Vanessa Müller, Country Managing Director chez Accenture. (Photo: Maison Moderne)

Vanessa Müller, Country Managing Director chez Accenture. (Photo: Maison Moderne)

Si les préoccupations actuelles des consommateurs concernent de plus en plus leur impact social, sociétal et environnemental, cette prise de conscience est vraie aussi dans le secteur financier et dans l’industrie des fonds d’investissement. Les différents acteurs de ce domaine commencent à intégrer cet élément-clé dans leur stratégie. Rencontre avec Vanessa Müller, Country Managing Director d’Accenture Luxembourg.

«Lorsque nous discutons avec nos clients dans le secteur des fonds, les asset managers ou asset servicers, nous avons souvent les mêmes retours. Leurs clients exigent un accès à des produits permettant d’avoir un impact autre que financier, à savoir un impact sur l’environnement, le social…, accompagné d’une transparence accrue sur ces investissements.»

Afin de répondre à ces attentes, l’industrie des fonds d’investissement, à l’instar d’autres industries, opère un virage vers la finance durable. Celle-ci devrait d’ailleurs devenir un élément stratégique pour leur fonctionnement dans les prochaines années. «Une des tendances-clés pour les mois et années à venir concerne ce sujet (voir ). Les clients attendent un recalibrage de la façon dont ils perçoivent le monde et de leur place dans celui-ci. Dans le secteur financier et dans celui de l’industrie des fonds, le profit à long terme reste crucial, mais d’autres facteurs deviennent importants pour mesurer le succès.»

Il faut bien entendu veiller à ne pas faire, par exemple, la promotion de fonds socialement responsables, ou qui ont un impact environnemental positif, sans être capable d’identifier et de comprendre réellement les entreprises dans lesquelles ces fonds investissent.
Vanessa Müller

Vanessa MüllerCountry Managing DirectorAccenture

Bon nombre de dirigeants d’entreprise, toutes industries confondues, semblent aujourd’hui conscients du rôle du monde des affaires dans la mise en œuvre des 17 objectifs de développement durable érigés par les Nations Unies (voir l’étude Accenture «»). Malgré l'opportunité de la durabilité, les dirigeants pensent que l'exécution n'est pas encore à la hauteur. Ils estiment que le changement systémique est essentiel pour influencer la communauté des affaires au sens large, afin de réaliser de réels progrès par rapport aux objectifs mondiaux. «Dans l’industrie de fonds, il faut également intégrer ces attentes, ce qui n’est pas si évident à mettre en œuvre lors de la fabrique de fonds.» Pour Vanessa Müller, une analyse approfondie est nécessaire. «Il faut bien entendu veiller à ne pas faire, par exemple, la promotion de fonds socialement responsables, ou qui ont un impact environnemental positif, sans être capable d’identifier et de comprendre réellement les entreprises dans lesquelles ces fonds investissent. Cela requiert une analyse stricte des sociétés et la collecte et l’analyse des données pertinentes pour ce faire. Ce qui est vrai à la création, mais également tout au long du suivi du produit.»

Cette démarche globale et complexe s’applique à toute la chaîne de valeurs, y compris les fournisseurs et l’écosystème des entreprises investies. Elle représente donc un enjeu majeur pour le secteur. «Il faut avoir le bon niveau de compréhension et d’information pour s’assurer que les produits proposés répondent réellement aux attentes et que les impacts produits soient bien ceux recherchés par les clients.»

Accompagner ce virage de la finance durable

«Outre les études que nous menons régulièrement pour bien comprendre les attentes des clients finaux de nos propres clients, mais également la vision des dirigeants par rapport à ces sujets, de nombreuses discussions portent aujourd’hui sur la mise en place au sein des assets managers, ou asset servicers, de services dédiés à la finance durable. Des questions légitimes se posent quant à la place de ces initiatives au sein de l’entreprise, la gouvernance et le mode opératoire. Mais également sur la capacité existante ou les partenariats technologiques tactiques, nécessaires à la bonne capture et à l’analyse des données-clés par exemple. De même, nous constatons que les acteurs qui réussissent aujourd’hui sont ceux où le sujet est porté par les plus hautes instances de l’entreprise.»

La Commission européenne mène de nombreux travaux afin d’aboutir à des objectifs, des définitions, des critères et des lignes de conduite communs. C’est quelque chose qui nécessite encore d’être relayé et intégré par les différents acteurs et de suivre son processus de maturation.
Vanessa Müller

Vanessa MüllerCountry Managing DirectorAccenture

En pratique, la mise en place de ces nouvelles stratégies reste néanmoins encore timide. «La Commission européenne mène de nombreux travaux afin d’aboutir à des objectifs, des définitions, des critères et des lignes de conduite communs. C’est quelque chose qui nécessite encore d’être relayé et intégré par les différents acteurs et de suivre son processus de maturation. Cela est impératif pour que les différents acteurs sachent quelles sont leurs obligations, et quel est leur champ d’action.» La mise en œuvre des résultats de ces études pourrait bien être un facteur décisif pour achever l’amorce de ce virage.

Le Luxembourg, un exemple mondial?

Pour Vanessa Müller, le Luxembourg, avec son industrie des fonds d’investissement, est une place de choix pour montrer l’exemple. «La diversité des acteurs, toutes industries confondues, et leurs centres de décision. La dynamique de l’État, portée sur la mobilité et les efforts climatiques à l’image de décisions récentes fortes. La stabilité de la réglementation, avec l’appui de la CSSF. Les associations de professionnels du secteur financier, à l’image de LuxCMA, qui se penchent sur ces problématiques. Des acteurs pionniers, comme la plate-forme LGX de la Bourse de Luxembourg. Le tout combiné peut avoir une puissance assez importante. Sur une place comme le Luxembourg où l’on peut profiter de l’expertise et de la proximité des acteurs, de réelles synergies peuvent se créer au profit des clients finaux.»