Guy Wagner, DG de Banque de Luxembourg Investments, suggère de surveiller de près les taux d’intérêt en 2022. (Photo: Banque de Luxembourg)

Guy Wagner, DG de Banque de Luxembourg Investments, suggère de surveiller de près les taux d’intérêt en 2022. (Photo: Banque de Luxembourg)

L’exercice traditionnel des prévisions économiques serait-il tout particulièrement difficile cette année? À en croire Guy Wagner, directeur général de Banque de Luxembourg Investments (BLI), la réponse est oui.

Dans un contexte où le taux de l’inflation bat des records historiques, tous les regards se tournent désormais vers les banques centrales dans l’attente de la moindre de leur déclaration. Le problème est qu’il est tout simplement impossible de savoir vers où ira l’inflation et quelles seront les réponses des autorités monétaires, explique , directeur général de Banque de Luxembourg Investments. Il n’hésite d’ailleurs pas à déclarer que «même les autorités monétaires, pourtant censées être le plus à même de prévoir, n’ont aucune idée du caractère temporaire ou durable de la hausse observée en 2021».

Les autorités monétaires, pourtant censées être le plus à même de prévoir, n’ont aucune idée du caractère temporaire ou durable de la hausse observée en 2021.
Guy Wagner

Guy Wagnerdirecteur généralBanque de Luxembourg Investments (BLI)

Prévoir l’évolution de l’inflation en 2022 ressemble donc fortement à une énigme dont personne n’aurait encore la solution. Surtout que le rôle des banques centrales est devenu plus compliqué maintenant que le lien entre la hausse de l’inflation et le resserrement monétaire n’est plus aussi évident qu’avant. «Entre-temps, les banques centrales ont trouvé bon nombre d’objectifs en dehors de la simple stabilité des prix», indique le directeur général de BLI, citant notamment le plein emploi, la croissance des salaires, la réduction des inégalités sociales, le soutien des marchés financiers et le changement climatique.

Garder un œil sur les taux d’intérêt

Face à l’imprévisibilité de l’évolution de l’inflation et des politiques monétaires à venir encore floues, Guy Wagner lance un appel à la prudence aux investisseurs en leur conseillant de «garder l’esprit ouvert et éviter d’avoir des convictions trop fortes».

Guy Wagner tient tout de même à partager certaines de ses convictions. Comme en matière de taux d’intérêt pour les actifs monétaires, par exemple. Fruits d’une «promesse faite par une contrepartie de rembourser une dette à une date fixée d’avance et de payer entre-temps des intérêts dessus», Guy Wagner explique que cette classe d’actifs bénéficie de taux d’intérêt réels élevés. Il précise toutefois que les taux d’intérêt doivent alors être «largement supérieurs au taux d’inflation». N’étant actuellement pas dans cette configuration, Guy Wagner suggère alors de se rabattre sur les actifs réels.

Toujours dans le domaine des actifs réels, le niveau des taux d’intérêt revêt une double importance. D’une part, «il influence le taux d’actualisation utilisé dans les modèles de valorisation des actions». Ce qui permet en effet de valoriser les bénéfices futurs d’une entreprise. D’autre part, les taux d’intérêt déterminent l’attrait des actifs monétaires et placements obligataires. En ce sens, Guy Wagner souligne que «les taux et bénéfices ont été particulièrement favorables aux actions en 2021», mais doute que la tendance perdure encore cette année.

En finir avec la dictature des indices de référence

Du côté du marché des actions, le directeur général de BLI identifie un risque sur la question des indices de référence: «Battre les indices et protéger le capital de ses clients deviennent des objectifs de plus en plus incompatibles pour un gestionnaire.» Une incompatibilité qui ne se voit pas tant que la tendance des marchés reste à la hausse, mais qui ne tarderait pas à s’inverser aussitôt dans le cas contraire.

Par conséquent, Guy Wagner encourage les investisseurs souhaitant s’écarter d’une stratégie basée sur les indices à adopter une approche active en bourse. Pour ce faire, il préconise de se tourner naturellement vers des actions d’entreprises créant de la valeur sur le long terme pour leurs actionnaires. Sont alors à écarter toutes celles qui se trouvent dans «des secteurs très cycliques» où le cash-flow généré est réinjecté dans l’outil de production.

Battre les indices et protéger le capital de ses clients deviennent des objectifs de plus en plus incompatibles pour un gestionnaire.
Guy Wagner

Guy Wagnerdirecteur généralBanque de Luxembourg Investments

Néanmoins, les valeurs de qualité sont devenues chères, explique Guy Wagner. La logique pousserait donc «d’en sortir au profit des valeurs de moindre qualité». Ce qui a du sens dans l’hypothèse où la tendance à la hausse des taux d’intérêt resterait alors constante. Mais, d’un autre côté, les valeurs de moindre qualité, «pour faire de l’argent grâce à elles, il faut généralement un très bon timing». Ce qui n’est pas pour autant la philosophie de Guy Wagner, qui favorise des prises de participation sur le long terme. En revanche, il propose de sortir des valeurs de bonne qualité trop élevées et d’ensuite les racheter aussitôt leur cours corrigé. Une autre option serait de réduire le poids de ces valeurs «au profit d’autres valeurs de qualité dont le cours a moins monté».

Dans l’ensemble, Guy Wagner s’attend à une année «nettement plus difficile pour les marchés», à un moment où la capacité des économies et des marchés financiers à aborder une hausse des taux d’intérêt reste pour le moins incertaine. C’est sans compter le fait que de nouveaux risques géopolitiques émergent et que la pandémie toujours en cours laisse planer son lot d’incertitudes.