«Les frontaliers doivent, pour les revenus de 2019 et les prochains, remplir le formulaire 2042C et cocher la case 8SH et/ou 8SI», explique Gilles Sturbois, directeur au sein du cabinet d’expertise fiscale Atoz. (Photo: Shutterstock)

«Les frontaliers doivent, pour les revenus de 2019 et les prochains, remplir le formulaire 2042C et cocher la case 8SH et/ou 8SI», explique Gilles Sturbois, directeur au sein du cabinet d’expertise fiscale Atoz. (Photo: Shutterstock)

La France a confirmé fin septembre l’exonération des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine des contribuables affiliés à un régime de sécurité sociale dans un pays membre de l’Espace économique européen. Les frontaliers sont donc concernés.

Cinq ans après l’arrêt de principe rendu par la Cour de justice de l’Union européenne visant à priver la France du droit de prélever des contributions sociales sur les revenus du patrimoine des personnes affiliées auprès de caisses étrangères de sécurité sociale, le Conseil d’État français a entériné cette exonération fin septembre dernier.

«Cela concerne donc tous les travailleurs frontaliers, car ils sont affiliés auprès des caisses de sécurité sociale du pays où ils sont employés. Les frontaliers français travaillant au Luxembourg, en Belgique, en Allemagne ou encore en Suisse peuvent demander à être remboursés», explique Gilles Sturbois, directeur au sein du cabinet d’expertise fiscale Atoz.

Des recours juridiques jusqu’à la CJUE

Pour le financement des retraites, l’administration fiscale française avait mis en place les fameuses CSG (contribution sociale généralisée) et CRDS (contribution au remboursement de la dette sociale), «des prélèvements sociaux qui ont la particularité de s’appliquer notamment sur les revenus du patrimoine (revenus locatifs ou plus-value)», ajoute Gilles Sturbois.

La problématique des travailleurs frontaliers est qu’ils contribuent dans le pays où ils travaillent. «Ils ne peuvent pas cotiser dans deux pays différents. La France a pourtant continué à appliquer les contributions sociales sur leurs autres revenus. Certains contribuables ont compris qu’il y avait un problème, il y a donc eu des recours juridiques qui sont allés jusqu’à la CJUE, qui a rendu cette décision en 2015.»

La déclaration de 2018 encore modifiable

Les contribuables ont désormais la possibilité de bénéficier d’une rétroactivité sur les revenus du patrimoine perçus depuis 2015. Mais ils n’ont que jusqu’au 31 décembre pour envoyer leurs réclamations. À partir du 1er janvier 2019, l’exonération ne pourra s’appliquer qu’à partir des revenus de 2016.

«Les frontaliers peuvent encore modifier leur déclaration d’impôts pour 2018 et devront, pour les années suivantes, remplir le formulaire 2042C et cocher la case 8SH et/ou 8SI.» Pour envoyer leurs réclamations et obtenir la restitution des prélèvements sociaux payés entre 2015 et 2017, deux adresses ont été spécialement mises en place par les directions départementales des finances publiques de Moselle et de Meurthe-et-Moselle: [email protected] et [email protected].

Des justificatifs de cotisation à l’étranger

«Plus de 4.000 contribuables frontaliers domiciliés en Moselle ont déposé des réclamations pour obtenir la restitution des prélèvements sociaux payés entre 2015 et 2017 sur les revenus du patrimoine», explique un communiqué de l’association des Frontaliers Grand Est. Ils seraient plus de 700 en Meurthe-et-Moselle.

Pour ce faire, «les frontaliers doivent transmettre des justificatifs de cotisation à l’étranger, comme une attestation d’affiliation de la sécurité sociale luxembourgeoise. L’administration française va calculer le montant d’impôt à rembourser, ils vont extourner les prélèvements sociaux, et calculer les intérêts moratoires sur ces montants», poursuit Gilles Sturbois. Les retraités qui étaient affiliés à un régime de sécurité sociale dans un pays membre de l’Espace économique européen entre 2015 et 2018 peuvent aussi être remboursés.

Une «bonne nouvelle» nuancée

Le directeur au sein d’Atoz nuance toutefois cette «bonne nouvelle» pour les frontaliers. «Certes, c’est effectivement le cas dans l’immédiat, mais les frontaliers sont finalement dans leur droit, et il faut garder en tête qu’avec ce remboursement, c’est autant d’argent qui n’ira pas dans les caisses de la sécurité sociale française, donc certes, les frontaliers vont avoir un avantage, mais c’est un jeu à somme nulle à la fin, donc le fisc français devra aller chercher cet argent ailleurs.»