Outre l’inflation, le retour en force de la réglementation amène de l’incertitude dans les prévisions des chief investment officers. (Photo: Shutterstock)

Outre l’inflation, le retour en force de la réglementation amène de l’incertitude dans les prévisions des chief investment officers. (Photo: Shutterstock)

Selon les chief investment officers de M&G, la crainte d’une inflation structurelle et non plus transitoire vient chahuter les prévisions les plus récentes. Une rehausse trop agressive des taux d’intérêt serait donc une erreur politique de la part des banques centrales. Les raisons de la soudaine surchauffe inflationniste restent encore floues, laissant entrevoir un possible futur ralentissement de la croissance.

Face à la hausse de l’inflation historique de 7% aux États-Unis et de 5% dans la zone euro, M&G a tenu à informer ses investisseurs au sujet de l’impact sur les principales classes d’actifs. En ce qui concerne les investissements à revenus fixes, Jim Leaviss, chief investment officer pour la division Public Fixed Income de M&G, donne le ton: «L’inflation est l’ennemi des investissements à revenus fixes.» Celui qui a été nommé «Britain’s best-known bond investor» par The Daily Telegraph explique que les investisseurs peuvent se protéger en acquérant des obligations indexées sur l’inflation ou des obligations à taux variables.

Tant que les perspectives de croissance restent constructives, comme c’est le cas actuellement, c’est bon pour les actions.
Fabiana Fedeli

Fabiana Fedelichief investment officer, division EquitiesM&G Investments

Du point de vue des actions, l’inflation en tant que telle ne représente pas le principal problème, mais plutôt les perspectives de croissance qui l’entourent, déclare quant à elle Fabiana Fedeli, chief investment officer de la division Equities. «Tant que les perspectives de croissance restent constructives, comme c’est le cas actuellement, c’est bon pour les actions», indique-t-elle, tout en rappelant qu’elles s’en sortent mieux que la plupart des autres classes d’actifs. Fabiana Fedeli se montre donc optimiste. Toutefois, elle déclare que, pour les portefeuilles multi-actifs, elle opte pour une stratégie de diversification par le biais, notamment, de positions sur les obligations des marchés émergents. Les marchés ne sont en effet pas à l’abri d’un resserrement monétaire trop rapide.

En matière d’actifs privés, l’impact de la hausse de l’inflation varie, qu’il s’agisse d’actifs réels ou relatifs à la dette, explique pour sa part William Nicoll, chief investment officer de la division Private and Alternative Assets. «Si vous regardez les actions d’infrastructure, une grande partie des revenus est directement liée à l’inflation», prend-il comme exemple.

Vers une inflation structurelle?

Malgré tout, la principale question autour de l’inflation reste de savoir si elle est structurelle ou transitoire. Dans le cas d’une inflation structurelle, la donne changerait alors complètement pour les marchés obligataires qui «ont travaillé en partant de l’hypothèse que l’inflation serait transitoire», explique Jim Leaviss. Pourtant, les chiffres de l’inflation ne cessent d’atteindre des scores élevés.

La surprise est d’autant plus grande que la reprise économique post-Covid s’avère plus rapide que celle qui avait emboîté le pas à la crise financière de 2008. «Ce qui place les banques centrales dans une position difficile.» En effet, selon Jim Leaviss, le défi pour les banques centrales sera de savoir ce qui se passera après, s’attendant à ce qu’elles n’agissent ni trop rapidement ni trop agressivement, à défaut «de commettre une erreur de politique». Quitte à avoir plusieurs coups d’avance, il suspecte que «cette inflation sera en fait la cause de la prochaine récession ou du prochain ralentissement de croissance, plutôt qu’une réponse à une forte croissance économique».

Cette inflation sera en fait la cause de la prochaine récession ou du prochain ralentissement de croissance, plutôt qu’une réponse à une forte croissance économique.
Jim Leaviss

Jim Leavisschief investment officer, division Public Fixed IncomeM&G Investments

Jim Leaviss ne cache pas son étonnement sur la tendance de l’inflation: «Je pense que tout le monde est dans le même bateau à travers le monde en ne sachant pas vraiment comment ni pourquoi la réponse de l’inflation à la sortie de crise de cette pandémie a été si forte.» Est-ce l’effet de la pandémie? Il y a quelque chose qui semble ne pas s’expliquer. Comme le rappelle Jim Leaviss, «au niveau de l’inflation, nous sommes peut-être 4 ou 5% plus élevés que si nous n’avions pas eu la pandémie». Et il ajoute: «Il y a donc autre chose qui se passe, en plus des effets du Covid.» Sa crainte serait que l’inflation soit «absolument fulgurante» en 2022, laissant «une situation très difficile pour les décideurs politiques» d’ici la fin de l’année. 

Les effets d’un tour de force réglementaire

Outre l’inflation et les conséquences d’une éventuelle erreur de politique monétaire de la part des banques centrales, la réglementation constitue un risque pour les marchés cette année, selon la responsable des Equities chez M&G. De la sorte, Fabiana Fedeli mentionne les lourdes dépenses des gouvernements au cours de la pandémie, qui pourraient résulter sur une augmentation des taxes.

La réglementation et l’activité gouvernementales sont plus musclées qu’elles ne l’ont été sur les marchés depuis longtemps.
William Nicoll

William Nicollchief investment officer, division Private and Alternative AssetsM&G Investments

William Nicoll rejoint également cette opinion sur le risque réglementaire. Ce dernier, en charge de la division Private and Alternative Assets, soulève que «la réglementation et l’activité gouvernementales sont plus musclées qu’elles ne l’ont été sur les marchés depuis longtemps». Citant l’exemple du règlement européen sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers (SFDR), il y voit un aspect positif, mais nuance. «Ces règles signifient qu’aujourd’hui, tout le monde veut avoir les idées les plus importantes et les plus respectueuses des critères ESG, mais il n’y a peut-être pas assez d’actifs pour répondre à cette demande.» De façon plus générale, la réglementation a l’effet de faire évoluer les marchés de façon imprévisible, changeant les règles du jeu et impactant donc les prévisions à long terme des investisseurs.