Les négociations autour de l’implantation d’Uber au Luxembourg se poursuivent autour de «la question de la vision en termes de mobilité», assure Jo Bertram. (Photo: Mike Zenari)

Les négociations autour de l’implantation d’Uber au Luxembourg se poursuivent autour de «la question de la vision en termes de mobilité», assure Jo Bertram. (Photo: Mike Zenari)

Madame Bertram, vous êtes présente au Convention Center dans le cadre de l’ICT Spring pour évoquer la question de la mobilité et la manière dont Uber l’imagine. Quelle est cette vision?

«Nous croyons que la propriété de la voiture personnelle fait partie du problème qui conduit à la congestion et à la pollution dans les villes, sans compter la question de l’espace consacré au parking. Nous croyons qu’il n’y a plus besoin de posséder une voiture individuelle à la condition d’avoir accès à d’autres options de mobilité. Si vous pouvez utiliser les transports en commun, les systèmes de vélos publics ou les services comme Uber, cela fonctionne. C’est un complément. Et les avantages que cela peut apporter aux villes peuvent être énormes, notamment pour éviter les embouteillages. Je sais que c’est un gros problème ici au Luxembourg, comme dans de nombreuses autres villes à travers le monde.

Cela signifie que les gens doivent changer leurs habitudes. N’est-ce pas la chose la plus difficile à faire?

«Je pense que nous pouvons réussir, mais pour cela, il faut que les gouvernements et toutes les parties prenantes fassent en sorte que ce soit un choix pour les consommateurs et non une contrainte. Nous avons constaté que ceux qui font ce choix le font lorsqu’ils ont accès à des moyens de transport fiables, abordables et sûrs. Aux États-Unis, par exemple, parmi nos clients qui ont moins de 30 ans, 10% d’entre eux assurent qu’ils ne prévoient pas d’acheter une voiture, car ils peuvent compter sur des services comme le nôtre aux côtés des transports en commun. Nous sommes au tout début de cette évolution, mais elle existe.

10.000 personnes ont voulu savoir si nos services étaient disponibles au Luxembourg.

Jo Bertram, responsable Europe du Nord d’Uber

En Europe, les pouvoirs publics travaillent à accroître l’usage des transports en commun. N’est-ce pas là la solution aux embouteillages?

«Absolument, c’est un élément-clé, mais cela ne peut être qu’une partie de la solution, car ils ne pourront jamais faire en sorte que tout le monde arrive devant sa porte. Une étude de l’université de Harvard indique que le facteur le plus influent dans le choix de vos habitudes tient dans le temps qu’il vous faut pour aller au travail ou à l’école. Ainsi, à Bruxelles par exemple, 30% des voyages effectués par nos chauffeurs commencent ou se terminent à quelques centaines de mètres des arrêts de transports publics. Donc les gens utilisent Uber pour leur premier ou leur dernier kilomètre.

Les discussions autour de l’arrivée d’Uber au Luxembourg ont été entamées. Cela arrivera-t-il dans les prochains mois ou à une échéance plus longue?

«Au cours des derniers mois, quelque 10.000 personnes ont voulu savoir si nos services étaient disponibles au Luxembourg et dans les environs. Nous aimerions donc répondre à la demande, sachant que le Luxembourg est un des pays qui possède l’un des taux les plus élevés de voiture personnelle par habitant au sein de l’Union européenne. Mais la question à l’heure actuelle tient avant tout dans la compréhension de ce qu’est la vision du Luxembourg en matière de mobilité ouverte et de voir la manière dont nous pourrions en faire partie. Nous sommes donc en discussion avec toutes les parties prenantes pour déterminer ce à quoi cela pourrait ressembler.

Nous sommes face à des textes qui ne tiennent pas compte de la technologie actuelle.

Jo Bertram, responsable Europe du Nord d’Uber

L’un des aspects de ces négociations concerne notamment la question des charges sociales et de l’impôt sur les sociétés alors que vous faites jusqu’à présent référence uniquement à une vision commune...

«C’est un tout. Des services comme Uber fonctionnent mieux quand nous pouvons collaborer avec les gouvernements et les autorités des transports et trouver vraiment quelque chose qui fonctionne à la fois pour la ville, mais également pour le marché local. Nous essayons donc de nous rencontrer et de discuter avec tous ceux qui pourraient être pertinents et impliqués dans un service Uber conséquent au Luxembourg afin de découvrir quelle sera la bonne solution.

Uber a été le premier à proposer un modèle très différent de ce qui était prévu par les réglementations. Et les discussions pour adapter les textes sont toujours en cours…

«Tout à fait. Au Royaume-Uni, par exemple, la loi la plus récente qui encadre notre secteur d’activité a été rédigée en 1998, donc avant l’existence des smartphones ou de Google Maps. Nous sommes face à des textes qui ne tiennent pas compte de la technologie actuelle. La question tient donc dans la mise en place de réglementations plus avancées qui tirent profit de tous les avantages des avancées technologiques. Notamment en matière de sécurité. C’est la raison pour laquelle notre application présente non seulement la photo du conducteur contacté, les informations sur son permis de conduire ou la possibilité de vérifier que le chemin emprunté est bien le plus court. Toutes ces choses apportent de la transparence et de la confiance dans ce processus, ce que ne permettent pas toujours actuellement les réglementations en vigueur.

Certains concurrents, ici au Luxembourg, ont essayé d’adapter leur modèle au vôtre pour tenter de contrer votre arrivée potentielle. Pensez-vous que ce modèle est le modèle à suivre pour les prochaines décennies?

«Je pense que c’est effectivement une partie de la solution, aux côtés des transports publics. Mais c’est formidable qu’il y ait de la concurrence, car elle bénéficie aux consommateurs. Les gens oublient souvent que la concurrence est aussi bonne pour les personnes qui veulent conduire et partager leur voiture, car ces dernières peuvent proposer leurs services à plusieurs plateformes ou opérateurs. Nous avons ainsi souvent observé sur les marchés sur lesquels Uber a fait son entrée qu’un plus grand nombre de développements ont vu le jour chez nos concurrents. Car ils doivent innover pour nous concurrencer.»