Corinne Cahen (DP): «Nous avons une histoire commune et nous sommes de petites régions qui, ensemble, deviennent intéressantes.» (Photo: Mike Zenari)

Corinne Cahen (DP): «Nous avons une histoire commune et nous sommes de petites régions qui, ensemble, deviennent intéressantes.» (Photo: Mike Zenari)

Madame Cahen, comparé au niveau national ou européen, on a l’impression que la Grande Région n’est pas toujours très proche des esprits. Qu’en pensez-vous?

«Pour les 215.000 personnes qui franchissent chaque jour au moins deux fois une frontière, la Grande Région est très proche. Pour les Luxembourgeois aussi, elle est très palpable, car nous nous situons en son noyau. De la capitale, on ne met que 20 minutes pour se rendre dans nos trois pays voisins. Les Luxembourgeois visitent beaucoup Trèves, Sarrebruck, Metz, Nancy, Thionville ou Arlon. Tout cela n’a rien de nouveau ni de spécial. Ce qui est plus rare peut-être, c’est quelqu’un de Nancy qui ferait venir quelqu’un d’Eupen pour y travailler. Les relations bilatérales fonctionnent évidemment beaucoup plus clairement et concrètement que les multilatérales. Il y a cependant des projets extrêmement intéressants dans la Grande Région, où l’on constate une fois de plus que le Luxembourg joue le rôle central.

Ce qui est également palpable, c’est les embouteillages. En consultant le réseau routier européen sur Google Maps pendant les heures de pointe, on aperçoit une tache rouge sur Paris, Londres, mais aussi Luxembourg. Malgré la Grande Région, on dirait qu’on n’arrive pas à coordonner des projets transfrontaliers?

«Nous y travaillons. Quand on parle de Grande Région et de ses points rouges, alors on parle de trois volets: le transport évidemment, l’emploi et l’éducation. Il est évident qu’on doit faire mieux. Les gens prennent le moyen de transport le plus confortable et il est très clair que nous voulons augmenter la cadence des trains et construire plus d’emplacements ‘park & ride’ aux frontières, aussi bien au Luxembourg que de l’autre côté. Nous devons également réfléchir aux horaires de travail. Est-ce qu’on doit tous commencer le travail à la même heure ou non? Et puis, il y a aussi le télétravail. Peut-on envisager par exemple un jour de télétravail par semaine? Si tout le monde pouvait travailler un jour à domicile, on réduirait de 20% le trafic routier. Toujours dans ce contexte, il y a le covoiturage. Le ministère du Développement durable et des Infrastructures est en train de préparer un projet très ambitieux. On sait qu’actuellement, une voiture transporte en moyenne 1,1 personne. C’est complètement débile, nous devons augmenter ce chiffre. En arrivant à deux personnes par voiture, on diviserait par deux le nombre de véhicules sur nos routes. Cela dit, ce sont des défis qui ne seront pas accomplis du jour au lendemain.

La Grande Région est, au fond, un noyau dans l’Europe

Corinne Cahen, ministre de la Famille, de l’Intégration et à la Grande Région

Quelles seront les priorités de la présidence luxembourgeoise?

«J’en ai déjà cité trois: transport, travail et éducation. C’est là que nous voulons principalement mettre l’accent. Nous voulons aussi une présidence proche du citoyen, et pour ça nous voulons faire des choses concrètes. Avec l’un ou l’autre État nous avons un accord pour la formation professionnelle. Alors pourquoi ne pas le faire pour toute la Grande Région? Nous avons des accords sanitaires, des accords entre les hôpitaux, des accords entre les services d’urgence pour pouvoir traverser les frontières. Nous avons un accord Benelux sur la reconnaissance des diplômes et nous voulons désormais faire ça avec nos partenaires allemands. Mais nous aimerions faire tout ça ‘grand-régionalement’ pour permettre à tout le monde d’aller dans les autres régions. Je pense que ce sont des choses très concrètes qui sont importantes dans le quotidien des gens.

Comment peut-on définir une identité de la Grande Région?

«Nous avons une histoire commune et nous sommes de petites régions qui, ensemble, deviennent intéressantes. Mais nous sommes aussi très diversifiés et offrons une grande richesse culturelle. La Grande Région est, au fond, un noyau dans l’Europe, qui doit prouver que quand celle-ci ne fonctionne plus très bien, il est important qu’il n’y ait pas de frontières, que nous travaillions ensemble et que nous soyons soudés.»