La secrétaire d’État au Trésor, Janet Yellen, a déclaré au Brussels Economic Forum que la coopération entre les États-Unis et l’Europe doit dépasser le cadre de la seule réponse à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. (Photo: Shutterstock)

La secrétaire d’État au Trésor, Janet Yellen, a déclaré au Brussels Economic Forum que la coopération entre les États-Unis et l’Europe doit dépasser le cadre de la seule réponse à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. (Photo: Shutterstock)

De passage au Brussels Economic Forum, la secrétaire d’État américaine, Janet Yellen, a exposé les priorités de Washington dans sa stratégie de coopération avec l’Union européenne.

Depuis 20 ans, la Commission européenne organise son annuel Brussels Economic Forum (BEF), rassemblant décideurs politiques, académiques et représentants du monde des affaires ainsi que de la société civile, pour échanger sur les défis de l’économie européenne. L’édition 2022 du BEF, ce 17 mai, s’est ouverte par une conférence donnée par la secrétaire d’État américaine au Trésor, Janet Yellen.

Dans son intervention d’ouverture, Janet Yellen a voulu mettre l’accent sur le partenariat transatlantique pour faire face aux incertitudes économiques et géostratégiques. «Alors que tant de choses sont incertaines, une chose que nous avons en notre pouvoir est la capacité de fournir une coopération réelle et efficace pour garantir un monde plus prospère et durable pour la prochaine génération des deux côtés de l’Atlantique.»

Une coopération que Janet Yellen décline en cinq thèmes économiques principaux.

La Russie et l’Ukraine

En guise d’illustration de la coopération entre l’Europe et les États-Unis, elle n’hésite pas à citer le fait de «mettre fin à la guerre brutale de Vladimir Poutine contre l’Ukraine et son peuple». Les États-Unis, l’Europe et leurs partenaires, «qui représentent bien plus de la moitié de l’économie mondiale», par leurs sanctions, «ont permis d’imposer des coûts et des limites importants à la Russie». Le but étant de dégrader la capacité de la Russie à poursuivre la guerre et «à projeter sa puissance dans les années à venir.»

Soulignant que ces mesures de rétorsion ne sont pas motivées par la politique étrangère ou des objectifs économiques, l’ancienne présidente de la Réserve fédérale américaine (Fed) précise que «nous veillons à ce que la Russie ne puisse pas dresser certains d’entre nous contre d’autres». Janet Yellen ne cache d’ailleurs pas la stratégie de l’administration Biden «pour pousser la Russie plus loin vers l’isolement économique, financier et stratégique» en cas de poursuite de la guerre en Ukraine par la Russie. «Le Kremlin sera contraint de choisir entre soutenir son économie et financer la poursuite de la guerre brutale de Poutine.»

Alors que, le 29 avril, Joe Biden a appelé le Congrès américain à fournir une manne financière de 33 milliards de dollars à l’Ukraine, Janet Yellen encourage l’Europe à poursuivre ses efforts de financement de Kiev.

La sécurité énergétique et le climat

«Je félicite les dirigeants européens pour leur proposition d’éliminer progressivement tous les approvisionnements énergétiques russes dans un délai de six mois», a déclaré la secrétaire d’État, expliquant que «la Russie utilise l’énergie comme arme (…) contre ceux qui s’opposent à son agression».

L’Europe devant alors se tourner vers les États-Unis et d’autres partenaires, Janet Yellen s’est montrée consciente: «nous assisterons probablement à une augmentation du charbon et d’autres combustibles fossiles». Ce qui ne l’empêche pas de mettre en exergue l’importance d’investir dans les énergies renouvelables: «Plus la perturbation actuelle perturbera – plus nous disons non au pétrole russe de manière agressive – plus il deviendra naturellement rémunérateur de passer aux énergies renouvelables.»

La Chine, les terres rares et les semi-conducteurs

L’approvisionnement énergétique n’étant pas le seul défi de souveraineté stratégique, l’ancienne présidente de la Fed explique que «nous avons depuis longtemps accepté une dépendance importante vis-à-vis de la Chine pour l’approvisionnement en terres rares». Ces dernières comportant «des intrants vitaux» pour bon nombre d’industries, Janet Yellen rappelle que «la Chine est responsable de 60% de l’exploitation minière des terres rares et de près de 40% des réserves».

Outre les terres rares, «la Chine construit une part de marché conséquente dans certains produits technologiques et cherche une position dominante dans la fabrication et l’utilisation des semi-conducteurs», précise Janet Yellen. Elle estime d’ailleurs que «la Chine a eu recors à diverses pratiques commerciales déloyales pour parvenir à cette position». Face à ce constat, sa secrétaire d’État invite les Européens à collaborer davantage en ce sens: «La Chine est plus susceptible de réagir favorablement si elle ne peut pas monter l’un de nous contre un autre.»

L’accord fiscal international

Un autre exemple de la coopération transatlantique, aux yeux de Janet Yellen, est l’accord fiscal international que 137 pays ont rejoint en octobre 2021. «Cet accord n’aurait pas pu avoir lieu sans une étroite coordination entre les États-Unis et l’Europe.»

Alors que le pilier 2 de cet accord établit un taux global d’impôt d’au moins 15% sur les sociétés multinationales, c’est surtout le pilier 1 qui semble le plus délicat, à entendre Janet Yellen: «Le pilier 1 de cet accord, axé sur la taxation des services numériques, met un terme aux tensions commerciales entre l’UE et les États-Unis qui menacent nos entreprises de multiples niveaux de taxation et nos consommateurs de la hausse des tarifs.»

L’architecture sanitaire mondiale face aux prochaines pandémies

Finalement, Janet Yellen mentionne la pandémie de Covid-19 qui «a coûté des millions de vies, des milliards de dollars en perte de production économique et a gravement affecté les systèmes de santé». Selon elle, «cela a révélé à quel point nous n’étions pas préparés». Elle exhorte donc à «améliorer l’architecture sanitaire mondiale pour renforcer notre résilience face aux futures pandémies».

Pour ce faire, elle indique que les pays du G20 et d’autres partenaires se sont engagés à «soutenir un fonds intermédiaire financier en tant que mécanisme flexible pour aider à combler les lacunes dans les investissements du système de santé aux niveaux national, régional et mondial». À cet égard, «nous comptons sur un soutien européen fort pour lance ce mécanisme de financement cette année», a-t-elle conclu.