Arnaud Despinoy (Photo: Jan Hanrion/Maison Moderne)

Arnaud Despinoy (Photo: Jan Hanrion/Maison Moderne)

Parce que la violence conjugale ou familiale n’est pas acceptable, parce que la violence est souvent la seule réponse des auteurs alors qu’il en existe d’autres auxquelles ils n’ont pas accès, parce que la violence ne peut pas se réparer qu’avec des mots, parce que le corps aussi revendique: ce qui était permis (toléré) hier ne le sera plus demain.

Suite à un acte de violence ou tout autre crime ou délit, une médiation entre l’auteur et la victime peut être mise en place en fonction de chaque situation qu’il convient d’évaluer. L’intérêt du face-à-face est double: il permet à la victime d’exprimer son ressenti et d’entendre les explications, sinon les excuses de l’auteur. D’autre part, il permet à ce dernier de comprendre le mal qu’il a fait et de prendre conscience des raisons pour lesquelles il a agi ainsi. Ce travail permet enfin, dans la plupart des cas, de prévenir les récidives.

Les personnes doivent être prises en charge par des accompagnants professionnels interdisciplinaires, dès lors que la situation conflictuelle prône l’usage de la violence comme unique réponse. Mais pour tenter de rétablir la communication avec l’autre, il faut d’abord rétablir la communication avec soi-même. Se reconnecter à soi pour retrouver l’énergie, la force, les ressources intrinsèques pour entendre l’autre et pouvoir lui dire la souffrance qui jusqu’alors s’exprimait par les coups, qu’ils soient moraux, psychologiques ou physiques.

Quand l’accompagnant a les compétences nécessaires, il prépare les médiés à la confrontation tant redoutée, dans un esprit de bienveillance et de sécurité pour chaque partie. L’accompagnant saura sortir de sa zone de confort pour parvenir à accompagner celles et ceux qui en ont besoin, il saura faire passer les intérêts des parties avant les siens, en toute indépendance, neutralité et impartialité.

Au sortir des écoles, le manque de maîtrise du processus, et parfois même l’enjeu de la situation confiée (l’un pouvant influencer l’autre), occulte toute vision thérapeutique du processus pour ne finalement se centrer que sur le déroulé du processus et l’objectif du médiateur. Pour quelques médiateurs, la finalité des entretiens individuels réside dans l’aboutissement des médiés à accepter l’entretien collectif. «Yes, ils ont dit OUI, c’est bon, j’ai fait le job.» Sans se soucier des conséquences psychologiques sur les personnes.

Une jeune femme se bat pour la garde de sa fille face à un ex-conjoint atteint de troubles cognitifs. Ces troubles étant le plus souvent exacerbés par la consommation d’alcool qui le rend parfois agressif et violent. Cette jeune femme a toujours refusé la confrontation par peur d’excès de violence. La préparation de ces deux personnes à l’entretien de confrontation a pris du temps. L’engagement du médiateur doit être plein et entier. Il faut bien prendre en compte dans cette situation que la médiation est potentiellement un acte pouvant accentuer l’aspect traumatique de la situation pour la jeune femme. Ne pas prendre en compte cet aspect de la situation revient à mettre la personne en danger, face à son agresseur mais surtout vis-à-vis d’elle-même.

La préparation des personnes à la médiation consiste à s’assurer qu’elles sont prêtes à cela. Qu’elles sont OK avec ce qui les amène à vouloir le faire, d’une part, et qu’elles ont les ressources nécessaires pour pallier le déferlement d’émotions et de violences qui pourraient se manifester lors de la confrontation. Mais aussi pour appréhender l’après-médiation. Ce qui sous-entend qu’elles se soient confrontées à leurs peurs, leurs craintes, leurs réticences et qu’elles aient pu développer toutes les ressources psychologiques (grâce à la thérapie ou autre travail sur soi) et physiologiques (grâce au développement corporel) nécessaires pour y faire face. Tout ceci est le fruit d’un long travail de préparation.

En synthèse, de nombreuses solutions existent, mais aucune n’associe à ce jour Thérapie, Médiation et Développement Corporel, dans un accompagnement unique et interdisciplinaire: une autre forme de médiation thérapeutique réparatrice, réelle stratégie intégrative, conceptuelle et corceptuelle, intra- et interpersonnelle, appliquée aux relations dysfonctionnelles, afin de proposer aux personnes une plus grande autonomie mentale, psychologique et physiologique.

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