Arrivés au Luxembourg en 2014 chez Caceis, Benjamin Agostini et ses associés ont lancé en début d’année TheSafeBox, pour les amateurs de vins. Décollage début juin et à l’ICT Spring. (Photo: Benjamin Agostini)

Arrivés au Luxembourg en 2014 chez Caceis, Benjamin Agostini et ses associés ont lancé en début d’année TheSafeBox, pour les amateurs de vins. Décollage début juin et à l’ICT Spring. (Photo: Benjamin Agostini)

Alors que Dom Pérignon a signé avec Lady Gaga, que Glenfiddich, Sarah Jessica Parker ou le premier grand cru classé bordelais, Château Angélus, ont mis les pieds dans le plat du NFT, la luxembourgeoise TheSafeBox coche des cases qui manquent à ce mouvement de fond.

Champagne, alcools de légende, grands crus: le monde du «À consommer avec modération», souvent considéré comme un des plus stables pour les investisseurs, est en train de basculer dans l’univers virtuel des NFT avec la soif d’un Bédouin perdu dans le désert. Les «non-fungible tokens» sont des titres propriétés modernes, appuyés sur une blockchain qui rend leur circulation plus simple et moins chère.

De Dom Pérignon – qui a vendu uniquement sur le marché français 100 coffrets en édition limitée de son millésime 2010 et de son rosé 2006 «designés» en collaboration avec Lady Gaga – à Glenfiddich – qui a mis en vente un rare single malt de 1973 à 18.000 dollars et un rhum colombien Dictador de 45 ans d’âge, en carafe Lalique, à 25.000 dollars – en passant par Sarah Jessica Parker, la star de «Sex and the City», et ses NFT d’Invivo X, son vin néozélandais, ou encore les Coréens du Sud de Blinkers, présents récemment au Finverse de The Dots et Deloitte pour parler de leurs NFT pour contourner la loi coréenne d’investissement dans le vin et de la première Banque du vin, chacun a sa solution pour tirer profit de ces produits d’exception.

Car l’indice de  référence, le Liv-ex Fine Wine 1000, qui suit les 1.000 vins et champagnes les plus prestigieux au monde, a atteint un nouveau record en fin d’année, porté par la demande en champagne et par les vins de Bourgogne, signe de caves d’investisseurs qui se sont diversifiées.

Traçabilité et stockage sécurisés

Français comme ses quatre associés, Benjamin Agostini, arrivé chez Caceis en 2014, a passé la frontière début janvier pour installer au Luxembourg, «un écosystème qui semble se diriger vers la promotion des projets cryptos», indique-t-il par téléphone alors qu’il est déjà reparti sur les routes de Bourgogne.

La difficulté, pour les amateurs éclairés ou les néophytes excités, est de mettre la main sur une bonne bouteille. «Les producteurs ont déjà leurs propres réseaux de distribution. Les Meo Camuzet de Vosne-Romanée n’arrivent qu’à raison de trois bouteilles au Luxembourg», illustre-t-il, même si l’on connaît le goût de certains restaurateurs pour aller discrètement à la source... «Et même quand vous y avez accès, souvent, vous ignorez si vous n’êtes pas face à une contrefaçon ou par quels intermédiaires la bouteille est passée, et comment elle a été stockée.»

Les blancs de Grèce seront les futurs grands vins blancs du monde.»

Benjamin Agostinicofondateur de TheSafeBox

TheSafeBox a donc cherché à rassurer les producteurs. «Vous vendez une bouteille… qui va voir son prix multiplié par six, sept, dix, sans que jamais vous ne voyiez une partie de cette hausse vous revenir», explique l’entrepreneur. «C’est un peu frustrant. Ensuite, comment suivre votre produit? Enfin, les grands crus sont des éléments de négociation avec les distributeurs, et il faut en lâcher pour les voir écouler la production.»

Avec Paul Aegerter, à la tête de sa propre maison de négoce et de production, à Nuits-Saint-Georges depuis 1988, les deux hommes utilisent la blockchain Polygon, pour répondre à tous les défis… et un château à Beaune pour y stocker toutes les bouteilles de TheSafeBox. «80% de l’espace de stockage y seront consacrés. Nous irons chercher les bouteilles une par une pour les amener là et assurer nos clients des meilleures conditions de stockage.»

80 derniers tokens à 3.000 euros

Le projet, déjà en ligne, a vu les 40 premiers Infinity tokens s’arracher. À 2.500 euros pièce, ils assurent à leurs propriétaires – le premier cercle des entrepreneurs pour créer un mini-écosystème de passionnés – un accès privilégié aux bonnes bouteilles des grandes maisons. Les 80 suivants seront en vente début juin pour 3.000 euros pièce. «Même ceux qui ne sont pas familiers avec l’environnement des wallets et des cryptos peuvent y participer en nous contactant directement. Nous avons monté un partenariat avec Kalart.io pour répondre à cette demande», explique M. Agostini.

Comme dans les projets de Stokr ou de VNX au Luxembourg, TheSafeBox amène de la liquidité au marché, en permettant à ses 120 clients d’accéder aux bouteilles, de les conserver comme un placement aux performances qui font pâlir nombre d’autres produits d’investissement, ou de le céder sur un marché secondaire, plus ouvert. Sur ce dernier, 10% de la vente reviendront au producteur. Si quelqu’un veut boire sa bouteille, il le peut, le NFT est détruit.

17 vignerons déjà conquis

Les premières ventes auront lieu début juin, puis dans le cadre de l’ICT Spring, et 17 vignerons producteurs ont déjà accepté d’apporter leurs flacons dès la fin des vendanges, chaque saison.

«Nous discutons évidemment avec des maisons bourguignonnes ou bordelaises, mais aussi en Espagne et en Italie. Voire en Grèce ou aux États-Unis», assure l’entrepreneur avec gourmandise. «Les blancs de Grèce seront les futurs grands vins blancs du monde. On devrait s’en apercevoir dans quatre à cinq ans.»

Les 120 premiers clients de cette start-up pour l’instant autofinancée par l’intérêt de ces amateurs de vin n’auront pas qu’accès aux meilleurs crus, mais aussi à des soirées, des événements de dégustation. «Ce projet digital ne peut pas rester digital. Il doit aussi proposer des choses physiques», assure-t-il, presque à contresens de ceux qui veulent croire que le metaverse est l’avenir de tout.