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Tom Théobald, deputy CEO au sein de Luxembourg for Finance, à gauche, et Alain Hondequin, general counsel business clusters au sein de l’ABBL, à droite. 

Transformation digitale. Ces mots sont sur toutes les lèvres et plus aucun secteur, aujourd’hui, n’ignore la nécessité de négocier un virage qui recèle de réelles opportunités. Évidemment, la rapidité du changement dépend du domaine d’activité et du public qui a recours aux différents services proposés par les entreprises qui y sont actives. Ceci explique que la gestion de fortune – ou wealth management – n’a pas figuré parmi les précurseurs de cette transformation digitale.

«Nous assistons depuis quelques années à l’arrivée d’une nouvelle génération de clients dans le wealth management», assure Tom Théobald, deputy CEO au sein de Luxembourg for Finance. «Ces nouveaux clients, issus de la génération des millennials (nés entre 1980 et 2000), viennent d’hériter ou ont déjà construit leur propre fortune en développant, par exemple, un projet entrepreneurial. Ces profils veulent profiter de services digitaux très ‘user friendly’ et n’ont absolument pas pour habitude de rencontrer leur banquier une fois par semaine. La demande de nouveaux outils digitaux venant de cette clientèle est donc importante, même si on constate que des quadragénaires ou quinquagénaires commencent aussi à en exprimer le besoin.»

Même s’il s’agit d’un usage qui n’est pas propre au monde de la banque privée, le digital nous donne de nombreux outils pour gagner en efficacité.

Alain HondequinAlain Hondequin, General counsel business clusters (ABBL)

Mieux servir le client et améliorer son efficacité

L’amélioration du service au client et de son «user experience» figure au premier rang des atouts d’une transformation digitale réussie dans le wealth management. Mais celle-ci permet aussi de rationaliser son back-office. «Même s’il s’agit d’un usage qui n’est pas propre au monde de la banque privée, le digital nous donne de nombreux outils pour gagner en efficacité à ce niveau-là», explique Alain Hondequin, general counsel business clusters au sein de l’ABBL. «Je pense notamment aux solutions qui nous permettent de mieux gérer les procédures KYC (know your customer) et toutes celles qui nous sont imposées par les vagues successives de réglementations qui nous ont beaucoup occupés ces dernières années. Le digital fait gagner en efficacité.» 

Les réglementations de ces dernières années ont en effet eu tendance à accélérer la digitalisation des activités des banques privées. «Les différentes directives qui ont touché les établissements bancaires les années précédentes ont surtout eu pour conséquence d’augmenter les besoins en reporting», argumente Tom Théobald. «Il faut à présent justifier chaque décision auprès du législateur, mais aussi auprès du client. Une masse importante de données doit donc être gérée et, face à cet impératif, la digitalisation apporte vraiment une plus-value à l’industrie.»

L’humain plus que jamais au centre

Concrètement, la digitalisation dans le wealth management fait donc beaucoup appel à de la gestion de données et à de l’intelligence artificielle, notamment à travers les fameux robo-advisors, qui permettent de conseiller les clients ou même de gérer leur portefeuille de manière automatisée. Mais ce n’est pas la seule technologie qui a de l’intérêt.

«L’ABBL est en ce moment étroitement associée, ensemble avec la Fondation pour l’éducation financière et l’Université du Luxembourg, à un projet de recherche blockchain par rapport aux procédures KYC», explique par exemple Alain Hondequin. «Je ne peux pas encore en dire beaucoup plus, mais cette technologie devrait nous permettre de faire d’importantes économies d’échelle en mutualisant, en toute sécurité, les données des clients des banques privées.»

On a souvent tendance à dire que la digitalisation est un phénomène destructeur d’emplois.

Tom ThéobaldTom Théobald, Deputy CEO (Luxembourg for Finance)

Toutefois, là où le wealth management marque sans doute sa particularité, c’est dans la conséquence inattendue que l’usage de ces technologies a permis de constater dans le secteur. «On a souvent tendance à dire que la digitalisation est un phénomène destructeur d’emplois», explique Tom Théobald. «Or, on constate que ce n’est vraiment pas le cas dans le secteur du wealth management, car les clients accordent toujours beaucoup d’importance au rapport de confiance qu’ils peuvent avoir avec leur conseiller. En laissant les robo-advisors gérer les choses plus simples, les conseillers se concentrent mieux sur les dossiers complexes, qui sont précisément ceux que les banques privées au Luxembourg ont le plus tendance à gérer. Ceux qui, aux États-Unis notamment, ont mis en place un modèle entièrement automatisé sont d’ailleurs revenus en arrière. Le rapport humain est irremplaçable dans ce secteur, et il risque de le rester encore dans le futur.»