Alex Bodry et Laurent Zeimet sont en désaccord sur l’abolition du cumul des mandats. (Photo: Maison Moderne)

Alex Bodry et Laurent Zeimet sont en désaccord sur l’abolition du cumul des mandats. (Photo: Maison Moderne)

Maintenant

«Nous avons besoin d’un parlement à plein temps» selon Alex Bodry, président du groupe parlementaire, LSAP

Dans son programme électoral, le LSAP se prononce clairement pour un statut du député à plein temps. Cela signifie que les députés se consacreront exclusivement à leur tâche de législateur et de contrôleur du gouvernement. Ils n’auront plus d’activité professionnelle parallèle. Ils ne pourront plus cumuler avec une fonction exécutive élective au niveau local. La tâche de conseiller communal, par contre, restera compatible avec la fonction de député.

Le lien entre le niveau national et communal est ainsi assuré. Le syndicat intercommunal représentatif du secteur communal Syvicol recevra un nouveau statut lui conférant des attributions comparables à celles des chambres professionnelles en matière législative.

Cette réforme contribuera à rendre plus efficace le travail à la Chambre des Députés. Elle permettra aux représentants du pays de se consacrer à 100% à leur tâche complexe qui nécessite une spécialisation accrue et un suivi régulier des dossiers législatifs européens.

Le Luxembourg ne peut plus se permettre le luxe de conférer à 60 députés travaillant à mi-temps l’immense mission d’évacuer une centaine de lois par an et de contrôler l’exécutif en permanence.Nous avons besoin d’un parlement à plein temps pour un travail à plein temps avec le recours à une expertise interne et externe indépendante du gouvernement. Sinon la notion de démocratie parlementaire sera vide de sens.

Cette réorientation permettra de limiter les cas de conflits d’intérêts.

Alex Bodry, président du groupe parlementaire, LSAP

Pour les communes les plus importantes, un statut de bourgmestre à plein temps me paraît également souhaitable. Face à l’administration, une certaine professionnalisation de la fonction de bourgmestre est de mise. Le statut légal du bourgmestre est à adapter en ce sens.

Une telle réforme globale s’inscrit d’ailleurs dans une tendance générale très forte au niveau international où le non-cumul des mandats est devenu la règle et le cumul l’exception.

Une telle réorientation permettra d’éviter ou de limiter les cas de conflits d’intérêts. Elle conduira également à une répartition plus large des fonctions électives ce qui renforce l’ancrage de la démocratie représentative dans la société.

Le projet de Constitution élaboré rend possible une telle refonte de notre système politique. Personnellement, j’ai anticipé ce changement en démissionnant fin 2014 de mon poste de bourgmestre de Dudelange pour me consacrer exclusivement à ma tâche de président de groupe à la Chambre: un choix que je n’ai pas eu à regretter.

À terme

«Revaloriser le mandat du député» selon Laurent Zeimet, député-bourgmestre de Bettembourg, est secrétaire général du CSV

Nous proposons l’incompatibilité de certains mandats, or une telle réforme sera encadrée par une réorganisation administrative et politique du pays. En effet, toute limitation des droits politiques doit être bien fondée et cohérente. D’abord, il faudra préciser quel cumul serait à abolir. Est-ce qu’on veut seulement empêcher les députés à exercer simultanément le mandat de bourgmestre ou tout mandat local c’est-à-dire que dorénavant ni un échevin ni un conseiller communal ne pourront siéger à la Chambre des Députés?

Il me semble que surtout les bourgmestres sont visés. Il est ainsi sous-entendu que les députés-maires n’arrivent pas à remplir leurs deux fonctions de manière diligente. Il est présumé qu’une certaine surcharge les empêche à accomplir leurs travaux parlementaires de façon rigoureuse. Il est indéniable qu’un député-maire se voit confronté à un défi. Il faut coordonner des calepins parfois divergents et savoir gérer son temps. 

Or ce défi est le même pour les membres du parlement qui exercent une profession indépendante. Seuls les élus-fonctionnaires sont «libres» de se concentrer à l’exercice de leurs mandats. Tandis que les députés issus du «secteur privé» disposent en principe d’un congé politique de 20 heures par semaine et sont ainsi contraints et bien conseillés à maintenir une vie professionnelle. Il est évident que le système actuel du cumul des congés politiques permet aux députés-maires, députés-échevins et députés-conseillers à se concentrer davantage sur leurs missions politiques. 

Un changement de système devra se faire par une réforme administrative et territoriale cohérente.

Laurent Zeimet, secrétaire général du LSAP

D’ailleurs je n’ai pu observer que les députés sans mandat local seraient d’office plus assidu ou mieux préparé lors des commissions parlementaires. Si on estime nécessaire d’abolir le cumul, il faudra dans un même temps revaloriser le mandat du député, donc accorder plus de congés politiques. Mais bien entendu, la Chambre risque aussi de perdre «l’expérience» du terrain que les élus locaux peuvent apporter lors d’une procédure législative. 

Ainsi pour le CSV un changement de système devra se faire par une réforme administrative et territoriale cohérente. Il importe de moderniser les communes avant de leur attribuer de nouvelles missions. Une réorganisation du niveau local va entraîner une coopération renforcée intercommunale et a fortiori une réduction du nombre des communes. Il s’ensuit que la fonction du bourgmestre devrait être adaptée et rehaussée. 

Afin de continuer à impliquer les bourgmestres dans le processus législatif, nous proposons de créer une «chambre des élus locaux». Une assemblée consultative regroupant tous les maires du pays qui par conséquent ne pourraient plus siéger en même temps à la Chambre des Députés.