Thomas Barra et Virginie Laye travaillent pour le Belval Office qui pilote l’installation de l’Université du Luxembourg à Belval. (Photo: Mike Zenari)

Thomas Barra et Virginie Laye travaillent pour le Belval Office qui pilote l’installation de l’Université du Luxembourg à Belval. (Photo: Mike Zenari)

Le site de Belval attend l’arrivée de l’Université du Luxembourg depuis longtemps. Quand l’Université a-t-elle commencé les actions concrètes autour de son déménagement et sous quelle forme?

Thomas Barra: «Il y a environ un an et demi, soit début 2014, l’Université du Luxembourg a créé une structure qui s’appelle Belval Office. Son objectif est de regrouper toutes les activités et initiatives de l’Université qui concernent la préparation du site et le déménagement, de manière à ce qu’un maximum de choses soient en place au moment de notre arrivée à Belval, et surtout que les aménagements correspondent à nos besoins. J’assure la coordination de cette organisation et travaille en collaboration avec les différents chefs de projet.

Pouvez-vous nous présenter les missions du Belval Office?

T. B.: «Le Belval Office a trois missions principales. La première est d’accompagner le développement des bâtiments, en collaboration avec le maître d’ouvrage qui est le Fonds Belval. Ainsi, nous pouvons influencer les aménagements nécessaires dans les bâtiments. Certains sont relativement simples, comme les bâtiments administratifs, d’autres beaucoup plus complexes car abritant des laboratoires spécialisés. Par ailleurs, l’Université est responsable d’une partie des aménagements intérieurs, notamment le réseau IT, le réseau de contrôle d’accès, le mobilier, l’équipement des laboratoires. Nous avons donc dû organiser les soumissions de marché pour ces domaines, et accompagner ces travaux. Notre troisième tâche est de préparer et d’accompagner le déménagement de l’Université sur le nouveau site.

Qui compose le Belval Office?

T. B.: «Le Belval Office est constitué de sept personnes qui sont toutes spécialisées dans leur domaine, comme Virginie Laye pour la communication et le change management, des experts IT spécialisés dans différents domaines, le responsable du facility management, un expert pour le budget, un autre pour le développement des bâtiments futurs. Pour ma part, j’en assure la coordination. On travaille également avec une équipe élargie qui compte une vingtaine de personnes, et qui se compose des chefs de projet de chaque bâtiment et des chefs de projet des sujets transversaux comme l’IT.

Quelles actions le Belval Office a-t-il mises en place?

T. B.: «Notre première tâche, la plus complexe et la plus importante, a été de donner une structure à la définition des besoins de l’Université. Comme l’Université s’est créée au même moment que la définition des programmes de construction des bâtiments, il était alors difficile de déterminer précisément nos besoins. Cette grande difficulté est à la source de certains problèmes d’adaptation des bâtiments que nous rencontrons aujourd’hui. Nous avons donc dû aller dans le détail de la définition des besoins et adapter encore autant que possible la Maison du savoir et la Maison des sciences humaines qui étaient déjà bien avancées dans leur construction.

Virginie Laye: «En plus de cette situation singulière, il ne faut pas oublier qu’une université est par essence une organisation qui est tout le temps en changement. Les projets de recherche sont des projets à court terme et tous les trois ou quatre ans, il faut se réinventer et aller dans le sens de l’innovation. Par ailleurs, les besoins d’infrastructure sont aussi fortement liés aux chercheurs présents à l’Université, et ces derniers sont très mobiles. Le Fonds Belval a donc fait réaliser des bâtiments les plus flexibles possibles dans leur utilisation intérieure.

T. B.: «Cette flexibilité est relativement bien mise en œuvre, mais il y a un élément qui réduit cette qualité, c’est le fait que nous ne disposions pas de l’ensemble des bâtiments initialement programmés. Suite à la crise financière de 2008, certains bâtiments ont dû être mis en suspens. Ceci a pour conséquence que les boîtes, aussi bien conçues soient-elles, perdent en flexibilité car sont trop remplies.

Justement, pouvons-nous faire un point sur les livraisons et occupations des bâtiments?

T. B.: «Nous occupons actuellement la Maison du savoir dont la partie verticale est occupée à 80% par l’administration de l’Université – d’autres centres de recherche vont occuper les 20% restants – et la partie horizontale est occupée par les salles d’enseignement. Nous occupons aussi la Maison des sciences humaines. Dans les bâtiments en cours de construction, il y a la Maison du livre, la Maison du nombre et la Maison des arts qui seront livrées fin 2016. Dans une prochaine phase, nous recevrons la halle d’essai pour les grosses machines de l’ingénierie. Puis il y aura les bâtiments que nous appelons en interne ‘L Nord-Sud’ qui sont surtout des laboratoires destinés aux ingénieurs, physiciens et travaux pratiques. Et sur le plan initial, il y avait encore d’autres projets pour l’ingénierie, au nord du site, qui ne sont pas oubliés, mais qui sont mis en attente jusqu’à ce que la situation économique et financière permette de les relancer.

Et en termes de nombre d’étudiants?

V. L.: «Pour septembre 2015, nous attendons 2.000 étudiants de la faculté des Sciences humaines. En 2016 suivront les autres facultés.

La rentrée approche, où en est le déménagement?

T. B.: «Après avoir travaillé quelques mois sur le site, mais dans un container, le Belval Office a été le premier service à entrer dans la Maison du savoir en janvier 2015. Nous avons ensuite occupé les 14e et 16e étages avec les équipes d’IT et de facility management. Maintenant nous organisons les déménagements des autres services. L’administration centrale a déménagé en trois vagues de 35 à 45 personnes entre fin mai et fin juin. Cet échelonnement permet d’assurer la continuité du travail. Le déménagement se passe le temps d’un week-end: les cartons arrivent le vendredi et les équipes techniques prennent le relais le samedi et le dimanche, pour que le lundi les personnes puissent récupérer un poste de travail fonctionnel. Entre chaque vague, nous opérons une pause de deux semaines pour ajuster les besoins et permettre aux équipes opérationnelles de récupérer.

V. L.: «Puis du 21 juillet au 4 septembre, c’est la faculté des Sciences humaines qui déménage. Là on parle de trois vagues successives, de 150 à 200 personnes. Comme nous sommes en période d’inscriptions, le service du secrétariat de la vie étudiante déménagera après les autres. Il faut aussi relocaliser les équipes de recherche qui sont déjà sur site. Au total, le déménagement court sur environ six mois.

En amont, avez-vous étudié les habitudes de travail des différents services et profité du déménagement pour apporter des changements?

V. L.: «Tout d’abord, il ne faut pas oublier que l’Université est la réunion de différents instituts qui existaient au préalable. On passe donc de trois campus ou plus, et autant de cultures différentes, à un site unique. C’est aussi un changement d’échelle et de contexte. Les campus en ville étaient de taille modeste, dans des bâtiments anciens et non conçus initialement pour accueillir une université. Au Limpertsberg, par exemple, nous étions dans un couvent. Ici nous sommes dans un site dédié, dans un contexte urbain très marqué. Nous allons donc devoir indéniablement changer de logique de travail. L’opportunité que nous avons avec ce déménagement est de trouver notre identité. Tous les étudiants vont être rassemblés sur un même site et on pourra mieux se rendre compte de la vie qui va pouvoir émerger de cette nouvelle communauté. Par ailleurs, nous avons un nouveau recteur depuis le mois de janvier, avec un processus de refonte de stratégie de l’Université, et une forte volonté de renforcer l’aspect interdisciplinaire de la recherche.

Avez-vous mis en place des actions de communication pour accompagner ce changement?

V. L.: «Bien sûr, notamment en termes de communication interne: nous avons souhaité que les aménagements intérieurs au sein des étages de la tour facilitent la communication. On se sert également des médias sociaux. Nous avons créé un blog dédié au projet Belval. Dès septembre 2013, nous avons intensifié la communication vers la préparation au déménagement  avec des visites guidées dans le bâtiment en cours d’achèvement. En début d’année, nous avons fait visiter les locaux aménagés et organisé encore de nombreuses rencontres. Comme le dit notre directeur administratif, ‘on déménage des gens, pas des cartons’. Ces rencontres en petits groupes ont permis d’aborder des questions pratiques. On utilise aussi les outils existants de l’Université, à savoir la newsletter et l’intranet. Nous avons également créé une brochure d’accueil qui est remise en mains propres à chaque personne le jour de son arrivée sur le site. Ce jour-là, les membres du personnel sont accueillis par des étudiants, qui leur font faire le tour, leur présentent leur bureau. C’est donc très humain.

Mais c’est quand même un grand changement d’ambiance…

T. B.: «C’est sûr que pour la première fois, nous allons pouvoir bénéficier d’un campus intégré dans un tissu urbain, relativement dense, ce qui va changer radicalement l’atmosphère du site de travail. Avec ce type d’aménagement urbain, les étudiants ne devraient pas quitter tout de suite l’Université pour rentrer chez eux, mais profiter des différents aménagements, des places publiques, des institutions culturelles, des commerces… Le tissu urbain invite à le faire.

V. L.: «Et il y a une identité forte qui se dégage. Peu d’universités peuvent se targuer de toucher à ce point l’histoire contemporaine.

Qu’en est-il de la mobilité?

V. L.: «C’est en effet un thème sur lequel nous avons beaucoup travaillé, car plus des deux tiers du personnel de l’Université voient leur distance pour rejoindre leur lieu de travail s’allonger. Même si entre 2011 et 2014, nous avons déjà remarqué une migration de notre personnel vers Esch et ses alentours, le premier foyer du personnel est Luxembourg-ville et alentours. Pour ces personnes, la solution du train est assez commode. Par ailleurs, nous avons travaillé avec le ministère du Développement durable et des Infrastructures pour améliorer la mobilité régionale. Nous souhaitons trouver des solutions pour éviter que les transports en commun ne passent systématiquement par Luxembourg et donc chercher des alternatives, notamment pour les personnes qui viennent du nord ou du nord-est. Si tout va bien, nous devrions pouvoir bénéficier de quatre nouvelles lignes de bus régionales à partir du mois de septembre en provenance de Trèves, Perl, Thionville et Arlon.

T. B.: «Nous essayons également d’améliorer la mobilité douce en agrandissant le réseau des pistes cyclables. L’Université met aussi en place un shuttle bus entre les différents campus tant qu’ils sont encore actifs. Enfin, nous allons mettre en place pour le mois de septembre une plateforme de covoiturage, d’abord interne à l’Université puis qui sera ouverte à l’extérieur. Avec ces actions, nous essayons d’adoucir les conséquences de cette situation. Mais je suis vraiment convaincu que venir à Belval est une bonne décision et que l’Université va pouvoir profiter de Belval, tout comme Belval va pouvoir profiter de l’Université.»

Parcours
Thomas Barra
Architecte de formation, Thomas Barra a rejoint l’Université du Luxembourg en 2014, spécifiquement pour s’occuper du projet Belval.

Il a travaillé précédemment pour l’architecte français Dominique Perrault avec qui il a collaboré sur les projets de la Cour de justice européenne au Kirchberg (au sein du bureau associé Architectes Paczowski et Fritsch) et du stade vélodrome-piscine olympique de Berlin. Il occupe depuis 2014 le poste de coordinateur du Belval Office.

Parcours
Virginie Laye
Enfant de la Grande Région, Virginie Laye est franco-allemande. Née en Sarre, elle a fait ses études à Nancy et à Lyon dans le domaine de la communication. Elle possède une expérience professionnelle principalement liée à la gestion de projet, et plus particulièrement dans le domaine de l’enseignement supérieur.

Précédemment, elle a travaillé à l’université en France et pour le ministère des Affaires étrangères français en Roumanie sur la coopération universitaire entre ces deux pays. Elle habite aujourd’hui à Trèves et travaille à l’Université du Luxembourg depuis un peu plus de cinq ans. Après y avoir occupé un poste de gestion de projet pour l’Université de la Grande Région, elle poursuit sa carrière aujourd’hui dans le domaine de l’accompagnement et de la gestion du changement. Rattachée au directeur administratif, elle intervient sur de grands projets qui demandent un accompagnement particulier pour le personnel, dont le projet Belval. «On n’a pas besoin de former les gens à un nouveau bureau, mais on a besoin de leur expliquer ce qui va changer et de tenir la motivation tout en faisant en sorte que lorsque les gens arrivent sur le nouveau site ils puissent être directement opérationnels.