Les investissements en private equity (PE) s’effectuent sur base d’un horizon de temps limité, avec en ligne de mire une ou plusieurs stratégies de sortie (exit) réfléchies en amont. Celles-ci ont peu évolué jusqu’à récemment, mais quelques tendances viennent désormais bousculer l’ordre établi en la matière.

Un cycle de vie rodé 

Le PE se définit par un cycle de vie qui s’articule selon une méthodologie bien rodée. La phase dite de sourcing va permettre d’identifier la cible. Elle est suivie de l’acquisition de celle-ci, après un audit poussé (due diligence). L’objectif du nouveau propriétaire sera ensuite de créer de la valeur ajoutée en utilisant différents leviers. Le dernier défi pour l’investisseur sera de choisir une stratégie de sortie qui maximisera le prix de cession tout en présentant des contraintes acceptables.  

L’objectif du nouveau propriétaire sera ensuite de créer de la valeur ajoutée en utilisant différents leviers.
Sébastien Binard

Sébastien BinardPartnerArendt & Medernach

Différentes stratégies de sortie 

On distingue traditionnellement deux grandes catégories de stratégies de sortie d’investissement. L’IPO (initial public offering) consiste en une offre publique de titres effectuée par la société détenue en portefeuille, accompagnée d’une cotation de ceux-ci sur un marché boursier. Elle est intimement liée aux fluctuations des marchés de capitaux et se révèle être un processus long, complexe et coûteux, dont la réussite reste incertaine. La sortie par IPO se fera la plupart du temps au fil de l’eau (par la vente de «blocs» de titres), avec les risques, mais également les attraits que cela comporte. Une étude récente indique qu’environ 10% des exits se fonts par voie d’IPO.

À côté de celle-ci, la vente privée – largement majoritaire – prend un nombre de formes diversifiées et a fait l’objet d’évolutions récentes. La forme la plus courante est celle des enchères privées. Celles-ci ont pour objectif de mettre en concurrence plusieurs candidats acquéreurs afin de maximiser le prix de sortie. Ce processus, s’il n’est pas simple pour autant, est certainement moins complexe à mener qu’un IPO. Une attention particulière sera toutefois portée au risque de détournement d’informations confidentielles mises à disposition des candidats acquéreurs, dont certains peuvent être des concurrents de la société vendue.

Dernières tendances 

En matière d’exits, nous voyons trois tendances récentes à remarquer: les durées de détention s’allongent, de nouvelles sources de liquidités sont disponibles et le caractère durable de l’activité des sociétés vendues prend de l’importance.

Tout d’abord, il apparaît que les investissements en private equity sont détenus plus longtemps que par le passé (étude «eFront»: exit après 3,8 ans en 2010, pour 5,4 ans en 2019). Ceci s’explique notamment par le fait que les leviers financiers classiques permettant d’accroître la valeur d’une société détenue en portefeuille deviennent moins efficaces au fur et à mesure que la sophistication des cibles s’accroît. Ils doivent être remplacés par un réel effort de transformation opérationnelle et/ou stratégique de ces sociétés afin d’atteindre les objectifs de rendement convenus avec les investisseurs, cet exercice se montrant généralement chronophage. Certains gestionnaires adoptent également une stratégie d’investissement à plus long terme, visant par exemple un exit à un horizon de 10 à 15 ans.  

Les leviers financiers classiques permettant d’accroître la valeur d’une société détenue en portefeuille deviennent moins efficaces au fur et à mesure que la sophistication des cibles s’accroît.
Sébastien Binard

Sébastien BinardPartnerArendt & Medernach

Ensuite, de nouvelles sources de liquidité sont apparues, créant davantage de concurrence entre acquéreurs de sociétés privées. Il s’agit en particulier des SPACs (special acquisition companies), type de véhicules d’investissement ayant récemment fait l’objet d’une grande publicité dont les titres sont cotés en bourse et créés dans le but unique d’acquérir ou de fusionner avec une société cible (via, selon le jargon en vigueur, une business combination). Ils se situent à mi-chemin entre la vente privée et l’IPO et ont l’avantage d’être à même de payer un prix de cession élevé, parfois plus que d’autres acteurs financiers ou industriels, bien que le risque que cela se fasse au détriment de certaines catégories de leurs investisseurs ne soit pas inexistant.

Une autre source de liquidité inconnue jusqu’il y a quelques années sont les continuation funds, mis en place par les gestionnaires de private equity et certains de leurs investisseurs en vue d’acquérir un actif déjà détenu en portefeuille. Ce cas de figure se présente généralement lorsque la réalisation de l’investissement tarde à se matérialiser, que la période d’investissement convenue avec les investisseurs est dépassée ou bien qu’il n’est simplement pas souhaitable de vendre à ce stade pour une majorité des investisseurs exposés à l’investissement concerné. Ici, le risque principal que nous voyons est relatif à la gestion des conflits d’intérêts qui peuvent exister dans le chef du gestionnaire, qui devra s’assurer d’une valorisation adéquate de la transaction étant donné que les investisseurs du véhicule cédant et du véhicule repreneur seront au moins en partie différents.

Enfin, la composante ESG commence à jouer un rôle-clé dans les transactions de private equity, notamment au stade de la due diligence de l’acquéreur. Il paraît aujourd’hui clair que les entreprises ESG compliant (c’est-à-dire se conformant à certains principes en matière de respect de l’environnement, d’impact sociétal et de saine gouvernance) se verront octroyer une prime à la revente alors que, à l’inverse, ceux qui ne respectent pas certains critères ESG auront de plus en plus de mal à se mettre sur le marché.

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