Cindy Toilier, avocat aux barreaux de Paris et de Luxembourg, exerçant en droit social au sein du cabinet Castegnaro – Ius Laboris Luxembourg. (Photo: Castegnaro – Ius Laboris Luxembourg)

Cindy Toilier, avocat aux barreaux de Paris et de Luxembourg, exerçant en droit social au sein du cabinet Castegnaro – Ius Laboris Luxembourg. (Photo: Castegnaro – Ius Laboris Luxembourg)

Cindy Toilier, avocat aux barreaux de Paris et de Luxembourg, exerçant en droit social au sein du cabinet Castegnaro – Ius Laboris Luxembourg décrypte pour Paperjam une thématique sur le droit du travail: les dégâts causés par les salariés.

Constat

L’article L.121-9 du Code du travail instaure une dualité en matière de responsabilité dans le cadre de la relation de travail: l’employeur supporte les risques engendrés par l’activité de l’entreprise, et le salarié supporte les dégâts causés par ses actes volontaires ou par sa négligence grave.

Ce que devrait dire la loi

Les juges ont interprété cette disposition en retenant que la responsabilité du salarié n’est engagée qu’en cas de faute intentionnelle, ou dans l’hypothèse d’une faute lourde ou d’une faute/négligence particulièrement grossière, équivalente au dol, en ce sens que, si son auteur n’a pas voulu réaliser le dommage, il s’est comporté comme s’il l’avait voulu. Il ressort également de la jurisprudence que la négligence grave, telle que visée par l’article L.121-9 du Code du travail, consiste en un manque de prudence, de précaution ou de vigilance caractérisé.

Que faire?

L’engagement de la responsabilité du salarié nécessite en principe que l’employeur établisse non seulement la réalité des dégâts dont il entend faire supporter les frais à son salarié (par exemple, par des factures ou une expertise), mais également qu’il prouve que ces dégâts sont imputables à un acte volontaire ou une négligence grave de ce dernier, tels qu’interprétés par les juges.

À titre d’exemple, le fait, pour un salarié, de conduire en état d’ivresse le véhicule de service de la société a été considéré comme constituant une négligence grave du salarié. En revanche, le fait, pour un chauffeur, d’avoir omis de mettre le frein à main du camion stationné en pente, et qui a ainsi percuté de plein fouet un autre camion, occasionnant un dommage de plus de 5.000€, n’a pas été considéré comme étant de nature à engager la responsabilité du salarié, mais comme une simple inaptitude professionnelle dont les conséquences dommageables comptent parmi les risques engendrés par l’activité.

L’avis

Il convient d’être particulièrement vigilant quant aux situations dans lesquelles les dégâts causés par un salarié pourront valablement autoriser l’employeur à lui demander réparation, d’autant que les juges ont considéré que la reconnaissance par le salarié de sa responsabilité ou de sa dette envers l’employeur est sans effet. De même, une clause du contrat de travail qui aurait pour objet ou pour effet d’engager la responsabilité du salarié hors des cas visés à l’article L.121-9 du Code du travail serait nulle.

Certaines situations sont également plus spécifiques: quid du dommage à un véhicule de fonction mis à la disposition du salarié pour un usage à la fois professionnel et privé, causé dans le cadre d’une utilisation privée? Il semble que, dans cette situation, l’application de l’article L.121-9 du Code du travail devrait être exclue.