Jean-Marc Chiaradia, head of portfolio management Luxembourg, CapitalatWork Foyer Group. (Photo: Foyer Group)

Jean-Marc Chiaradia, head of portfolio management Luxembourg, CapitalatWork Foyer Group. (Photo: Foyer Group)

La géopolitique en premier plan, les promesses fiscales ne semblent plus un sujet. Le passage des cyclones a brouillé la lecture de la situation économique outre-Atlantique et il semble dès lors opportun de prendre un peu de hauteur pour évaluer la situation du pays de l’Oncle Sam.

La tempête «Harvey» a cyniquement permis à Donald Trump de lever l’incertitude sur le risque de paralysie de l’administration américaine. En effet, le nouveau président a annoncé un accord pour débloquer des fonds d’urgence en direction des victimes de la tempête. Pour financer ces aides, les démocrates ont accepté de monter le plafond de la dette afin qu’il ne soit pas atteint avant le 15 décembre 2017, date de début des vacances parlementaires de Noël. Un budget provisoire sera voté avant le 15 octobre pour l’année fiscale 2017/2018, qui devrait s’appliquer au moins jusqu’au 15 décembre. Faisant d’une pierre deux coups, le délai pour les négociations budgétaires a donc été prolongé de trois mois.

Depuis la prise de fonction du récent élu américain, son administration fait face à d’énormes difficultés pour mettre en place les mesures fiscales promises. L’échec des négociations sur une nouvelle loi pour remplacer l’Obamacare a fait douter les marchés d’une éventuelle réduction des impôts. Pourtant, bien que toute l’attention des médias soit tournée vers les décisions géopolitiques de D. Trump, la réforme fiscale est actuellement la priorité économique numéro un de la Maison Blanche.

Une diminution du taux d’imposition a, évidemment, un impact déterminant sur les bénéfices des sociétés. D’autres mesures sont aussi étudiées, notamment l’idée d’une déductibilité des dividendes. Couplé à un régime favorable de rapatriement des liquidités des multinationales américaines, le taux de distribution des bénéfices pourrait nettement progresser.

La croissance américaine atteint son potentiel théorique.

Jean-Marc Chiaradia

La croissance mondiale est très performante, l’économie américaine a crû de 3% au second trimestre. Les indicateurs de confiance sont toujours très bien orientés et continuent de flirter avec les plus hauts. Le «Beige Book» fait état d’une croissance modeste à modérée. Les dépenses d’investissement des entreprises sont en hausse. Le secteur de la construction reste en croissance et les mises en chantier sont à des niveaux cycliquement bas, surtout vu la faiblesse des stocks de maisons à vendre. La croissance américaine du troisième trimestre sera très probablement moins forte qu’au deuxième: les tempêtes ont paralysé une partie du pays, la production industrielle a déçu fortement et les ventes automobiles ont pénalisé les ventes au détail. Un effet de rattrapage est prévu pour le dernier trimestre de cette année.

La croissance américaine atteint son potentiel théorique et la baisse du taux de chômage est au niveau de plein emploi. Le scénario d’une accélération des prix à la consommation semble logique, pourtant force est de constater que l’inflation est maîtrisée.

Le récent discours de Janet Yellen, présidente de la Federal Reserve, confirme que l’inflation devrait rester sous la barre des 2% jusqu’en 2019. Momentanément, les ouragans pourraient créer quelques tensions sur les prix mais difficilement de manière structurelle. Le Federal Open Market Committee a préféré laisser les taux inchangés et a reporté la décision d’une potentielle hausse de taux à la fin de cette année. Le comité a décidé d’implémenter la réduction du bilan de la Federal Reserve de 10 milliards par mois et d‘augmenter le rythme tous les trois mois afin d’arriver à 50 milliards mensuellement dans un an. Ce début de réduction de la taille du bilan marque un tournant dans la  politique monétaire américaine. L’impact de cette décision est double, le dollar s’apprécie de quasi 1% à son annonce et les taux des obligations gouvernementales à 10 ans augmentent légèrement.   

La future direction de la Fed reste à définir

L’incertitude sur le renouvellement du mandat de Janet Yellen reste élevée. Après la démission surprise du vice-président de la Federal Reserve, quatre sièges (sur sept) seront vacants dès le début de l’année prochaine. Étant donné que les gouverneurs de la banque centrale sont nommés par la Maison Blanche pour 14 ans avec l’aval du Sénat, il s’agit d’une belle opportunité pour Donald Trump de placer des responsables pro-déréglementation du secteur financier et de modifier les rapports de force au sein du FOMC entre faucons (politiques restrictives) et colombes (politiques expansionnistes).

La banque centrale américaine poursuit lentement le retour à la normale de la politique monétaire américaine. L’incertitude réside dans le choix des futurs directeurs de la Fed. La principale surprise positive devrait venir des réformes fiscales de D. Trump qui pourraient avoir lieu avant la fin de l’année. Évidemment, les risques géopolitiques et autres chocs externes sont difficiles à intégrer dans des scénarios centraux.