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Luc Courtois, partner au sein de Bonn Steichen & Partners. 

MiFID II

Les marges dans les opérations de gestion classiques des fonds sont sous pression. En cause: les derniers développements réglementaires, et plus particulièrement la transposition de la directive 2014/65/EU (MiFID II) impliquant (i) la prohibition de certaines commissions («inducements»), (ii) l’augmentation des coûts de compliance dus aux obligations de protection des investisseurs et de surveillance ainsi que de reporting, et (iii) les obligations de transparence imposant la fourniture aux clients de plus d’informations pour pouvoir comparer les prix et les offres du marché.

Certains professionnels du marché des fonds d’investissement (en particulier les gestionnaires et les distributeurs) doivent prendre en compte des changements fondamentaux afin de maintenir ou d’augmenter leurs marges de profit. L’investissement dans la technologie et la réorganisation des opérations leur permettront de le faire. 

La digitalisation et l’émergence d’une économie de plates-formes fournissent de grandes opportunités que ces professionnels peuvent saisir afin d’augmenter les marges. 

Les écosystèmes sont des réseaux qui connectent les utilisateurs aux producteurs et fournissent ainsi un accès plus facile aux services pour les investisseurs.

Luc CourtoisLuc Courtois, Partner (Bonn Steichen & Partners)

L’économie de plates-formes 

Internet et le web ont donné naissance à une «économie de plates-formes» dans laquelle les plates-formes internet ou «écosystèmes» représentent des modèles d’affaires plus performants. Les écosystèmes sont des réseaux qui connectent les utilisateurs aux producteurs et fournissent ainsi un accès plus facile aux services pour les investisseurs. De la même façon, les écosystèmes permettent aux professionnels qui s’y connectent de réaliser des économies de coûts opérationnels, d’accéder à de nouveaux marchés et de générer des offres à valeur ajoutée qui pourront se traduire par une augmentation de leur marge globale. 

L’évaluation de l’assortiment de produits

Suite à une plus grande transparence et à une amélioration de l’évaluation de la gestion nécessaire pour se conformer aux obligations de surveillance, les professionnels peuvent mieux évaluer leurs assortiments de produits, et enfin mieux déterminer leur positionnement stratégique. En général, vu les coûts de compliance engendrés, les stratégies des produits full-service sont plus difficiles à maintenir. Les professionnels se spécialisent plutôt sur des segments particuliers de clients et/ou de produits, recherchent des associations ou se consolident. Les professionnels les plus grands disposent d’un avantage compétitif vu les économies d’échelle à réaliser.

La digitalisation globale des processus de distribution et l’harmonisation des standards dans les arrangements de partage de données facilitent l’interaction avec les parties tierces.

Luc CourtoisLuc Courtois, Partner (Bonn Steichen & Partners)

Minimisation des coûts

Une fois que l’assortiment de produits et la stratégie ont été déterminés, l’étape suivante consiste en la minimisation des coûts par l’automatisation des processus dans l’information relative aux fonds, par exemple dans la gestion des ordres et les opérations cash et de règlement. Cette automatisation consistera principalement en la structuration des flux d’informations, l’harmonisation des structures de données, l’utilisation des algorithmes afin de traiter des textes et le déploiement d’agents virtuels pour communiquer avec les parties tierces («robotic process automation»). En plus, la digitalisation globale des processus de distribution et l’harmonisation des standards dans les arrangements de partage de données facilitent l’interaction avec les parties tierces, permettant aux professionnels d’outsourcer certains processus à des tiers capables d’exécuter ces processus à un moindre coût. À nouveau, les professionnels pourront réduire leurs coûts, donc augmenter leurs marges. 

L’effet de levier le plus important que la digitalisation peut avoir sur l’augmentation des marges est le développement des produits afin de créer une valeur économique pour laquelle les clients voudront bien payer une prime, comparée aux alternatives bon marché telles que les robo-advisors. En respectant les autres dispositions de droit européen et national, par exemple le RGPD, les professionnels pourront combiner la mine de données reçues sous les règles MiFID II avec d’autres données d’investisseurs telles que les données recueillies via les médias sociaux ou au travers des interactions sur la plate-forme de l’acteur et ainsi concevoir des produits d’investissement sur mesure orientés sur les résultats.

Conclusion

Les coûts abyssaux de la mise en conformité à MiFID II au travers d’investissements dans les structures IT et de la reconfiguration des processus permettent aux professionnels agiles de capitaliser sur la digitalisation des services d’investissement et d’augmenter leur avantage compétitif dans le marché. Pour y arriver, ils doivent remettre en cause chaque aspect de leur modèle de gestion et s’adapter aux marchés d’aujourd’hui.

Article rédigé par Luc Courtois, Partner, et Melvin Tjon Akon, Senior Associate