«Nous ne sommes pas Live Nation», explique le directeur général de l’asbl Francofolies Esch-sur-Alzette.  (Photo: Maison Moderne)

«Nous ne sommes pas Live Nation», explique le directeur général de l’asbl Francofolies Esch-sur-Alzette.  (Photo: Maison Moderne)

Programmé du 8 au 12 juin prochain, le festival des Francofolies d’Esch-sur-Alzette va connaître sa véritable première édition. Avec l’enthousiasme – mais aussi les petits désagréments – que cela peut engendrer. Loïc Clairet, son directeur général, en parle.

À quelques jours du début du festival, comment se présentent ces Francofolies 2022?

Loïc Clairet. – «La situation est plutôt bonne, même si nous n’avons pas encore atteint le niveau que nous souhaitions en termes de vente de tickets. Même si cette dernière a tendance à s’accélérer avec la proximité grandissante de l’événement et le retour des beaux jours. Même si nous pouvons accueillir confortablement jusqu’à 6.000 personnes par jour dans le parc du Gaalgebierg (où se dérouleront les trois principales soirées du festival, du vendredi 10 au dimanche 12 juin, ndlr), on tablait sur 2.000 à 2.500 personnes journalières. Et nous y arrivons petit à petit. Désormais, nous avons dépassé le total des 6.000 tickets vendus.

Cela sonne quand même comme une déception quand on voit les noms à l’affiche, non? On se souvient qu’un PNL avait attiré 6.500 personnes lors de son dernier passage à la Rockhal ou que 3.000 spectateurs étaient venus applaudir la seule Clara Luciani en novembre dernier alors que le Covid-19 était davantage présent qu’aujourd’hui. Deux artistes qui font partie de vos têtes d’affiche…

«Nous n’avons pas la même typologie que la Rockhal. Cette dernière est devenue une institution au Luxembourg. Alors que nous, nous devons encore nous faire un nom, nous positionner en tant qu’acteur important. Trouver notre public aussi, rentrer dans les référencements, etc. Il faut du temps pour que le nom d’un festival soit assimilé par le public. On ne bâtit pas sa réputation en une journée. Ce n’est pas quelque chose que l’on peut créer comme un magicien sortirait un lapin de son chapeau. Nous ne sommes pas Live Nation, nous ne pouvons pas lancer un festival à coups de millions. Jamais, par exemple, nous n’avons visé attirer 10.000 festivaliers journaliers. Nos budgets restent raisonnables. Donc, on ne peut pas dire que nous soyons déçus.

L’affiche des Francofolies d’Esch 2022.  (Illustration: Francofolies)

L’affiche des Francofolies d’Esch 2022.  (Illustration: Francofolies)

Mais votre festival a un nom que le public connaît déjà. C’est un des avantages d’avoir obtenu le label des Francofolies…

«Il est connu, c’est vrai. Mais les gens ne l’associent pas à Esch. Pour eux, les Francos, c’est La Rochelle, Spa, etc. Il y a tout un travail de notoriété à mettre en place, afin de réussir à engendrer ce nouveau réflexe. Mais aussi créer toute une alchimie aussi autour de ce festival. Il ne faut pas oublier qu’après l’annulation de 2020 et la version extrêmement réduite proposée en 2021, 2022 sera notre véritable première édition.

Financièrement, vous arrivez à trouver l’équilibre avec ce niveau de (pré)ventes?

«Dans l’absolu, il nous faudrait un peu plus. C’est-à-dire, arriver pour chaque jour de festival à la barre des 3.000 festivaliers. Mais nous avons la chance d’être toujours bien soutenus par la ville d’Esch-sur-Alzette et quelques partenaires privés. Comme cela était déjà le cas ces deux dernières années, d’ailleurs. Le fait qu’Esch soit Capitale européenne de la culture en 2022 est aussi une donnée très importante. C’est un accompagnement considérable.

Notre budget? On peut l’évaluer entre 1,6 et 1,7 million d’euros, dont 1,2 à 1,3 million provient de subventions liées à la ville d’Esch.
Loïc Clairet 

Loïc Clairet directeur général asbl Francofolies Esch-sur-Alzette

De quel budget disposez-vous?

«On peut l’évaluer entre 1,6 et 1,7 million d’euros, dont 1,2 à 1,3 million provient de subventions liées à la ville d’Esch. C’est un vrai confort. Mais nous nous rendons bien compte que cela ne durera pas éternellement. Nous sommes aidés pour le lancement de ce nouvel événement, mais nous devrons, dans le futur, réussir à trouver notre propre équilibre financier.

Avez-vous discuté avec (CSV), le bourgmestre d’Esch, de sa vision pour ces Francofolies?

«Nous en discutons souvent. Il envisage un festival qui dure dans le temps. Cela donne une belle image à sa ville. Et puis, cela pourrait s’inscrire comme un de ses héritages à celle-ci, mais aussi à une commune qui est une des plus francophones du pays, par sa situation géographique. Ces Francofolies sont également un projet avec un vrai ancrage local. Nous travaillons en circuit court avec pas mal d’acteurs de la région. On peut même dire qu’il existe, à notre échelle, une vraie économie de festival sur Esch.

Je ne pense pas que l’avenir du festival dépende de la prochaine majorité politique à la tête de la commune.
Loïc Clairet 

Loïc Clairet directeur général asbl Francofolies Esch/Alzette

Craignez-vous les élections communales de 2023 et un possible changement de majorité?

«Je ne pense pas que l’avenir du festival dépende de la prochaine majorité politique à la tête de la commune. C’est une donnée importante, je n’en disconviens pas. Mais ce qui l’est davantage encore est de trouver notre premier public, prouver notre légitimité. Et si nous y arrivons, si nous surfons sur cette dynamique en 2023, cela transcendera alors la question politique.

Ce label des Francofolies, jusqu’à quand êtes-vous certain de le garder?

«Le contrat court encore pour un an, jusqu’à l’édition 2023. Mais tout est en très bonne voie pour que nous conservions ce label. Je peux même dire que je suis aujourd’hui sûr à 95% qu’il nous restera au-delà de cette date. Parce que notre projet plaît et qu’il coche les différentes cases qu’il faut pour l’obtenir.

À quel investissement financier consentez-vous pour l’acquérir?

«Contractuellement, je n’ai pas le droit de révéler les chiffres. Mais je peux quand même vous dire que c’est bien moins que ce qu’on peut imaginer pour une marque pareille.

Le label des Francofolies? Le contrat court encore pour un an, jusqu’à l’édition 2023. Mais tout est en très bonne voie pour que nous le conservions.
Loïc Clairet 

Loïc Clairet directeur général asbl Francofolies Esch/Alzette

Durant le week-end des Francos se déroulera, à Dudelange, un autre grand événement musical: , une organisation conjointe des salles de l’Atelier, Opderschmelz et du Gudde Wëllen. Soit deux événements majeurs à quelques kilomètres de distance. Une coïncidence qui peut surprendre…

«Nous avons appris par la presse qu’Usina22 se déroulerait le même week-end que nous. Nous savions que ce festival était dans les tuyaux, mais lorsque nous avions échangé avec ses organisateurs, bien avant les différentes annonces, ce n’était pas à ces dates-là qui étaient programmées…

Les organisateurs d’Usina22 ont, eux,

«Les Francofolies d’Esch sont toujours programmées le deuxième week-end de juin. Cela n’a pas changé. Le leur devait, par contre, se tenir une semaine plus tôt. Mais j’ai cru comprendre que leur tête d’affiche, les Américains de Kings of Leon, n’était disponible que le week-end du 11 juin… C’est dommage, même si ces deux événements ne drainent pas forcément le même public. Le monde musical luxembourgeois n’étant pas très grand, nous aurions dû mieux communiquer entre nous. Et si Usina22 perdure dans les années qui viennent, il faudra qu’on discute de la question des dates. Histoire que ce genre d’histoire ne se reproduise pas. En attendant, le grand gagnant, c’est le public. Il se retrouve avec une très belle offre. Une année exceptionnelle même, grâce à Esch2022.»