Rita Knott: «Les rôles changent. Les exigences changent, y compris dans le secteur public.» (Photo: Patricia Pitsch/Maison Moderne)

Rita Knott: «Les rôles changent. Les exigences changent, y compris dans le secteur public.» (Photo: Patricia Pitsch/Maison Moderne)

Après 26 ans de carrière dans le secteur bancaire, Rita Knott donne une nouvelle impulsion à sa carrière en 2008 en créant sa propre société. L’entrepreneuse a fait du mentoring de leadership, entre autres, une vocation. Entretien dans le cadre de notre série #FemaleLeadership. 

Vous aviez 49 ans lorsque vous avez fait le pas de la reconversion professionnelle, en reprenant des études, puis en créant votre société de coaching-mentoring-consulting… Aujourd’hui encore, vous poursuivez de nouvelles études…

. – «C’est beau de voir que l’être humain a cette faculté de ‘s’auto-actualiser’ (bien souvent dans des crises), d’approfondir ses compétences ou de rebondir sur autre chose pour ouvrir les horizons. Réaliser que l’on peut trouver sa place dans beaucoup de rôles professionnels, c’est fascinant.

De plus, le travail a de l’importance, pas uniquement du point de vue économique, de la satisfaction personnelle, mais aussi au niveau de l’image que l’on donne de soi-même à la société à laquelle on veut également apporter quelque chose.

Qu’est-ce qui a été le déclic pour réorienter votre carrière après 26 ans d’exercice en tant que, notamment, directrice RH et numéro 2 de la banque où vous travailliez? 

«Je pense qu’à l’époque, j’avais tout vu. J’ai passé les différents niveaux hiérarchiques pour devenir numéro 2 d’une petite banque.

Je trouvais que c’était important de couronner ma carrière avec des projets qui me tiennent vraiment à cœur, c’est-à-dire le mentoring. Accompagner les personnes dans le rôle professionnel, c’est quelque chose qui me fascine.

Votre rôle est d’accompagner les hommes et les femmes cadres, pourquoi ce choix?

«Les rôles changent. Les exigences changent, y compris dans le secteur public. Le monde change. Le monde du travail aussi. Avec la digitalisation, l’autonomisation des tâches, les changements sur le lieu de travail peuvent être parfois dramatiques. Le rôle du leadership change aussi.

Ces changements peuvent toucher la culture de l’entreprise, son fonctionnement… Prenons l’exemple de Google par exemple, c’est un modèle où le travail d’équipe est privilégié, un modèle beaucoup plus plat, avec moins de hiérarchie. Certaines organisations abolissent totalement la hiérarchie.

Ma mission est d’accompagner les personnes du leadership pour qu’elles puissent faire leur transformation de manière ‘durable’. Les contextes du mentoring sont tous uniques: la promotion de soi-même, le rôle du leadership en temps de crise, une reconversion, développement des soft skills…

Je transmets mes connaissances pour accompagner les personnes dans leurs missions de leadership.

Rita KnottDirectriceRita Knott Coaching Mentoring Consulting

Deux personnes ont eu un impact sur votre réorientation. En quoi ont-elles influencé le cours de votre carrière?

«Il y a eu Dalia Kaizerman, elle était à l’époque la directrice de la banque israélienne où je travaillais (Hapoalim).

Mme Kaizerman était mon chef direct. C’est elle qui m’a encouragée à entreprendre de nouvelles études il y a 15 ans. C’est elle aussi qui m’a poussée à postuler pour devenir le numéro 2 de la banque. Un poste que je ne visais pas et que j’ai finalement décroché. J’y ai vraiment été comme un poisson dans l’eau.

L’autre personne qui a joué un rôle important, c’est le président du conseil d’administration à cette période-là, Barry Ben Zeev. Il m’a donné pas mal de feed-back, m’a guidée dans ce nouveau rôle de secrétaire du conseil d’administration. 

Sans ces personnes, vous ne vous seriez pas lancée?

«Certainement. Elles ont été déterminantes. Ces personnes m’ont transmis des choses que je ne pourrais jamais leur rendre. À mon tour, par mon métier, grâce à ma société, je transmets mes connaissances pour accompagner les personnes dans leurs missions de leadership.

La thèse que j’ai réalisée à la fin de mes études (en 2006) portait sur un programme de mentoring que j’ai conduit au Luxembourg pour la première fois en 2005 et 2006. J’ai constitué ma société au Luxembourg en 2008.

Une carrière est faite de choix et de personnes qui influencent notre route…

«Absolument. Et c’est quelque chose de très bénéfique que ces personnes puissent donner une autre vision que l’on a de nous-mêmes.

Après, est-ce qu’on prend ou pas ces conseils ou opportunités? C’est de l’ordre de la décision de chacun.

Vous l’auriez peut-être quand même fait seule?

«Je ne pense pas. Je pense que les femmes, comme les hommes certainement, qui atteignent des postes haut placés en leadership ont eu un rôle modèle. Ce modèle permet de s’identifier pour se réaliser et rester authentique.

Un conseil d’administration doit aussi apporter des idées.
Rita Knott

Rita KnottDirectriceRita Knott Coaching Mentoring Consulting

Dans le temps, mon père ne voulait même pas que je passe le bac. Il avait une vision de la femme, épouse, au foyer et qui ne travaille pas. J’ai grandi avec cette idée.

Mais ma mentor a été pour moi un modèle, conjuguant brillamment son rôle de mère et d’épouse avec son rôle de leader. Son désir d’aider les autres, de les accompagner aussi, c’est une qualité qui m’a beaucoup touchée.

Ce qui vous plaît aussi, c’est de gérer de plus petites structures. Pourquoi?

«J’ai été directrice RH pendant 12 ans dans une structure de 45 personnes. Ce qui m’intéresse aujourd’hui, ce sont de plus petites structures, très agiles, avec lesquelles on peut avoir beaucoup d’impact. J’ai par exemple cofondé une autre société, SineMuris. Une société de coaching international basée à Londres et que l’on a dû déménager récemment à Berlin à cause du Brexit.

Avec plusieurs collaborateurs, nous accompagnons des organisations internationales pour du coaching en leadership ou pour le développement des organisations vers des structures plus agiles ou en transformation. En latin, ‘sine muris’ signifie sans murs. Le but est d’abattre les murs et de faire en sorte que les gens communiquent mieux ensemble via le coaching ou le développement de l’organisation. Le tout pour plus d’efficacité.

Via l’asbl MCMC, nous menons des programmes à vocation sociale à destination de différents publics.
Rita Knott

Rita KnottDirectriceRita Knott Coaching Mentoring Consulting

Selon vous, comment se construit un conseil d’administration?

«Ce qui compte avant tout, c’est de voir ce dont on a besoin dans un conseil d’administration. Un conseil d’administration doit aussi apporter des idées, une stratégie. Il se construit en fonction d’un contexte aussi. La structure d’une maison d’édition n’a pas les mêmes besoins que celle d’un hôpital. Dans tous les cas, la diversité est très importante: femmes/hommes, juniors/seniors, porteurs d’un handicap/non-handicapés, connaissance de marché/gestion des risques. Les rôles et compétences sont aussi importants, certains sont plus conservateurs et d’autres orientés innovation par exemple. Certains auront des compétences techniques et d’autres plus théoriques.

L’outil co-développé par le professeur Martin Hilb, qui porte le nom de ‘Diversity Optima’, illustre bien ce panel de diversité nécessaire à un conseil d’administration. Cet économiste d’origine suisse dit que ‘la diversité doit être optimale selon les besoins de l’organisation’.

Quand une catégorie de personnes, pour quelque raison que ce soit, est sous-représentée (moins d’un tiers du groupe), c’est difficile d’avoir une voix et de vouloir adhérer à un groupe. Dans le secteur de l’éducation, il y a plus de femmes.

La question de la représentation des hommes peut se poser. Dans un comité de direction avec une sous-représentation des hommes (moins d’un tiers), il se peut que ce soit également difficile pour eux de faire entendre leur voix.

Renforcer les liens entre le monde du travail et le réseau scolaire.
Rita Knott

Rita KnottDirectriceRita Knott Coaching Mentoring Consulting

En plus de votre activité commerciale, vous avez développé une série de programmes de mentoring, subventionnés, notamment à destination des jeunes. Dans quel but?

«Nous menons des programmes à vocation sociale à destination de différents publics via l’asbl MCMC (Maison du coaching, mentoring et consulting), cofondée en 2010 avec ma fille, psychologue de formation.

Pour ce programme à destination des jeunes, nous travaillons avec différents lycées au Luxembourg. Nous accompagnons les lycéens dans leur choix, plus réfléchi, sur leurs études/objectifs professionnels.

Certains jeunes ont moins de réseau au Luxembourg. C’est pourquoi le but est aussi de renforcer les liens entre le monde du travail et le réseau scolaire.

Les mentors sont tous bénévoles…

«Pour ces programmes d’accompagnement gratuits pour les bénéficiaires, nous avons besoin de beaucoup de mentors. Ils sont en effet tous bénévoles. Ça me tient à cœur de souligner leur engagement. Leur geste est très altruiste. Tous travaillent de manière à développer tout le potentiel des mentorés. Nous formons également les mentors pour leur apprendre leur rôle, où il commence et où il se termine.

Dans le but aussi de permettre aux mentorés de garder une autonomie. Le mentoring se définit sur une période de temps et en fonction des objectifs de la personne, par rapport au développement de son rôle/potentiel. Que le programme soit commercial, social ou sociétal, ça reste une transmission d’expérience par les mentors, d’outils qui fonctionnent.

C’est de la bienveillance de la part de quelqu’un qui veut aider cette autre personne qui cherche un soutien. Ce transfert entre deux êtres humains, peu importe le contexte, que cela se fasse dans un programme officiel ou pas, c’est beau. Je trouve que c’est très important, surtout à l’heure où tout est mesuré, tout coûte quelque chose.»

Rita Knott en trois dates :

- 2001: nomination en tant que directrice adjointe d’Hapoalim Luxembourg SA - 2008: création de Rita Knott Coaching Mentoring Consulting - 2019: déménagement de la société SineMuris de Londres à Berlin