles et hors professionnels. Un accès limité aux «entités ou individus démontrant un intérêt légitime» à accéder au nom du bénéficiaire effectif d’une société enregistrée au Luxembourg, que le ministre Braz avait justifié par une «différence de culture» avec d’autres pays - scandinaves en l’occurrence - qui ont opté pour un registre ouvert au public.

L’ALJP avait trouvé «choquante» l’expression «curiosité maladive» prêtée à M. Braz. «Il n’y a pas de ‘curiosité maladive’ ni de la part du public, ni de la part des journalistes. La curiosité fait partie intégrante des devoirs des médias en tant que garants de la démocratie», soulignait l’ALJP.

Et de conclure de manière cinglante: «De la part d’un gouvernement qui doit en partie son ascension à la curiosité journalistique et au travail de la presse pendant les crises politiques qui secouèrent le pays en 2013, nous nous attendions à plus de respect pour notre profession», faisant référence aux révélations entourant les dysfonctionnements du Srel et l’affaire de la montre.