La pandémie s’est imposée et a bouleversé le quotidien, y compris des sociétés, obligeant les législateurs à intervenir afin de garantir la sécurité juridique; ce faisant, elle a eu un rôle d’accélérateur dans divers domaines. Il est nécessaire de profiter de ces avancées et d’aller au-delà.

L’impact de la pandémie sur la tenue des assemblées et autres réunions

Depuis mars 2020, en raison des restrictions de voyages et de rassemblements pour cause de pandémie, en l’absence de règles spécifiques dans les statuts des sociétés, le législateur est intervenu rapidement afin de garantir la sécurité juridique et permettre à toutes les sociétés de tenir leurs assemblées générales et les réunions des organes de gestion sans réunion physique. Cette mesure en vigueur jusque fin 2021 devrait être prolongée jusque fin 2022. Or, au-delà de 2022, les AG virtuelles seront-elles une solution à l’érosion constatée de la participation des actionnaires aux AG? D’un point de vue technique, toute AG est un forum où tout actionnaire, même détenant une seule action, peut rencontrer les dirigeants, poser des questions, participer aux débats pour ensuite exprimer son vote.

Néanmoins, des voix s’élèvent contre la pérennisation des AG virtuelles au-delà des circonstances extrêmes actuelles. La flexibilité actuelle devrait rester un événement ponctuel et non un changement définitif, au motif que l’AG en présentiel permet des déclarations publiques sans filtre de la part des sociétés, empêche les dirigeants de se retrancher derrière la technologie en étant accessibles devant chaque actionnaire, et qu’elle encourage au vrai débat et dissuade les sociétés de tenter de minimiser (d’écarter) certains problèmes ponctuels (ou non).

À l’inverse, certains pays (États-Unis, Royaume-Uni, etc.) connaissent une croissance exponentielle des AG virtuelles, car les outils existent pour garantir l’exercice actionnarial, assurant de la sorte une plus grande participation des actionnaires, avec parfois plusieurs AG par jour, souvent mieux détaillées, tout en permettant des économies de coûts importantes pour les sociétés.

La solution passera par un développement, dans nos pays, de la technologie devant garantir un exercice sans faille des droits des actionnaires, mais aussi par des échanges lors de débats, une réflexion sur les conditions de tenue des AG devant créer la confiance des actionnaires et des entreprises, et sans doute un changement de mentalité des proxy advisors.

La nécessaire protection des investisseurs et des entreprises à l’ère des conseils d’investissement sur les réseaux sociaux

En plus des traditionnels professionnels de la finance et les moins glorieux vendeurs à découvert (vadeurs), sont apparus, suite à l’explosion des réseaux sociaux, les influenceurs, pour qui les recommandations sont une publicité facile et rémunérée.

Or, le régulateur européen a rappelé dernièrement que recommander ou suggérer une stratégie d’investissement, y compris une opinion sur des valeurs, au public est une recommandation d’investissement, qui peut donc être sanctionnée par les règles relatives aux abus de marché, en raison du risque pour les investisseurs, qui, dans certains cas, se répercute dramatiquement sur les émetteurs.

Le comportement des vadeurs, couplé à l’utilisation des réseaux sociaux sans contrôle, rend impérieuse l’intervention des régulateurs, afin de protéger les émetteurs. Les vadeurs, par leur positionnement et leur influence, recommandent, même silencieusement, des stratégies d’investissement dans l’unique dessein de détruire de la valeur au préjudice des investisseurs et des émetteurs. Les vadeurs profitent ainsi allègrement des réseaux sociaux, du manque de cohérence au niveau européen, voire de l’absence de règles nationales, pour engranger des bénéfices significatifs tout en générant des pertes parfois colossales du côté des investisseurs et émetteurs.

Les influenceurs, eux, sont essentiellement concentrés sur les recommandations en matière de crypto-actifs, potentiellement très dangereuses pour leurs communautés, qui considèreront ces recommandations comme paroles d’Évangile.

Ces comportements et les réseaux sociaux rendent obligatoire une approche européenne cohérente urgente.
Pierre-Alexandre Degehet

Pierre-Alexandre DegehetPartnerBonn Steichen & Partners

Ces comportements et les réseaux sociaux rendent obligatoire une approche européenne cohérente urgente, le règlement relatif aux abus de marché ne permettant pas toujours une protection suffisante.

La difficile mais nécessaire conciliation entre une économie plus responsable et la philosophie des marchés financiers

Les préoccupations environnementales et sociales renforcées au gré des différentes crises financières et maintenant sanitaires sont ancrées au cœur des politiques des investisseurs, qui exigent des investissements plus responsables et durables.

Les critères ESG impactent le monde des affaires, mais particulièrement les sociétés cotées soumises à des impératifs de transparence et de communication. C’est pourquoi celles-ci doivent dorénavant veiller à intégrer ces critères dans leurs stratégies globales, et ensuite communiquer utilement sur les changements et démontrer comment les activités tiennent compte des critères mis en vigueur.

Les critères ESG impactent le monde des affaires, mais particulièrement les sociétés cotées soumises à des impératifs de transparence et de communication.
Pierre-Alexandre Degehet

Pierre-Alexandre DegehetPartnerBonn Steichen & Partners

Les disparités en matière de politique d’investissement ESG sont encore grandes, mais les investisseurs se positionnent dans le cadre d’une réflexion globale, parallèlement aux entreprises, qui accélèrent la cadence en matière de transparence et d’information des marchés.