Jean-François Jacquet, chief investment officer chez Quintet Luxembourg. (Photo: Quintet)

Jean-François Jacquet, chief investment officer chez Quintet Luxembourg. (Photo: Quintet)

Alors que l’on observe depuis de nombreux mois une dégradation du secteur manufacturier, le secteur des services continue, lui, d’afficher une santé insolente. Quel présage faut-il voir dans ces indicateurs économiques contradictoires?

Les chiffres les plus récents en provenance des États-Unis en disent long. L’écart entre les indices ISM manufacturier et des services s’est creusé à un niveau inédit de près de 8 points. La même tendance est observée en Europe où, surtout à cause de l’Allemagne, le secteur manufacturier ne cesse de s’affaiblir alors que celui des services reste au beau fixe.

En Asie en revanche, et surtout en Chine, on observe plutôt une amélioration du secteur manufacturier. Si la Chine et l’Asie en général s’en sortent mieux, c’est probablement grâce aux mesures de relance chinoises et au commerce avec les États-Unis, qui se trouve stimulé par la phase 1 de l’accord commercial entre les deux superpuissances.

Ou peut-être s’agit-il simplement d’un rebond, alors que le point de départ était devenu extrêmement faible? Pourquoi l’Europe alors, et surtout l’Allemagne, ne profite-t-elle pas du même rebond? Certains analystes pointent la chute des exportations et de la production globale du secteur automobile allemand. Les dernières statistiques témoignent d’ailleurs d’un effondrement des commandes industrielles en Allemagne.

Le fossé se creuse

La question est cependant de comprendre jusqu’à quel point le fossé entre les secteurs manufacturier et des services peut continuer de se creuser. La croissance mondiale est bien sûr de plus en plus orientée vers les services, qui dépendent eux-mêmes beaucoup de la demande intérieure des consommateurs. Mais une récession plus profonde dans le secteur manufacturier ne peut tout de même pas rester sans conséquence pour le reste de l’économie? À moins qu’il ne s’agisse d’une vision trop pessimiste des choses et que le secteur manufacturier finisse par rebondir et s’aligner sur celui des services.

Pour que ce dernier scénario se produise, il faudrait cependant davantage de preuves d’une amélioration tangible, comme une augmentation des commandes et inventaires qui témoignerait d’un optimisme accru des entreprises. Un phénomène déjà à l’œuvre dans certains pays.

D’autres statistiques macroéconomiques donnent également des signaux de plus en plus contradictoires.
Jean-François Jacquet

Jean-François Jacquetchief investment officerQuintet Luxembourg

D’autres statistiques macroéconomiques donnent également des signaux de plus en plus contradictoires et ne manquent pas, à certains égards, de nous laisser perplexes. Aux États-Unis, par exemple, où la relation inverse traditionnellement observée entre taux de chômage et taux de défaut sur les crédits à la consommation semble s’être inversée. On assiste en effet aujourd’hui à une augmentation de ce taux de défaut alors même que le chômage n’a jamais été aussi bas.

Notre interprétation est qu’il s’agit là d’un comportement erratique des statistiques économiques, classique d’une fin de cycle, et que si cette instabilité macroéconomique ne s’est pas encore traduite par davantage de volatilité dans les marchés, ce n’est probablement qu’une question de temps…