Michèle Detaille, présidente de la Fedil. (Photo: Matic Zorman / Archives)

Michèle Detaille, présidente de la Fedil. (Photo: Matic Zorman / Archives)

Que nous réserve 2020? Paperjam s’est risqué à l’exercice de la prospective avec le concours d’experts de différents secteurs de l’économie, de la finance et de la société civile. En ouverture de cette série, Michèle Detaille évoque un triptyque essentiel pour l’avenir du pays.

Soucieuse de rester sur le terrain des entreprises que je représente en tant que présidente de la Fedil, je me permets de limiter mes propos sur la modernité aux thèmes que nous traitons prioritairement dans notre organisation, à savoir les talents, la transformation digitale et la transition énergétique.

Placer le Grand-Duché sur la voie de la modernité signifie, entre autres, que notre pays devra faire preuve de progrès sur un tas de chantiers qui ont trait à ces sujets prioritaires. Je voudrais aborder ici quelques-uns de ces chantiers et proposer des façons de progresser.

En relation avec les talents

La modernité est souvent une expression de progrès technologique. Le progrès technologique repose sur des efforts de recherche, de développement et, finalement, sur l’innovation. Notre société aura besoin de scientifiques, d’ingénieurs, de techniciens, d’informaticiens et d’entrepreneurs pour accélérer ce progrès, tout en répondant aux grands défis de notre époque.

Pour motiver les jeunes à suivre des carrières dans les domaines précités, il faut arriver à leur donner le goût des technologies, faire naître un sentiment de responsabilité et un désir de relever les défis les concernant directement. Cela passera aussi bien par la curiosité innée que par une réelle motivation à contri­buer­ au développement de solutions aux problématiques actuelles et futures.

L’attrait et la rétention de talents sont devenus des questions cruciales pour le bon développement de nos entreprises à court, à moyen, et à long terme. La modernité dans les relations de travail jouera un rôle non négligeable dans l’attractivité du pays et de son économie. Permettre l’éclosion de nouvelles formes de travail et adapter la division du travail en tirant profit des technologies modernes, favoriser une conciliation saine entre vies familiale et professionnelle, en donnant aux entreprises les options et les moyens nécessaires pour assurer une organisation du travail à la hauteur des attentes des différents intervenants, sera primordial.

Digitalisation

Notre pays devra garder l’ambition de se classer parmi les plus avancés en matière de digitalisation. L’implantation de centres de données, de larges capacités de traitement des données, ainsi que de solutions d’intelligence artificielle – le tout dans le respect des principes de protection des données personnelles et avec un haut degré de cyber-­résilience­ – sera synonyme de modernité.

Je parlerai ici non seulement des infrastructures et des moyens à mettre en œuvre dans cette stratégie de digitalisation, mais également de la réalisation concrète.

Le degré d’avancement du pays dans le domaine de l’e-government­ est l’expression par excellence du degré de modernité du pays. Chaque citoyen, chaque entreprise, chaque visiteur fera l’expérience de l’e-governement et de la simplification administrative qui l’accompagne. Chaque acteur jugera du degré de modernité sur la base de son expérience dans ce domaine.

Toujours au niveau de la digitalisation et dans un domaine qui m’est évidemment très cher, l’industrie, la modernité, sera synonyme de l’implémentation avancée de l’automatisation et des solutions de l’industrie 4.0 dans un business model qui repose sur les principes de l’économie circulaire. Cette économie circulaire sera favorisée et accélérée grâce aux avancées en matière de digitalisation et à la pratique de nouveaux critères et modèles de financement. Les finances durables deviendront un catalyseur. Le Luxembourg a intérêt à répéter sa success-story de pionnier en la matière, par exemple en préparant dès maintenant la mise en œuvre du paquet européen sur les finances durables, et ce en consultant tous les acteurs économiques impactés, y compris ceux de l’économie réelle.

Transition énergétique

Les finances durables vont évidemment alimenter la transition vers un modèle de croissance plus respectueux des ressources naturelles et pauvre en émissions de gaz à effet de serre. S’agissant de la transition énergétique, le degré de modernité dépendra de la vitesse et de l’intensité d’adaptation de nos modes de consommation, de nos outils de production et de notre stock de bâtiments. Être modernes, c’est répondre à nos ambitions écologiques avec nos industries et en gardant de bonnes performances économiques. À l’inverse, une réalisation de nos objectifs écologiques moyennant une délocalisation des émissions ou autres problèmes serait synonyme de régression.

L’avancée en matière de mobilité sera également une étiquette très visible d’un pays qui se veut moderne. Le Luxembourg sera un terrain de test idéal dans ce domaine. Le Grand-Duché ne devra pas se limiter à combler des retards d’investissement, mais avoir l’ambition d’organiser et de mettre en œuvre les offres de mobilité de demain, répondant aux besoins et aspirations de la population et des entreprises dans le respect des objectifs écologiques.

Les expériences positives doivent être répliquées rapidement et en quantité.
Michèle Detaille, présidente de la Fedil

Michèle Detaille, présidente de la Fedil

Les entreprises, les collectivités et les décideurs politiques doivent se doter des moyens nécessaires pour affronter les défis du développement durable et répondre aux critères de modernité. Parmi ces moyens, on trouvera, tout d’abord, la capacité intellectuelle de comprendre les défis et de cerner les interrelations pour ainsi pouvoir développer des solutions industrielles dans les domaines où la modernisation doit se faire à une vitesse grand V.

L’enseignement fondamental et secondaire, l’Université et les centres de recherche seront à l’origine de cette distribution de la connaissance, et représentent la bonne base, le vivier du patrimoine intellectuel national. Le Grand-Duché aura également besoin d’impulsions et d’une volonté pour oser le nouveau et pour partager les expériences. Les expériences positives doivent être répliquées rapidement et en quantité.

À la Fedil, nous voulons favoriser cette évolution qualitative et durable. Elle passera notamment par un travail d’encadrement efficace: distiller et transiter les informations utiles, favoriser les échanges entre industries, mais également entre industries et partenaires publics, pour ainsi accélérer le développement qualitatif de notre pays, pour ses habitants, ses entreprises et son environnement.