La mise en circulation de bus 100% électriques aboutit à une collaboration constante entre constructeur et opérateur pour gérer au mieux l’autonomie des batteries, selon Romain Kribs, attaché de direction de Voyages Emile Weber. (Photo: Mike Zenari)

La mise en circulation de bus 100% électriques aboutit à une collaboration constante entre constructeur et opérateur pour gérer au mieux l’autonomie des batteries, selon Romain Kribs, attaché de direction de Voyages Emile Weber. (Photo: Mike Zenari)

Monsieur Kribs, l’inauguration de la ligne 305, première ligne 100% électrique du pays, apparaît comme un premier pas vers la décarbonisation des transports en commun. Cela représente un coût. Quelle est la répartition précise de ce dernier?

Chaque bus coûte 450.000 euros, soit une différence de 150.000 à 200.000 euros par rapport à un bus classique de taille identique, et est pris en charge entièrement par l’État. L’infrastructure de rechargement, soit 700.000 euros, l’a été par le groupe Emile Weber. C’est un financement classique dans le cadre du réseau RGTR où l’acquisition est effectuée par l’opérateur, mais remboursée par le ministère du Développement durable et des Infrastructures. Nous sommes, pour notre part, rémunérés selon un calcul du nombre de kilomètres parcourus ou bien encore du nombre d’heures prestées. Donc par le service que nous fournissons. L’amortissement de ces véhicules est calculé, comme pour les autres, sur une durée de 10 ans, seul le prix de cet amortissement est adapté au coût d’achat.

Et qu’en est-il des batteries? Sont-elles incluses dans le contrat d’entretien des véhicules ou font-elles l’objet d’un contrat spécifique?

Nous avons opté pour un contrat d’entretien complet avec le constructeur (VDL, ndlr) qui court sur la totalité de la durée de l’accord, car les batteries représentent un risque potentiel qui ne peut pas être nié. Concrètement, et contrairement aux véhicules diesel, il y a une interaction constante avec le constructeur. Nous leur donnons notre retour d’expérience utilisateur et eux peuvent adapter leurs recommandations pour améliorer l’utilisation des capacités des batteries. Cela signifie également que nos mécaniciens sont formés pour cette technologie, tout comme nos chauffeurs qui doivent, encore plus que sur un diesel, rouler de manière intelligente.

Dans ce contexte, quelles sont les prochaines étapes pour le développement de cette flotte électrique au sein de votre groupe?

Pour l’avenir, nous y allons pas à pas. C’est un processus perpétuel, c’est la raison pour laquelle nous avons des discussions avec tous les constructeurs. Qui proposent tous des solutions différentes. Pour la ligne 290, qui relie Mersch à Luxembourg par exemple, nous travaillons avec la société espagnole Irisa qui prévoit une autonomie de ces véhicules de 200 à 220 kilomètres. Ce qui signifie que ces véhicules pourront circuler sans chargement intermédiaire comme c’est le cas pour les véhicules de la ligne 305.

D’autres véhicules électriques sont d’ores et déjà présents au sein du parc automobile du groupe, comme ceux des webtaxis. Quelle est la différence en termes de choix avec ceux présentés jeudi?

Les véhicules auxquels vous faites référence relèvent de la partie «privée» du groupe, à savoir que nous avons totalement la main sur les marques et les modèles que nous exploitons. Dans le cadre du réseau RGTR, les choses sont différentes. Nous achetons effectivement les véhicules, mais cela se fait non seulement avec le support du ministère, mais aussi en concertation. Dans ce cas précis, nous avions eu des contacts avec le constructeur et nous leur avons pratiquement organisé un rendez-vous place de l’Europe où ils ont pu présenter leur produit. Et le choix final est revenu au ministre qui a tranché sur la technologie, mais aussi sur la ligne desservie.

Romain Kribs

Romain Kribs, le 8 février 2018. (Photo: Mike Zenari)

Le choix de la ligne 305 n’est bien évidemment pas anodin, puisque cette ligne existe depuis cinq ans sur demande des entreprises des zones d’activités situées entre Bettembourg et Dudelange. C’est ce type de ligne qui devrait être privilégiée à l’avenir pour circuler en électrique?

La ligne 305 reliait effectivement à l’origine la gare de Bettembourg au zoning industriel, suite aux requêtes des entreprises actives qui emploient notamment des frontaliers qui se trouvaient encore assez éloignés de leur lieu de travail en arrivant à la gare. Maintenant, nous avons inclus Dudelange en raison de la demande, liée notamment à la présence du Laboratoire national de santé. Et vu le profil du parcours, avec une différence de seulement 88 mètres tout le long, le choix de l’électrique s’est imposé.

La prochaine ligne concernée sera donc la ligne 290, entre Mersch et Luxembourg…

Pour notre groupe, oui. C’est aussi une ligne existante qui est opérée par deux sociétés. La flotte de Voyages Ecker qui effectue pour le groupe le trajet sera partiellement électrifiée à partir de cet été et entièrement à partir de l’année prochaine. Le plan de développement imaginé par le ministère n’est bien évidemment pas un plan local, mais bel et bien un plan à l’échelle nationale, en prenant en compte le train ou le tram. Et dans ce contexte, les bus auront un autre rôle. À l’avenir, notre travail se fera plus en dehors de la ville de Luxembourg pour amener les voyageurs dans les pôles d’échange multimodaux.

Tracé de la ligne RGTR 290

Tracé de la ligne RGTR 290 (Crédit: Geoportal)

Et selon vous, cette organisation multimodale des transports est-elle une évolution naturelle ou d’autres solutions sont-elles envisageables?

C’est une question politique. Nous sommes opérateurs, nous sommes exécutants des décisions prises et tant que la possibilité nous est laissée de proposer nos services, nous n’allons pas chercher la petite bête. À titre personnel, je pense que les pôles multimodaux sont l’une des pistes à suivre, car le trafic n’est pas seulement généré dans les centres-villes. Il suffit de voir ce qu’il se passe sur les autoroutes…