En dépit de la situation, Telecom Luxembourg entend poursuivre ses activités de services et préserver au mieux les intérêts de ses clients et fournisseurs. (Photo: Luc Deflorenne / archives)

En dépit de la situation, Telecom Luxembourg entend poursuivre ses activités de services et préserver au mieux les intérêts de ses clients et fournisseurs. (Photo: Luc Deflorenne / archives)

Les rumeurs filaient bon train depuis un moment. Les voilà désormais confirmées: l’opérateur alternatif Telecom Luxembourg Private Operator (TLPO) a présenté, au tribunal d’arrondissement de Luxembourg, une requête de mise en gestion contrôlée. Un régime rarement appliqué, mais qui permet pourtant à une société en difficulté d’éviter la faillite ou l’arrêt immédiat de son activité, tout en lui permettant de vendre tout ou partie de ses actifs.

Dès la fin de la semaine dernière, bon nombre de sociétés du secteur avaient reçu, de la part de TLPO, un courrier les informant de la situation. Il s’agissait aussi de leur indiquer que la société est, de fait, en vente et que les candidats repreneurs ont jusqu’au 10 octobre pour se manifester.

«Au cours des nombreuses discussions qui vont se succéder dans les semaines à venir, la direction de TLPO s’engage à mettre tout en œuvre pour préserver au mieux les intérêts de ses clients et de ses fournisseurs», indique un communiqué diffusé ce jour.

Cessation de paiement

La menace planait plus que sérieusement depuis cet été au-dessus de la tête du lion rouge, emblème de cet opérateur créé en 2009 sur les bases de l’intégrateur SIT Group, fondé 11 années auparavant.

Le 29 juillet dernier, le conseil d’administration de Telecom Luxembourg avait convenu qu’une décision était à prendre sur la continuité d’exploitation de la société. «La direction et les membres du conseil d’administration s’engagent à la plus grande vigilance dans la gestion de la société lors des prochaines semaines afin de détecter tout élément défavorable amenant à prononcer l’aveu de faillite», peut-on lire dans les annexes du rapport annuel 2015 de la société.

Deux semaines plus tard, ce même conseil d’administration, présidé par le fondateur de la société, Jérôme Grandidier, avait ni plus ni moins reconnu l’état de cessation de paiement et entamé les démarches pour la préparation d’un dossier d’aveu de cessation de paiement, tout en étudiant d’autres solutions alternatives.

Article 100 activé

En dépit d’un chiffre d’affaires dépassant les 10 millions d’euros, l’exercice 2015 de Telecom Luxembourg s’était soldé sur une perte de 2,9 millions d’euros, portant les pertes cumulées à 12,1 millions au 31 décembre 2015. Des pertes abyssales dues «aux frais de développement des activités de la société», tel qu’expliqué dans l’annexe des comptes 2015. À la fin du dernier exercice, le passif circulant excédait l’actif circulant de 3,8 millions d’euros.

TLPO avait notamment procédé au rachat de la plateforme et des clients voicecloud d’Unify et, surtout, du réseau international de fibres optiques développé par Luxconnect. Une opération qui avait été clôturée pour un montant compris entre 1,4 et 2,2 millions d’euros

Telecom Luxembourg avait procédé, à plusieurs reprises, à une recapitalisation – via son actionnaire BIP, qui détient 49,9% du capital social – et avait dû plusieurs fois faire jouer l’article 100 de la loi luxembourgeoise sur les sociétés commerciales l’autorisant à poursuivre ses activités en dépit de pertes dépassant 50% du capital social.

BIP coupe le robinet

Plus récemment, la société avait également conclu un partenariat avec Orange Luxembourg pour le déploiement de connexions mobiles à très haut débit (4G et 4G+) pour compléter la connectivité des réseaux, de la fibre et des data centers. 

La société avait également entamé des négociations avec plusieurs repreneurs potentiels ces derniers mois, notamment un belge et un anglais. Des discussions qui n’ont finalement jamais abouti, rendant inéluctable l’annonce de ce lundi.

Le changement de cap annoncé par BIP a sans doute constitué la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, l’actionnaire de référence de TLPO ayant annoncé, au même moment, son plan de désengagement, dans un délai de quatre à six ans, de l’ensemble des participations de son portefeuille en vue de créer une nouvelle structure d’investissements.

Privé ainsi de son robinet d’alimentation et faute d’avoir pu être vendu dans des «bonnes conditions», Telecom Luxembourg Private Operator va donc être dépecé à des niveaux financiers forcément moins avantageux. À l’exception du repreneur, tout le monde y perdra donc beaucoup de plumes.